Augustin et Hôpital de l'Enfant-Jésus (St-Sacrement) |
2011 QCCLP 7009 |
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DÉCISION RELATIVE À UNE REQUÊTE EN RÉVISION OU EN RÉVOCATION
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[1] Le 27 juillet 2011, madame Ludmilla Augustin (la travailleuse) dépose une requête en révocation à l’encontre d’une décision de la Commission des lésions professionnelles du 15 juillet 2011.
[2] Par cette décision, la Commission des lésions professionnelles tranche deux requêtes soumises par la travailleuse. Dans le dossier 429346-31-1101, elle rejette la contestation de la travailleuse, confirme une décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST), le 18 janvier 2011, à la suite d’une révision administrative, déclare que la travailleuse doit rembourser la somme de 9 489,48 $ à la CSST. Dans le dossier 434716-31-1103, elle rejette la seconde requête de la travailleuse, confirme la décision de la CSST du 22 mars 2011 rendue à la suite d’une révision administrative et déclare que la travailleuse a droit à l’indemnité de remplacement du revenu à compter du 15 décembre 2010.
[3] À l’audience tenue le 27 octobre 2011 à Québec, la travailleuse est présente et accompagnée de son conjoint.
[4] Hôpital de l’Enfant-Jésus (St-Sacrement), l’employeur, est absent. Dans une lettre du 4 octobre 2011, sa procureure avise de cette absence et demande au tribunal de maintenir la décision de la Commission des lésions professionnelles du 15 juillet 2011.
L’OBJET DE LA REQUÊTE
[5] La travailleuse demande la révocation de la décision de la Commission des lésions professionnelles du 15 juillet 2011. Elle invoque qu’elle n’a pu se faire entendre, pour des raisons qu’elle juge suffisantes.
L’AVIS DES MEMBRES
[6] Le membre issu des associations d’employeurs et celui issu des associations syndicales sont d’avis de révoquer la décision de la Commission des lésions professionnelles du 15 juillet 2011. La travailleuse n’a pu se faire entendre à l’audience prévue le 14 juillet 2011. Les raisons invoquées sont suffisantes.
LES FAITS ET LES MOTIFS
[7] Le tribunal doit déterminer s’il y a lieu de révoquer la décision de la Commission des lésions professionnelles du 15 juillet 2011.
[8] Le pouvoir de la Commission des lésions professionnelles de réviser ou révoquer une décision qu’elle a rendue est prévu à l’article 429.56 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi), lequel se lit comme suit :
429.56. La Commission des lésions professionnelles peut, sur demande, réviser ou révoquer une décision, un ordre ou une ordonnance qu'elle a rendu :
1° lorsqu'est découvert un fait nouveau qui, s'il avait été connu en temps utile, aurait pu justifier une décision différente;
2° lorsqu'une partie n'a pu, pour des raisons jugées suffisantes, se faire entendre;
3° lorsqu'un vice de fond ou de procédure est de nature à invalider la décision.
Dans le cas visé au paragraphe 3°, la décision, l'ordre ou l'ordonnance ne peut être révisé ou révoqué par le commissaire qui l'a rendu.
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1997, c. 27, a. 24.
[9] Le recours en révision ou révocation doit être considéré comme un recours d’exception. Ce pouvoir de réviser ou révoquer que possède la Commission des lésions professionnelles s’inscrit dans le contexte de l’article 429.49 de la loi. À cet article, le législateur indique bien qu’une décision de la Commission des lésions professionnelles est finale et sans appel et que toute personne visée doit s’y conformer.
[10] Tel qu’indiqué, la travailleuse soumet qu’elle n’a pu se faire entendre pour des raisons qui doivent être jugées suffisantes. Il s’agit du second paragraphe de l’article 429.56 de la loi.
[11] Pour être jugées suffisantes, les raisons invoquées doivent être sérieuses et il ne doit pas y avoir eu négligence de la part de la partie qui prétend n’avoir pu se faire entendre. La règle qui doit toujours guider le tribunal lorsqu’il a à décider de cette question est le respect des règles de justice naturelle[2].
[12] Dans la cause sous étude, une audience était initialement prévue le 28 juin 2011. À cette date, la Commission des lésions professionnelles devait entendre les parties concernant les deux requêtes soumises par la travailleuse (dossiers 429346-31-1101 et 434716-31-1103).
[13] Pour le dossier 429346-31-1101, il est question du remboursement d’une somme versée en trop à la travailleuse et dans le dossier 434716-31-1103, il est question du droit à l’indemnité de remplacement du revenu de la travailleuse. Pour les deux dossiers, il s’agit d’un contexte de retrait préventif d’une travailleuse enceinte.
[14] La travailleuse explique qu’elle communique avec la technicienne au greffe de la Commission des lésions professionnelles pour demander une remise de cette audience prévue le 28 juin 2011. Elle doit se rendre à New York pour un baptême.
[15] La technicienne demande à la travailleuse de formuler une demande écrite et lui mentionne qu’une nouvelle date d’audience pourrait être prévue en octobre 2011.
[16] Le 27 juin 2011, la travailleuse envoie, par télécopieur, une demande de remise.
[17] Elle n’a aucun appel à la suite de l’envoi de sa demande. Elle quitte pour New York et revient au début du mois de juillet 2011.
[18] Le 14 juillet 2011, vers 15 heures, elle va chercher le courrier. Elle prend alors connaissance d’un avis de convocation de la Commission des lésions professionnelles. La travailleuse est convoquée à une audience devant avoir lieu le 14 juillet 2011, à 10 heures.
[19] La travailleuse communique à nouveau avec la technicienne du greffe. Cette dernière l’informe qu’elle était en vacances et quelqu’un d’autre devait communiquer avec la travailleuse concernant cette nouvelle date.
[20] La travailleuse est également informée que le 28 juin 2011, la formation qui devait entendre le dossier s’est réunie et, en l’absence de la travailleuse, a décidé de fixer l’audience au 14 juillet 2011.
[21] La travailleuse insiste sur le fait qu’elle aurait initialement été avisée qu’une audience pourrait avoir lieu en octobre 2011. Elle rappelle également que personne ne l’a appelé. L’avis de convocation n’est arrivé que le 14 juillet 2011. Elle indique avoir eu des problèmes de réception de courrier à cette époque en raison de la grève à Postes Canada.
[22] C’est dans ce contexte que la travailleuse demande la révocation de la décision du 15 juillet 2011. Elle aurait voulu assister à l’audience afin de faire valoir sa position.
[23] Dans les circonstances, le tribunal révoque la décision de la Commission des lésions professionnelles du 15 juillet 2011.
[24] Une audience était prévue le 14 juillet 2011. À cette date, la travailleuse n’a pu se faire entendre pour des raisons que le tribunal juge suffisantes.
[25] Il aurait certes été plus prudent que la travailleuse s’assure de la remise de l’audience et de la date à laquelle cette audience avait été remise avant de quitter pour New York.
[26] Il n’en demeure pas moins que celle-ci avait eu une information pouvant lui laisser croire qu’une audience pourrait avoir lieu en octobre 2011.
[27] Aussi, un appel devait être fait à la travailleuse, lequel n’a pas eu lieu. Ceci, combiné à la grève à Postes Canada, peut expliquer que la travailleuse n’a pu être avisée de l’audience du 14 juillet 2011 à temps.
[28] Dans un tel contexte, les règles de justice naturelle et particulièrement celle consacrant le droit d’être entendu, doivent primer par rapport à une certaine imprudence ou insouciance dont à pu faire preuve la travailleuse à la suite de l’envoi de sa demande de remise à la Commission des lésions professionnelles le 27 juin 2011.
[29] La travailleuse n’a pas à démontrer que la décision de la Commission des lésions professionnelles du 15 juillet 2011 aurait été différente si elle avait pu se faire entendre le 14 juillet 2011. Elle soumettra sa preuve et fera valoir ses arguments, le cas échéant, lors d’une nouvelle audience.
[30] Il y a donc lieu de révoquer la décision de la Commission des lésions professionnelles du 15 juillet 2011 et de convoquer à nouveau les parties afin qu’elles soient entendues sur le bien-fondé des contestations de la travailleuse des 26 janvier 2011 (dossier 429346-31-1101) et 28 mars 2011 (dossier 434716-31-1103).
PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :
ACCUEILLE la requête en révocation déposée le 27 juillet 2011 par madame Ludmilla Augustin, la travailleuse;
RÉVOQUE la décision rendue le 15 juillet 2011 par la Commission des lésions professionnelles;
ET
CONVOQUERA à nouveau les parties à une audience sur le fond des contestations déposées par madame Ludmilla Augustin.
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SOPHIE SÉNÉCHAL |
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