Décision

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Gagné-Arel c. Société de transport de Montréal

2013 QCCQ 1479

COUR DU QUÉBEC

« Division des petites créances »

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

MONTRÉAL

LOCALITÉ DE

MONTRÉAL

« Chambre civile »

N° :

500-32-125268-104

 

 

 

DATE :

18 février 2013

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SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

SUZANNE HANDMAN, J.C.Q.

 

 

 

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ALINE GAGNÉ-AREL

[…], Longueuil (Québec)  […]

 

Demanderesse

c.

 

SOCIÉTÉ DE TRANSPORT DE MONTRÉAL

800, de la Gauchetière ouest, #1170, Montréal (Québec)  H5A 1J6

 

Défenderesse

 

 

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JUGEMENT

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[1]           Aline Gagné-Arel réclame 7 000 $ à la Société de transport de Montréal (« STM »), alléguant qu’elle a subi des dommages corporels à l’épaule gauche lorsqu’elle a été projetée à l’extérieur du Métro Monk, par le déplacement d’air. La STM nie toute responsabilité.

Les faits :

[2]           Le 1er octobre 2007, au moment de franchir la porte « papillon », à la sortie du métro Monk, Mme Gagné-Arel allègue qu’elle a été projetée, par le déplacement d’air, dans l’autobus stationné devant la sortie. Elle affirme que le conducteur n’était pas dans l’autobus, à ce moment pour lui porter secours. Elle ressentait une vive douleur à l’épaule gauche.

[3]           Mme Gagné-Arel, qui au moment de l’accident avait 77 ans, a choisi de rester dans l’autobus pour se rendre chez sa sœur quelques arrêts plus loin; par la suite, une ambulance a été appelée qui l’a amenée à l’hôpital de Verdun. Selon le dossier de l’hôpital, Mme Gagné-Arel souffre d’un traumatisme de l’épaule gauche avec atteinte à la mobilité. Les rayons-X ont démontré la possibilité d’une déchirure chronique complète de la « coiffe des rotateurs ».

[4]           Suite à l’accident, Mme Gagné-Arel a eu besoin d’aide à la maison. Elle doit mettre de la glace sur son épaule lorsqu’elle se couche et elle se plaint que son épaule est douloureuse et qu’elle est toujours incapable de lever son bras gauche. Elle invoque la dangerosité des portes de métro.

[5]           La STM, suite à une enquête, a soumis qu’il n’y a eu aucun rapport d’incident le 1er octobre 2007 ni aucune dépêche relativement aux portes en question.

[6]           M. Luc Milette, un ingénieur à la STM, explique que lorsqu’un train passe dans le métro, il crée une pression positive en avant et une pression négative en arrière. Le déplacement d’air, dans les stations de métros, se propage jusqu’aux portes de sortie et est causé par le va-et-vient des trains, dans les tunnels. Bien que les portes, à la station Monk, soient de type « papillon » et « neutres face à la pression », si la porte est ouverte, l’air va sortir quand le train approche et rentrer lorsque le train part. Ce phénomène est connu comme sous le nom « d’effet piston ».

[7]           M. Milette soutient que la STM a pris tous les moyens pour rendre les lieux plus sécuritaires. Elle tente d’atténuer l’effet piston par l’installation, dans toutes les stations, de puits de ventilation naturelle, ce qui permet de diminuer le déplacement d’air, dans les métros. Selon M. Milette, l’effet piston n’est pas une anomalie mais un phénomène courant.

 

Analyse:

[8]           Le coup de vent qui a projeté Mme Gagné-Arel, à l’extérieur du métro, résulte de ce qu’il est convenu d’appeler selon M. Millette, ingénieur à la STM, l’effet piston.

[9]           Dans l’affaire Thérèse Morais-Benoît c. La société de transport de la communauté urbaine de Montréal[1], le juge Pierre Boudreault a cité un passage de l’interrogatoire hors cour de M. Thibault où on lui demande d’expliquer l’effet piston :

« Q. …Pouvez-vous m’expliquer qu’est-ce que c’est l’effet piston?

R. Quand un train se déplace à l’intérieur d’un tunnel, c’est un peu la même chose qu’une balle qui se déplacerait dans le canon d’un fusil ou d’un piston dans un cylindre. Pourquoi on fait l’analogie? Justement on parle d’effet piston, c’est que d’un côté du piston, on va pousser de l’air alors que de l’autre côté, on va tirer de l’air. Alors le train, il se produit la même chose dans le tunnel, c’est-à-dire que le train pour se déplacer d’une station à l’autre, il va pousser l’air…en avançant, il va pousser vers l’autre station. Derrière le train, l’air qui est poussé va être remplacé par d’autre air qui va entrer entre autres par la station ou par l’autre bout du tunnel. Alors c’est ça qui est l’effet piston, le déplacement d’air causé par le déplacement des trains en tunnel… »

 

[10]        Or, Mme Gagné-Arel n’a pas démontré que l’accident dont elle a été victime résulte d’un défaut d’aménagement des portes. D’ailleurs, les portes n’ont fait l’objet d’aucune réparation suite à l’accident et aucun défaut technique n’a été démontré. De plus, selon la preuve de la STM, l’effet piston, qui a causé la projection de Mme Gagné-Arel, est un phénomène courant, résultant du déplacement d’air dans les stations de métro, causé par l’évolution des trains.

[11]        La preuve soumise ne permet pas au Tribunal de conclure que la STM a commis une faute ayant causé l’accident dont Mme Gagné-Arel a été victime. C’est ainsi que le Tribunal, bien qu’ayant de la sympathie pour la situation dans laquelle se retrouve Mme Gagné-Arel, ne peut lui donner gain de cause.

[12]        À titre d’obiter dictum, il est reconnu que les portes dans les stations de métro sont lourdes et difficiles à ouvrir et que l’effet piston, ci-haut décrit, ajoute aux  problèmes posés par le transport par métro pour un grand nombre d’usagers et surtout pour la population âgée. 

[13]        La STM a un devoir de diligence raisonnable afin d’assurer à ses usagers un accès sécuritaire au métro. Il apparaît, à la soussignée, qu’un plus grand effort devrait être déployé pour diminuer les risques d’accident et pour rendre le transport par métro plus facile non seulement pour les personnes âgées et les infirmes, mais également pour la population en général. 

 

 

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

 

REJETTE la requête introductive d’action, sans frais.

 

 

 

 

 

 

 

 

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SUZANNE HANDMAN, J.C.Q.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Date d’audience :

29 janvier 2013

 



[1] 500-05-008341-933, 24 janvier 1997, (C.S.).

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