Décision

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COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

RÉGION :

Yamaska

SAINT-HYACINTHE, le 28 février 2001

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIER :

138980-62B-0005

DEVANT LA COMMISSAIRE :

Nicole Blanchard, avocate

 

 

 

 

 

 

 

ASSISTÉE DES MEMBRES :

Nicole Généreux

 

 

 

Associations d’employeurs

 

 

 

 

 

 

 

Noëlla Poulin

 

 

 

Associations syndicales

 

 

 

 

 

 

ASSISTÉE DE L’ASSESSEUR :

André Perron, médecin

 

 

 

 

DOSSIER CSST :

003086170

AUDIENCE TENUE LE :

12 décembre 2000

 

 

 

 

 

 

 

 

 

À :

Saint-Hyacinthe

 

 

 

 

 

 

_______________________________________________________

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

MARCEL ROULEAU

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE REQUÉRANTE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

et

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

LIGNES SUR PAVAGE INC.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE INTÉRESSÉE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

DÉCISION

 

 

[1]               Le 17 mai 2000, monsieur Marcel Rouleau (le travailleur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue le 6 avril 2000 à la suite d’une révision administrative.

[2]               Par cette décision, la CSST confirme trois décisions qu’elle a initialement rendues les 13 octobre 1998, 31 mai et 1er juin 1999 et déclare que le travailleur n’a pas droit au remboursement de certains médicaments, que les diagnostics de hernie musculaire de la jambe gauche, de hernie musculaire de la jambe droite et chondromalacie du genou droit ne sont pas en relation avec l’événement du 29 juillet 1989 et qu’il n’a pas lieu non plus de procéder au remboursement de bas élastique et d’une attelle d’alignement.

L'OBJET DE LA CONTESTATION

[3]               Le travailleur demande de reconnaître qu’il a droit au remboursement de certains médicaments, que les diagnostics de hernie musculaire de la jambe gauche et de chondromalacie du genou droit sont en relation avec son accident du travail de juillet 1989 et qu’il a droit au remboursement des frais occasionnés pour l’achat de bas élastique et d’une attelle d’alignement. Quant au diagnostic de hernie musculaire de la jambe droite, il mentionne que jamais ce diagnostic n’a été posé par ses médecins.

LES FAITS

[4]               Le 29 juillet 1989, alors qu’il effectue son travail de traceur de lignes, monsieur Rouleau, alors âgé de 33 ans, est frappé par une automobile. Il est hospitalisé d’abord à l’hôpital du Sacré - Cœur puis à l’hôpital Marie Clarac pour une période de réadaptation de 4 semaines comprenant des interventions en neuropsychologie, en psychologie et en éducation physique. Le dossier médical fait état des diagnostics suivants :  polytraumatisé avec traumatisme cranio‑cérébral, fracture ouverte du tibia et péroné gauche, fracture fermée de la rotule droite, fracture du massif facial, fracture triple de la mandibule, fractures dentaires. Le 17 août 1989, une phlébographie de la jambe gauche est positive. À compter de septembre 1989, le travailleur reçoit de la CSST une allocation d’aide personnelle à domicile.

[5]               Le 12 juillet 1990, la CSST réfère le travailleur en réadaptation puisque la lésion entraîne une atteinte permanente cumulée de 101,37 % et des limitations fonctionnelles.

[6]               Le 19 juillet 1991, un emploi convenable de réparateur de machines de bureau est établi et afin de rendre le travailleur apte à l’exercer, une formation est autorisée. Mais, le 10 février 1992, la CSST modifie ce plan de réadaptation, puisqu’une réévaluation des possibilités professionnelles du travailleur, suite à son retour aux études, a permis de conclure qu’il est impossible de déterminer un emploi convenable qu’il puisse exercer à temps plein. Par conséquent, la CSST indique au travailleur qu’il bénéficiera de sa pleine indemnité de remplacement du revenu jusqu’à son 65e anniversaire et qu’ensuite elle sera diminuée selon une règle de calcul qu’elle lui explique.

[7]               Le 25 juin 1992, le médecin traitant du travailleur note dans une attestation médicale que le travailleur souffre de douleurs résiduelles. Il pose le diagnostic de chondromalacie rotulienne post-trauma.

[8]               Le 24 février 1993, le docteur Pierre Marois, physiatre, diagnostique entre autres un syndrome fémoro patellaire au niveau du genou droit de même qu’une hernie au jambier antérieur à travers le fascia musculaire au niveau du tibia gauche. Pour ces deux conditions, il a donné quelques conseils, mais précise que si la hernie demeurait problématique, une consultation en orthopédie pourrait s’avérer indiquée. Ce qui a été fait en juillet 1994, où le docteur Fowles, pour cette hernie musculaire antérieure à la jambe gauche post-fracture ouverte, prescrit des bas de support, dont la CSST en rembourse le coût au travailleur.

[9]               Le 30 avril 1998, à la suite d’une enquête qu’elle fait, la CSST réévalue les besoins d’aide personnelle à domicile du travailleur et décide que cette allocation prend fin le 16 janvier 1998. Le 3 juin 1998, le travailleur conteste cette décision mais, le 27 octobre 1998, la CSST, en révision administrative, maintiendra sa décision du 30 avril 1998. S’il y a eu contestation de la part du travailleur à la Commission des lésions professionnelles, cela a donné lieu à un désistement et une transaction a été signée entre le travailleur et la CSST, le 21 mai 1999, où, entre autres, il est convenu que le travailleur est capable d’exercer un emploi convenable d’assembleur de petits objets.

[10]           Entre-temps, en juillet 1998, le travailleur consulte le docteur Gauthier, lequel diagnostique un trouble d’adaptation avec éléments dépressifs secondaires à des problèmes de séquelles physiques et problèmes administratifs. Il demande à ce que le travailleur consulte un psychiatre et une psychologue. Des médicaments sont alors prescrits, que la CSST refuse de rembourser au travailleur dans une décision qu’elle rend le 13 octobre 1998, soit novo‑fluoxetine, novo-alprazol, froben, apo-chlordiazepox, les considérant non reliés au traitement de la lésion professionnelle. Le travailleur a contesté cette décision le 20 octobre 1998.

[11]           Le 15 octobre 1998, la CSST précise, dans une autre décision, qu’elle ne reconnaît pas les diagnostics de dépression situationnelle émis par le docteur Gingras en 1994, d’atteinte neuro-psychologique émis par le docteur Chartrand en juin 1998 ainsi que trouble d’adaptation émis par le docteur Gauthier en septembre 1998. Cette décision n’est pas contestée par le travailleur.

[12]           En avril 1999, le docteur Chafaï, orthopédiste prescrit une nouvelle paire de bas élastique au travailleur pour sa hernie musculaire gauche et une attelle d’alignement patellaire pour sa chondromalacie rotulienne droite. Le docteur Gauthier, quant à lui, prescrit au travailleur les médicaments « Toradol, Imovane », lesquels sont remboursés par la CSST selon le formulaire de frais que le travailleur a rempli et où y apparaît la mention « payé ».

[13]           Le 31 mai 1999, la CSST rend une décision où elle conclut qu’il n’y a pas de relation entre les diagnostics de hernie musculaire de la jambe gauche, hernie musculaire de la jambe droite et chondromalacie du genou droit et la lésion professionnelle du 29 juillet 1989. Le 1er juin 1999, elle en rend une autre où elle informe le travailleur qu’elle n’autorise pas l’aide technique suivante à savoir des bas élastique et attelle d’alignement, ne la considérant pas reliée au traitement de la lésion professionnelle. Le 25 juin 1999, le travailleur conteste ces deux décisions, d’où la décision du 6 avril 2000, rendue par la CSST en révision administrative, laquelle est l’objet de la présente contestation par le travailleur.

[14]           À l’audience, le travailleur déclare qu’il ne comprend pas pourquoi en 1999 la CSST refuse de lui reconnaître sa hernie musculaire à la jambe gauche alors qu’elle l’a déjà reconnue auparavant, soit en 1994. Pourquoi la CSST change-t-elle d’idée ? Il l’ignore, mais il est d’avis que la CSST ne peut agir de la sorte. Il ne comprend pas aussi pourquoi la CSST refuse de lui payer des bas élastique en relation avec cette hernie musculaire alors qu’elle l’a déjà fait auparavant. Par contre, il admet que le diagnostic de hernie musculaire à la jambe droite ne peut être relié à sa lésion professionnelle puisqu’il n’a pas de telle lésion de ce côté là. Le problème du côté droit concerne plutôt son genou, pour lequel son médecin lui a recommandé le port d’une attelle d’alignement. Point bizarre, en juin 2000, il souligne avoir fait l’acquisition d’une attelle au coût de 85 $. Il précise que comme il avait recommencé à travailler à titre de contremaître dans un verger en mai 2000 et que cela lui demandait de marcher ; l’orthèse l’aidait à calmer sa douleur. Il a pris une chance et a soumis sa facture à la CSST pour qu’elle procède à son remboursement et cette fois-là, la CSST le lui a remboursée. À cet effet, il dépose une copie d’un avis de paiement de la CSST le prouvant. Cela lui fait donc dire que si la CSST lui rembourse l’attelle qui lui a été prescrite pour son problème au genou droit, elle ne peut pas venir dire que ce même problème n’est pas relié à son accident. Pour ce qui est des bas, il n’en a pas acheté d’autres. Il utilise toujours ses vieux dont la CSST a procédé à son remboursement à l’époque. Il aimerait bien toutefois pouvoir en avoir des nouveaux en raison de leur vétusté.

[15]           Concernant ses médicaments, il témoigne que ce n’est que durant un mois que la CSST lui en a refusé le remboursement. Toutes les autres fois, elle a procédé au remboursement. À cet effet, l’avis de paiement déposé pour le remboursement de son attelle démontre que la CSST lui a remboursé les médicaments Vioxx, et Imovane. À l’époque, il prenait du Toradol, mais maintenant c’est changé pour Vioxx. Il voudrait que la CSST continue de les lui payer.

L'AVIS DES MEMBRES

[16]           Conformément aux dispositions de l'article 429.50 de la loi, la commissaire soussignée a demandé aux membres qui ont siégé auprès d'elle leur avis sur la question faisant l'objet de la présente contestation, de même que les motifs de cet avis.

[17]           De façon unanime, les membres issus des associations syndicales et d’employeurs sont d’avis que la CSST n’a aucune raison de refuser de rembourser le travailleur pour l’acquisition de bas élastique. Comme elle l’a déjà fait en juillet 1994, ils considèrent alors que la CSST a reconnu que cela était en lien avec le diagnostic de hernie musculaire antérieure à la jambe gauche post-fracture ouverte. La CSST ne peut donc non plus refuser de reconnaître ce diagnostic en relation avec l’accident du travail.

[18]           Par contre, comme le travailleur l’a mentionné, le diagnostic de hernie musculaire à la jambe droite ne peut nullement être reconnu puisqu’il n’a jamais été posé par aucun médecin.

[19]           Pour l’attelle, comme la CSST a procédé à son remboursement en juin 2000, les membres ne trouvent nullement opportun de se prononcer sur cette question, mais considère qu’en faisant un tel geste, la CSST doit être conséquente avec elle-même et elle doit reconnaître le diagnostic de chondromalacie du genou droit en relation avec la lésion professionnelle de juillet 1989, puisque l’attelle a été prescrite pour cette condition. D’ailleurs, les membres notent que ce diagnostic avait déjà été posé en juin 1992 et en février 1993 et que jamais la CSST n’a indiqué que cela n’était pas relié à l’accident. Elle ne peut donc pas le faire en 1999.

[20]           Reste la question des médicaments. Les membres sont d’avis que les seuls remboursements dont le travailleur ne devrait pas avoir droit sont les médicaments qu’il prend en raison de son état dépressif (Novo-fluoxétine, Novo-alprazol, Apo-chlordiazepox) puisque jamais la CSST n’a reconnu le lien avec son accident du travail et cette condition.

 

 

 

LES MOTIFS DE LA DÉCISION

[21]           La Commission des lésions professionnelles doit déterminer si les diagnostics de hernie musculaire de la jambe gauche, hernie musculaire de la jambe droite et de chondromalacie au genou droit sont en relation avec la lésion professionnelle du 29 juillet 1989 et si le travailleur a droit au remboursement des frais occasionnés pour l’achat d’une attelle d’alignement, de bas élastiques et de certains médicaments soit Novo-fluoxétine, Novo-alprazol, Apo-chlordiazepox, Froben.

[22]           Concernant les diagnostics, il est certain et même admis par le travailleur que le diagnostic de hernie musculaire à la jambe droite ne peut être reconnu en relation avec la lésion professionnelle. Le travailleur précise même ne pas avoir une telle lésion de ce côté.

[23]           Pour ce qui est de la hernie musculaire à la jambe gauche et de la chondromalacie au genou droit, la Commission des lésions professionnelles constate que ces diagnostics ne sont pas nouveaux au dossier. Ils ont déjà été posés en 1992, où le médecin traitant du travailleur posait un diagnostic de chondromalacie rotulienne post-trauma sur un rapport médical et en 1993, où le docteur Pierre Marois, physiatre, diagnostiquait entre autres un syndrome fémoro‑patellaire au niveau du genou droit de même qu’une hernie au jambier antérieur à travers le fascia musculaire au niveau du tibia gauche. Pour ces deux conditions, à l’époque quelques conseils avaient été donnés, mais il était fait mention que si la hernie demeurait problématique, une consultation en orthopédie pourrait s’avérer indiqué. Ce qui a été fait en juillet 1994, où le docteur Fowles, pour cette hernie musculaire antérieure à la jambe gauche post-fracture ouverte, a prescrit des bas de support, dont la CSST en a remboursé le coût au travailleur.

[24]           Pourquoi refuse-t-elle aujourd’hui de rembourser l’acquisition d’une nouvelle paire de bas élastique alors qu’elle rembourse l’attelle d’alignement et pourquoi remet-elle en cause ces diagnostics ? Tout comme le travailleur, la Commission des lésions professionnelles ne le sait pas. Mais chose sûre, la Commission des lésions professionnelles est d’avis que la CSST ne peut nullement questionner aujourd’hui ce qu’elle n’a pas fait à l’époque.

[25]           En ce sens, les deux diagnostics se doivent d’être reconnus en relation avec la lésion professionnelle, et ce, d’autant plus qu’ils sont des conséquences directes de l’accident du travail subi en juillet 1989. Donc, la CSST devra rembourser les sommes engagées par le travailleur pour l’acquisition de bas élastique, et ce, tout comme elle l’a déjà fait auparavant. Pour l’attelle, elle a déjà procédé à son remboursement. Il n’y a donc pas lieu d’émettre quelques autres conclusions à ce sujet.

[26]           Reste les médicaments. Le travailleur a témoigné que ce n’est que durant un mois que la CSST a refusé de lui rembourser le coût d’acquisition de certains médicaments et qu’après, elle a toujours procédé au remboursement pour des Toradol, Imovane et Vioxx. Or, la Commission des lésions professionnelles constate que les médicaments que la CSST a refusé de lui rembourser sont Novo-fluoxétine, Novo-alprazol, Apo-chlordiazepox. Ce sont des anti‑dépresseurs et des anxiolytiques. Il ne sont pas prescrits comme traitement adjuvant contre la douleur. Comme la CSST a refusé de reconnaître un diagnostic de nature psychologique en relation avec sa lésion professionnelle et que le travailleur n’a pas contesté cette décision, fort malheureusement, la Commission des lésions professionnelles ne peut en reconnaître le remboursement. Par ailleurs, pour le Froben, qui est un anti-inflammatoire, cela peut très bien être en relation avec la lésion professionnelle. Il y a lieu de voir à son remboursement. Pour ce qui est des autres médicaments, cela ne fait pas l’objet de la décision contestée.

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

ACCUEILLE en partie la requête du travailleur, monsieur Marcel Rouleau ;

INFIRME la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 6 avril 2000 à la suite d’une révision administrative ;

DÉCLARE que les diagnostics de hernie musculaire de la jambe gauche et de chondromalacie au genou droite sont en relation avec la lésion professionnelle du 29 juillet 1989, mais pas celui de hernie musculaire de la jambe droite ;

DÉCLARE que le travailleur a droit au remboursement des coûts défrayés pour l’achat de bas élastique. Comme l’attelle d’alignement a déjà été remboursée au travailleur, il n’y a pas lieu d’émettre quelques autres conclusions à cet effet ;

DÉCLARE que le travailleur a droit au remboursement du médicament Froben, mais pas pour les médicaments Novo-fluoxétine, Novo-alprazol, Apo-chlordiazepox.

 

 

 

 

Nicole Blanchard

 

Commissaire

 

 

 

 

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