À 9:32 minutes de la première période, une échauffourée survient entre les joueurs des deux équipes dans la zone Black Lake, à la droite du gardien de but. Tous les joueurs sur la glace y participent, y compris le demandeur et le défendeur, à l'exception des gardiens de buts.
Au cours d'une première phase d'hostilités, ponctuée d'accrochages, poussées, corps à corps et volées de coups dont il est difficile de dire s'ils portent au but, le défendeur se bat à coups de poing avec François Allaire, un joueur de l'équipe adverse, le renverse sur le dos et continue l'échange de coups dans cette position. Au cours de cette même phase, le demandeur est renversé sur le dos par un joueur de l'équipe adverse, sans échange de coups; il mentionne au tribunal avoir perdu mémoire des événements subséquents jusqu'à son arrivée à l'infirmerie de l'aréna, suite au coup de poing qui lui est, dans une deuxième phase, assené par le défendeur.
Cette première phase, qu'on ne saurait cependant qualifier de bagarre générale, mais au cours de laquelle chacun des joueurs cherche à imposer le respect, est toutefois d'une intensité suffisante pour que l'arbitre Roseberry expulse de la glace pour le reste de la partie l'ensemble ds joueurs impliqués dans l'échauffourée.
En début de la deuxième phase, alors que l'arbitre Roseberry distribue les punitions et intime l'ordre aux joueurs de quitter la glace, tout semble rentré dans l'ordre; les joueurs sont toutefois encore sur la patinoire, à l'exception du défendeur et de son co-équipier Yvon Marcoux qui viennent de prendre place au banc des punitions.
Quittant le banc pour se diriger vers la sortie de la patinoire, vu l'expulsion des joueurs prononcée par l'arbitre Yvon Marcoux invite d'un signe de la main un joueur de l'équipe de Black Lake, Pierrre Marcoux; un règlement de comptes semble vouloir s'amorcer. Le défendeur constate que Pierre Marcoux répond aux avances de Yvon Marcoux; il s'interpose, Pierre Marcoux le frappe au cou avec son bâton, pivote sur lui-même et lui fait face. Le défendeur empoigne a deux mains le bâton de Pierre Marcoux. Le frère du défendeur, Pierre Deblois, également défenseur dans la même équipe, contourne Pierre Marcoux par l'arrière, le frappe au dos avec son bâton et continue sa course pour s'arrêter à la droite avant du défendeur, à l'arrière d'un arbitre.
Le demandeur, situé à bonne distance à l'avant gauche du défendeur, a déjà commencé à patiner à vive allure en direction du groupe, après que Pierre Deblois s'y soit ajouté mais avant qu'il n'ait frappé Pierre Marcoux, vraisemblablement pour rejoindre Pierre Deblois dont la position change. Lorsqu'il arrivera près du groupe impliqué dans les hostilités, composé du défendeur et de Pierre Marcoux qui se font face, et dont le défendeur tient le bâton à deux mains, de deux arbitres placés de chaque côté du bâton, entre le défendeur et Pierre Marcoux, et de Pierre Deblois, ce dernier lui fait face, maix deux arbitres et le bâton tenu par le défendeur l'en séparent. Le demandeur porte alors ses gants et tient son bâton de la main gauche. Ce bâton, élevé en début de course, est rabaissé au fur et à mesure de celle-ci; lorsque le demandeur arrive près du groupe, son bâton est à peu près parallèle à la glace et placé à l'horizontale devant lui, la palette à sa droite, du côté du défendeur.
Alors que le demandeur arrive à pleine vitesse à hauteur du groupe, par la gauche-avant du défendeur, celui-ci lâche prise du bâton de Pierre Marcoux et assène un violent coup de poing au visage du demandeur. Ce dernier s'effondre sur la glace, pour se relever presqu'aussitôt. Cet incident met fin à la deuxième phase de l'échauffourée, les belligérants quittent la patinoire, le demandeur en direction de l'infirmerie.
Le défendeur explique son geste malheureux de la façon suivante: il n'a plus de casque protecteur, ni gants ni bâton, et entend un cri de son frère Pierre: «attention Yvan». Il aperçoit alors du coin de l'oeil, à environ cinq ou six pieds, un joueur qui arrive de sa gauche avant à grande vitesse et se dirige vers lui; il a peur et frappe pour se protéger.
Il mentionnera au tribunal qu'il a déjà eu la mâchoire cassée à deux reprises. Il mentionne également qu'il ne connaissait pas le demandeur, et qu'il ne savait pas sur quel joueur de l'équipe adverse il frappait.
Des témoins affirment que le défendeur se dirigeait vers Pierre Deblois. Par ailleurs, le demandeur se décrit comme un joueur qui ne se bat jamais et n'a jamais fait l'objet d'une punition majeure.
Le défendeur explique son geste malheureux de la façon suivante: il n'a plus de casque protecteur, ni gants ni bâton, et entend un cri de son frère Pierre: «attention Yvan». Il aperçoit alors du coin de l'oeil, à environ cinq ou six pieds, un joueur qui arrive de sa gauche avant à grande vitesse et se dirige vers lui; il a peur et frappe pour se protéger.
Il mentionnera au tribunal qu'il a déjà eu la mâchoire cassée à deux reprises. Il mentionne également qu'il ne connaissait pas le demandeur, et qu'il ne savait pas sur quel joueur de l'équipe adverse il frappait.
Des témoins affirment que le défendeur se dirigeait vers Pierre Deblois. Par ailleurs, le demandeur se décrit comme un joueur qui ne se bat jamais et n'a jamais fait l'objet d'une punition majeure.
Il faut comprendre que si le demandeur se dirigeait vers Pierre Deblois, ce dernier se dirigeait également vers le défendeur; de fait, il se trouvait à sa droite avant lorsque le coup de poing a été donné. À l'instant qui précède, le défendeur est occupé à retenir le bâton de Pierre Marcoux; qu'il n'ait aperçu le demandeur qu'au moment de son arrivée dans la mêlée ou une fraction de seconde avant est fort plausible, et le tribunal n'est pas justifié de mettre son témoignage en doute.
En l'espèce, que le demandeur se dirige vers Pierre Deblois ou une autre personne n'est pas pertinent, dans la mesure où le défendeur peut raisonnablement croire qu'une attaque est dirigée contre lui. Qu'il ait cru que le demandeur se dirigeait vers lui est fort plausible: sa faculté de juger est alors réduite, le demandeur patine à grande vitesse, la palette de son hockey dans sa direction, et il surgit de sa gauche avant.
Par ailleurs, que le demandeur soit ou non un joueur paisible ne change rien en l'espèce: le défendeur ne le connaît pas.
Le demandeur n'a rien à voir dans les hostilités qui ont repris: deux arbitres sont déjà sur place pour y mettre un terme et il a déjà été intimé à l'ensemble des joueurs de quitter la patinoire. De plus, malgré sa connaissance du danger qu'engendrent les hostilités, il prend malgré tout le risque de s'en mêler. Enfin, en arrivant en trombe comme il le fait, il aggrave ce danger.
Le défendeur ne dispose alors d'aucune protection et, selon la prépondérance de la preuve, peut raisonnablement dans les circonstances craindre une attaque imminente de nature à le blesser; il peut dès lors opposer la force nécessaire, sans attendre d'être frappé en premier.
Le geste du défendeur constitue, de l'avis du tribunal, un geste spontané et instinctif, et une riposte non disproportionnée à une agression appréhendée, compte tenu notamment de la vitesse à laquelle surgit le demandeur.
Le coup de poing est violent et, malheureusement, destructeur. En l'espèce, l'on ne saurait reprocher au défendeur d'avoir eu recours à ce moyen de défense plutôt qu'à un autre. L'intensité du coup porté et l'endroit où il marque se justifient par la vitesse à laquelle fonce le demandeur, l'intensité du moment et la réduction de faculté de juger du défendeur.
[...] l'on ne saurait reprocher au défendeur d'avoir eu recours à ce moyen de défense plutôt qu'à un autre. L'intensité du coup porté et l'endroit où il marque se justifie par la vitesse à laquelle fonce le demandeur, l'intensité du moment et la réduction de faculté de juger du défendeur.
Au cours d'une première phase d'hostilités, ponctuée d'accrochages, poussées, corps à corps et volées de coups dont il est difficile de dire s'ils portent au but, le défendeur se bat à coups de poing avec François Allaire, un joueur de l'équipe adverse, le renverse sur le dos et continue l'échange de coups dans cette position. Au cours de cette même phase, le demandeur est renversé sur le dos par un joueur de l'équipe adverse, sans échange de coups; [...]
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Cette première phase, qu'on ne saurait cependant qualifier de bagarre générale, mais au cours de laquelle chacun des joueurs cherche à imposer le respect, est toutefois d'une intensité suffisante pour que l'arbitre Roseberry expulse de la glace pour le reste de la partie l'ensemble des joueurs impliqués dans l'échauffourée.
733. La force probante de la preuve par présentation d'un élément matériel est définie en ces termes par l'article 2856 C.c.Q: «[1] Le tribunal peut tirer de la présentation d'un élément matériel toute conclusion qu'il estime raisonnable.» De cet article, il résulte que le tribunal peut se fonder sur sa propre perception de l'élément matériel pour conclure à l'existence d'un fait matériel et, le cas échéant, d'un acte juridique. Cela veut dire, notamment, que dans le cas d'une visite sur les lieux, le tribunal pourra se fonder sur ses propres constatations non seulement pour l'appréciation des témoignages qu'il aura entendus, mais également pour en arriver directement à ses propres conclusions.
L'article
Il nous semble donc évident que le juge de première instance tire ses conclusions sur l'ensemble de la preuve et donc des témoignages explicatifs du vidéo. Est-ce que cette Honorable Cour aura la même possibilité?
734. Restera la question de savoir dans quelle mesure les tribunaux d'appel pourront se fonder sur leur propre perception du même élément matériel pour en arriver à des conclusions différentes de celles du tribunal de première instance. Cette question est subordonnée à la question de savoir comment et de quelle manière les éléments matériels qui ont fait l'objet d'une présentation en première instance vont faire partie du dossier en appel. À ce sujet, il y a lieu notamment de se demander si une Cour d'appel va pouvoir également faire une descente sur les lieux afin de vérifier par elle-même les constatations (sic) que le tribunal de première instance y a faites.
La Co ur d'appel a souvent et clairement établi que:
En principe, la Cour d'appel n'interviendra pas dans l'appréciation des faits du juge de première instance à moins que ce dernier n'ait commis une erreur manifeste. Dans son manuel de la Cour d'appel, le juge Rivard écrit:
Excepté dans les cas d'erreur manifeste, la Cour d'appel incline pour avérés, les faits constatés par les premiers juges.
111. L'accession progressive et quelque peu hésitante de l'acceptation des risques au rang de norme juridique rend toute définition de l'expression difficile. Une approche très générale en a été fournie par certains auteurs. Cette théorie «trouve son application lorsque la victime a librement et consciemment, en pleine connaissance de cause, consenti à un risque ou danger, dont elle pouvait parfaitement bien apprécier la nature ou l'étendue et en a ainsi tacitement accepté d'avance les suites, écrit monsieur Nadeau».
[...]
112. En somme, l'application de la théorie suppose la réunion de trois conditions préalables: l'existence d'un danger ou d'un risque réel, la connaissance de ce danger par la victime et la manifestation par celle-ci de son acceptation du risque.
Chacun de ces éléments nécessite quelques précisions. D'abord, l'éventualité du risque ne doit pas être purement hypothétique. Ses chances de réalisation doivent être assez fortes. [...]
De plus, le risque doit avoir été connu de la victime, avant qu'elle ne s'engage dans l'activité susceptible de provoquer son déclenchement. [...]
Enfin, l'acceptation des risques doit se déduire du comportement de la victime. On doit pouvoir déceler dans ses agissements une manifestation d'intention sans équivoque. Cette dernière condition découle de la seconde. La connaissance du risque, suivie de l'exposition au danger, témoigne de son acceptation par la victime. [...]
Le jeu de hockey est un jeu rude et vigoureux; sa pratique est licite et est autorisée par les pouvoirs publics; d'où il suit que les joueurs acceptent les risques inhérents à ce sport qu'ils savent violent et dangereux; d'où il suit aussi que tout ce qui se produit au cours d'une partie engagée n'est pas délictueux si les règles du jeu ont été suivies et respectées, et quand les coups sont donnés accidentellement, il n'y a aucun doute que ceux qui les reçoivent n'ont aucun recours devant les tribunaux.
D'autant plus que le jeu de hockey, qui est un jeu rude et dangereux, est cependant un jeu magnifique et sain, tendant à développer le courage, la force musculaire et l'agilité, il est à noter cependant que ce jeu est en train de dégénérer en tuerie sous l'oeil complaisant des officiers des ligues, des propriétaires de clubs et des arbitres dont un des buts principaux, sinon le seul, est de faire des bénéfices, et qui en conséquence cultivent le goût des foules pour la brutalité. [...]
Alors que le demandeur arrive à pleine vitesse à hauteur du groupe, par la gauche-avant du défendeur, celui-ci lâche prise du bâton de Grondin* et assène un violent coup de poing au visage du demandeur. [...]
.* Il s'agit plutôt de Marcoux
En l'espèce, que le demandeur se dirige vers Pierre Deblois ou une autre personne n'est pas pertinent, dans la mesure où le défendeur peut raisonnablement croire qu'une attaque est dirigée contre lui. Qu'il ait cru que le demandeur se dirigeait vers lui est fort plausible: sa faculté de juger est alors réduite, le demandeur patine à grande vitesse, la palette de son hockey dans sa direction, et il surgit de sa gauche avant.
Par ailleurs, que le demandeur soit ou non un joueur paisible ne change rien en l'espèce: le défendeur ne le connaît pas.
Le demandeur n'a rien à voir dans les hostilités qui ont repris: deux arbitres sont déjà sur place pour y mettre un terme et il a déjà été intimé à l'ensemble des joueurs de quitter la patinoire. De pus, malgré sa connaissance du danger qu'engendrent les hostilités, il prend malgré tout le risque de s'en mêler. Enfin, en arrivant en trombe comme il le fait, il aggrave ce danger.
Le défendeur ne dispose alors d'aucune protection et, selon la prépondérance de la preuve, peut raisonnablement dans les circonstances craindre une attaque imminente de nature à le blesser; il peut dès lors opposer la force nécessaire, sans attendre d'être frappé en premier.
Le geste du défendeur constitue, de l'avis du tribunal, un geste spontané et instinctif, et une riposte non disproportionnée à une agression appréhendée, compte tenu notamment de la vitesse à laquelle surgit le demandeur.
Le coup de poing est violent et, malheureusement, destructeur. En l'espèce, l'on ne saurait reprocher au défendeur d'avoir eu recours à ce moyen de défense plutôt qu'à un autre. L'intensité du coup porté et l'endroit où il marque se justifient par la vitesse à laquelle fonce le demandeur, l'intensité du moment et la réduction de faculté de juger du défendeur.
[...]
Quant au coup de poing assené au visage de M. Myles par M. Hérard, le Tribunal croit qu'il s'agit effectivement d'un cas de légitime défense et que la force du coup de poing était difficilement contrôlable puisque, comme l'a indiqué M. Hérard, il s'agissait d'une manoeuvre in extremis et d'un réflexe naturel.
Le Tribunal croit en effet qu'il était naturel et normal pour M. Hérard, après avoir évité de justesse le poing de M. Myles, de riposter de la même manière, en état de légitime défense. Il ne s'agit donc pas ici d'un cas où le Tribunal doit décider si la force nécessaire à l'arrestation d'un individu était déraisonnable. M. Hérard n'a eu ni le temps ni la possibilité de mesurer la force de son coup de poing, étant en légitime défense et l'ayant fait par réflexe. On ne peut donc reprocher à M. Hérard la force de son coup de poing, ni d'avoir agi comme il l'a fait. Il n'avait pas à attendre d'être la cible d'un deuxième coup de poing avant de se défendre. En agissant comme il l'a fait, le demandeur a été l'artisan de son propre malheur. Les blessures qui lui ont été causées à la mâchoire ont été certes sérieuses, et il a enduré plusieurs inconvénients et souffrances, mais le défendeur Hérard ne peut en être tenu responsable.
AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans
appel; la consultation
du plumitif s'avère une précaution utile.