Décision

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Gravel et Composantes Nadtech inc. (fermé)

2008 QCCLP 4331

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

Sherbrooke

Le   23 juillet 2008

 

Région :

Estrie

 

Dossier :

343447-05-0803

 

Dossier CSST :

106583206

 

Commissaire :

Me Micheline Allard

 

Membres :

Nicole Girard, associations d’employeurs

 

Gisèle Chartier, associations syndicales

 

 

______________________________________________________________________

 

 

 

Jocelyn Gravel

 

Partie requérante

 

 

 

et

 

 

 

Composantes Nadtech inc. (Fermé)

 

Partie intéressée

 

 

 

 

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION

______________________________________________________________________

 

 

[1]                Le 25 mars 2008, monsieur Jocelyn Gravel, le travailleur, dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue le 15 février 2008 à la suite d’une révision administrative.

[2]                Par cette décision, la CSST confirme celle qu’elle a initialement rendue le
28 septembre 2007 et déclare que le travailleur n’a pas droit au remboursement des frais reliés à la peinture extérieure et à l’élagage des arbres à sa résidence pour l’année 2007.

[3]                Le représentant du travailleur a renoncé à l’audience prévue le 21 juillet 2008 et a produit une argumentation écrite.  L’employeur, Composantes Nadtech inc., est inactif.

L’OBJET DE LA CONTESTATION

[4]                Le travailleur demande de déclarer qu’il a droit au remboursement des frais engagés pour l’élagage des arbres à sa résidence en septembre 2007.

[5]                Il précise qu’il ne demande pas le remboursement de frais engagés pour des travaux de peinture extérieure puisque ceux envisagés à l’été 2007 n’ont pas été effectués.  Il demande par ailleurs à la Commission des lésions professionnelles de déclarer que le refus de la CSST d’autoriser ces travaux est fondé sur un motif contraire à l’article 165 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi).

L’AVIS DES MEMBRES

[6]                Les membres issus des associations d’employeurs et syndicales sont d’avis que la requête du travailleur doit être rejetée.  Ils considèrent que le travailleur n’a pas droit au remboursement des frais engagés pour l’élagage des arbres à sa résidence puisqu’il n’a pas démontré, de façon prépondérante, qu’il aurait effectué lui-même ce travail n’eut été de sa lésion professionnelle.  Quant aux travaux de peinture extérieure, ils estiment que la Commission des lésions professionnelles ne peut rendre une décision déclaratoire à l’égard de travaux qui n’ont pas été exécutés et pour lesquels le travailleur n’a donc pas droit à un remboursement en vertu de l’article 165 de la loi.

LES FAITS ET LES MOTIFS

[7]                L’article 165 de la loi s’applique à la décision que doit rendre la Commission des lésions professionnelles relativement à l’élagage des arbres et à la peinture extérieure à la résidence du travailleur.  Cette disposition se lit ainsi : 

165.  Le travailleur qui a subi une atteinte permanente grave à son intégrité physique en raison d'une lésion professionnelle et qui est incapable d'effectuer les travaux d'entretien courant de son domicile qu'il effectuerait normalement lui-même si ce n'était de sa lésion peut être remboursé des frais qu'il engage pour faire exécuter ces travaux, jusqu'à concurrence de 1 500 $ par année.

__________

1985, c. 6, a. 165.

 

 

[8]                Il ressort de cet article qu’un travailleur a droit au remboursement des frais d’entretien de son domicile, s’il répond aux conditions suivantes :

-          Sa lésion professionnelle a entraîné une atteinte permanente grave, cette notion signifiant que les limitations fonctionnelles du travailleur le rendent incapable d’effectuer les travaux pour lesquels il réclame un remboursement;

-          Le travailleur effectuerait normalement lui-même ces travaux s’il n’avait pas été victime de sa lésion professionnelle;

-          Les frais reliés aux travaux ont réellement été engagés par le travailleur.

-          Les travaux font partie de l’entretien courant du domicile.

[9]                En l’espèce, le travailleur a subi une lésion professionnelle au genou gauche le 21 juillet 1993.  Il a été victime d’une récidive, rechute ou aggravation le 17 octobre 2000 entraînant une atteinte permanente à son intégrité physique et les limitations fonctionnelles suivantes :

-          Le travailleur n’est pas en mesure d’effectuer un travail impliquant des déplacements dans les escaliers, les échelles et les échafaudages;

-          Il ne peut plus effectuer un travail exigeant la position accroupie ou à genoux;

-          Il ne peut plus effectuer un travail où la marche serait constante et au-delà de
30 mètres à la fois, idéalement le travailleur devrait être réorienté dans un travail lui permettant d’être en position assise pour la plupart du temps ou du moins, s’il a à se lever et à marcher quelque peu, de pouvoir s’asseoir à n’importe quel moment;

-          Il ne peut soulever de charges de plus de cinq kilos.

[10]           Par sa décision faisant l’objet du présent litige, la CSST refuse de défrayer le coût relié à l’élagage d’arbres et à la peinture extérieure à la résidence du travailleur pour l’année 2007.

[11]           En ce qui concerne l’élagage des arbres, ce travail a été effectué par l’entreprise Abattage et Émondage André Gosselin le 13 septembre 2007 au coût de 341,85 $, somme que le travailleur a payé par chèque ainsi qu’il appert de la facture signée par monsieur Gosselin.  Cette somme se détaille ainsi :  200 $ pour élaguer des arbres, déchiqueter des branches et nettoyer le terrain; 100 $ pour un « ajustement surplus » et la balance en taxes.  Il est mentionné sur la facture que l’entreprise possède un camion avec une nacelle.

[12]           Le travailleur a produit cette facture à la CSST au soutien de sa demande de remboursement.

[13]           La CSST a refusé cette demande au motif que l’élagage des arbres ne constitue pas un travail d’entretien courant du domicile.

[14]           Dans l’affaire Paquet et Pavillon de l’Hospitalité inc.[2] la Commission des lésions professionnelles décidait que les travaux visant la conservation du terrain et de la résidence d’un travailleur tel qu’ébrancher des arbres et des arbustes, et les couper si nécessaire font partie de l’entretien courant du domicile.  La taille de branches d’arbres a aussi été reconnue à ce titre dans les affaires Brousseau et Protection Viking d’incendie ltée[3]  et Babeu et Boulangeries Weston Québec ltée[4].

[15]           La soussignée partage cette position.  L’élagage des arbres vise en effet le maintien en bon état afin de prévenir des dommages à la résidence et s’inscrit dans l’exécution de travaux habituels, ordinaires d’entretien.

[16]           Par ailleurs, la Commission des lésions professionnelles considère que le travailleur n’a pas droit au remboursement de la somme demandée puisque la preuve ne permet nullement de conclure qu’il aurait effectué le travail d’élagage lui-même n’eut été de sa lésion professionnelle.  Bien que ses limitations fonctionnelles soient manifestement incompatibles avec un travail d’élagage, le travailleur n’a pas démontré, de manière prépondérante, que la dimension et la configuration de ses arbres lui aurait permis, en 2007, de procéder personnellement, n’eut été de sa lésion professionnelle, à l’élagage sans avoir recours à une entreprise spécialisée dans le domaine.  D’autre part, la preuve au dossier n’établit pas que le travailleur effectuait l’élagage de ses arbres avant sa lésion professionnelle, ce qui aurait constitué un indice sérieux de son intention d’y procéder personnellement en 2007 s’il n’avait pas été porteur de limitations fonctionnelles en rapport avec sa lésion professionnelle.

[17]           En ce qui a trait à la peinture extérieure de sa résidence, le travailleur a produit à la CSST une évaluation du 15 août 2007 au montant de 1 150 $.

[18]           La CSST a indiqué qu’elle ne paierait pas ce montant parce qu’elle avait déjà défrayé le coût de travaux de peinture extérieure en 2002, 2003, 2004 et 2005.  Dans sa décision, elle précise que dorénavant ces frais seront remboursés aux 5 ans, conformément à sa politique en la matière.

[19]           Dans son argumentation écrite, le représentant du travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles de rendre une décision sur la validité du motif de refus, et ce, même si les travaux n’ont pas été réalisés et qu’aucun remboursement n’est recherché.

[20]           La Commission des lésions professionnelles ne peut faire droit à cette demande.

[21]           En effet, suivant la jurisprudence, la Commission des lésions professionnelles ne peut disposer à l’avance et de façon exécutoire du droit d’un travailleur au remboursement de frais éventuels susceptibles d’être engagés.  Il serait prématuré de faire droit à une réclamation lorsque des travaux n’ont pas été exécutés et qu’une simple évaluation de leur coût est produite.  Le projet doit être matérialisé puisque l’article 165 de la loi exige que des frais soient engagés pour l’exécution des travaux, cette disposition prévoyant un remboursement et non le versement d’une allocation.[5]  En l’instance, la Commission des lésions professionnelles ne peut que conclure que le travailleur n’a pas droit en vertu de l’article 165 de la loi, à un remboursement pour des travaux de peinture extérieure à sa résidence en 2007.

 

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

REJETTE la requête du travailleur, monsieur Jocelyn Gravel;

CONFIRME la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue le 15 février 2008 à la suite d’une révision administrative;

DÉCLARE que le travailleur n’a pas droit au remboursement de frais pour l’élagage d’arbres et la peinture extérieure à sa résidence en 2007.

 

 

__________________________________

 

Me Micheline Allard

 

Commissaire

 

Philippe Poisson

C.T.T.A.E

Représentant de la partie requérante

 



[1]           L.R.Q., c. A-3.001.

[2]           C.L.P. 142213-03B-0007, 12 décembre 2000, R. Savard.

[3]           C.A.L.P. 18374-61-9004, 15 septembre 1992, L. Boucher.

[4]           C.L.P. 166478-62B-0108, 16 janvier 2003, N. Blanchard.

[5]           Bacon et Général Motors du Canada ltée et CSST, C.L.P. 226939-04-0402, 17 novembre 2004, J.-F. Clément.

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