Décision

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Thériault c

Thériault c. R.

2007 QCCQ 8946

COUR DU QUÉBEC

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

BAIE-COMEAU

LOCALITÉ DE

BAIE-COMEAU

« Chambre criminelle »

N° :

655-01-012974-050

 

DATE :

  Le 14 août 2007

 

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

JEAN-PAUL DECOSTE, J.C.Q.

 

 

SERGE THÉRIAULT (011)

 

REQUÉRANT-accusé

 

c.

 

SA MAJESTÉ LA REINE

 

INTIMÉE-poursuivante

 

Et

 

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU QUÉBEC

 

Mis en cause

 

 

 

DÉCISION SUR REQUÊTE EN IRRECEVABILITÉ

 

 

[1]                Le ministère public soutient que la présente requête en suspension de l'instance et en paiement d'honoraires est irrecevable à sa face même parce qu'elle ne respecte pas les règles suivantes. Le procureur général du Québec soutient que la requête ne respecte pas les conditions prévues à l'article 95 du Code de procédure civile du Québec, et cela tant à cause du préavis qui n'est pas respecté, qu'à cause de l'insuffisance des motifs au fond. On soutient que l'avis de présentation pour être conforme à l'article 95 du Code de procédure civile du Québec doit être d'au moins trente (30) jours avant la date de l'audition, et dans un deuxième temps, doit faire état de façon détaillée d'une part de la situation d'indigence de l'accusé, et de l'impossibilité de présenter une défense pleine et entière, et adéquate à moins d'être représenté par un avocat.

[2]                La défense est d'avis que la requête n'est tenue de respecter que les dispositions des articles 81 et suivants du Règlement de la Cour du Québec [1]. On ajoute que durant la preuve présentée lors de l'audition de la requête, seront prouvées tant la situation d'indigence du requérant que la nécessité absolue d'être représenté par avocat dans un dossier aussi sérieux.

[3]                Nous sommes, dans un premier temps, d'avis que doit être initialement solutionnée la question de la recevabilité de la requête et soutenons, en ce qui concerne les items regardant l'état d'indigence de l'accusé et l'impossibilité pour lui de se défendre autrement que par avocat, que cela fait partie du fond de la requête.

DISCUSSIONS

[4]                Les articles 95 et 95.1 du Code de procédure civile du Québec réclament un certain formalisme à respecter dans le cadre d'une requête opposable au procureur général du Québec [2].

[5]                Avec respect pour l'opinion contraire, nous sommes d'avis que l'article 95 du C.p.c. ne vise pas la situation actuelle. On n'y fait allusion qu'aux situations où est réclamée une ordonnance visant à "déclarer inapplicable constitutionnellement, invalide ou inopérante" une disposition législative, réglementaire ou un décret quelconque.

[6]                Quant au paragraphe 2 de l'article 95, (un tel avis est également exigé…) à notre avis, il n'est pas non plus applicable puisque la requête de Monsieur Thériault ne fait pas allusion à la violation de l'un de ses droits constitutionnels, mais constitue une mesure préventive visant à s'assurer qu'éventuellement son droit à un procès juste et équitable lui soit assuré [3].

[7]                D'autre part, le paragraphe 95.1 débute par les mots "en matière criminelle et pénale", et exclut la nécessité d'un tel avis dans les cas qui concernent "la divulgation d'une preuve, l'exclusion d'un élément de preuve ou la durée du délai écoulé depuis le moment de l'accusation". Dans leur ouvrage sur les "Procédures et Principes de base en matière de Charte" [4], les auteurs Me Yves Paradis et Benoit Lauzon sont d'avis que le nouvel article 95.1 du C.p.c. introduit l'exigence d'un avis préalable distinct de celui prévu aux articles 81 et suivants du Règlement de la Cour du Québec. Ils sont même d'avis que "…le juge du procès peut refuser d'entendre une requête en vertu de la Charte si aucun avis, ou un avis inadéquat a été envoyé à la partie expresse". Nous croyons cependant qu'il est sage d'éviter un rigorisme excessif qui pourrait faire perdre  au justiciable pour une question de forme un droit important; c'est-à-dire celui du droit à une défense pleine et entière [5].

[8]                Or la requête de nature Rowbotham est visée par l'article 95.1. Un avis de dix (10) jours doit donc habituellement être signifié au procureur général. Cependant comme le tribunal peut abréger ce délai, il nous semble équitable que l'audition sur la requête soit reportée au 20 août, afin de ne pas retarder inutilement le début du procès.

EN CONSÉQUENCE :

[9]                Le tribunal estime que la requête en irrecevabilité doit être rejetée.

[10]            Fixe au 20 août prochain l'audition sur cette requête.

 

 

 

__________________________________

JEAN-PAUL DECOSTE, J.C.Q.

 

Me Gilles Daudelin

Procureur du requérant-accusé

 

Me Alain Tanguay

Procureur de l'intimée et du mis en cause

 

 

Date d’audience :

Le 13 août 2007

 



[1]     81. Toute requête est faite par écrit, à moins qu'il n'en soit autrement décidé par le juge et énonce les faits invoqués à son soutien. Elle doit être faite sous serment.

82. Toute requête est signifiée à la partie adverse ou à son avocat lorsque prévu, avec un avis de présentation d'au moins trois jours, à moins qu'il n'en soit autrement décidé par le juge.

[2]     95. Sauf si le procureur général a reçu préalablement un avis conformément au présent article, une disposition d'une loi du Québec ou du Canada, d'un règlement adopté en vertu d'une telle loi, d'un décret, arrêté en conseil ou proclamation du lieutenant-gouverneur, du gouverneur général, du gouvernement du Québec ou du gouverneur général en conseil ne peut être déclarée inapplicable constitutionnellement, invalide ou inopérante, y compris en regard de la Charte canadienne des droits et libertés (Partie I de l'annexe B de la Loi sur le Canada, chapitre 11 du recueil des lois du Parlement du Royaume-Uni pour l'année 1982) ou de la Charte des droits et libertés de la personne ( chapitre C-12), par un tribunal du Québec.

      Un tel avis est également exigé lorsqu'une personne demande, à l'encontre de l'État ou de l'Administration publique, une réparation fondée sur la violation ou la négation de ses droits et libertés fondamentaux prévus par la Charte des droits et libertés de la personne ou par la Charte canadienne des droits et libertés.

      L'avis doit, de façon précise, énoncer la prétention et exposer les moyens sur lesquels elle est basée. Il est accompagné d'une copie des actes de procédure et est signifié par celui qui entend soulever la question au moins 30 jours avant la date de l'audition. Seul le procureur général peut renoncer à ce délai.

      Le tribunal ne peut statuer sur aucune demande sans que l'avis ait été valablement donné, et il ne peut se prononcer que sur les moyens qui y sont exposés.

      Les avis prévus au présent article sont également signifiés au procureur général du Canada lorsque la disposition concernée ressortit à la compétence fédérale; de même, ils sont signifiés au directeur des poursuites criminelles et pénales si la disposition concerne une matière criminelle ou pénale.

      1965 (1 re sess.), c. 80, a. 95; 1985, c. 29, a. 6; 2005, c. 34, a. 43.

95.1 En matière criminelle ou pénale, l'avis prévu au deuxième alinéa de l'article 95 n'est pas requis lorsque la réparation demandée concerne la divulgation d'une preuve, l'exclusion d'un élément de preuve ou la durée du délai écoulé depuis le moment de l'accusation, ou encore dans les cas déterminés par arrêté du ministre de la Justice publié à la Gazette officielle du Québec.

Dans les autres cas, cet avis doit être signifié au moins 10 jours avant la date de l'audition de la demande de réparation. À défaut, le tribunal en ordonne la signification et remet l'audition de cette demande, à moins que le procureur général ne renonce à ce délai ou que le tribunal ne l'abrège s'il le juge nécessaire pour éviter qu'un préjudice irréparable soit causé à celui qui fait la demande ou à un tiers.

2005, c. 34, a. 44

[3]     Québec (Procureur général) c. Beauchamps, (2003-06-19) QC C.A.

[4]     Collection de Droit 2007-2008, Droit Pénal, Procédure et Preuve.

[5]     Thibault c. Collège des Médecins, J.E. 98-581 C.A.Q.

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