Décision

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Gatti c. Barbosa Rodrigues

2011 QCCS 6734

COUR SUPÉRIEURE

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

MONTRÉAL

 

N° :

500-17-052555-094

 

 

 

DATE :

16 décembre 2011

______________________________________________________________________

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE :

L’HONORABLE

CLAUDINE ROY, J.C.S.

______________________________________________________________________

 

 

 

IDA D. GATTI

FABRIZIO GATTI

ERIKA A. RIVERA, en sa qualité de tutrice de Sofia Gatti

Demandeurs

 

c.

 

 

AMANDA CARINE BARBOSA RODRIGUES

Défenderesse

______________________________________________________________________

 

 

JUGEMENT

 

______________________________________________________________________

 


 

TABLE DES MATIÈRES

1.            le RECOURS. 3

2.            les faits. 6

2.1        Les années 1972-2005. 6

2.2        Les années 2005-2006. 6

2.3        L'année 2007. 8

2.4        L'année 2008. 10

2.5        L'année 2009. 12

2.6        Après 2009. 17

3.            les questions en litige. 17

4.            la crédibilité des témoins et le fardeau de preuve. 17

4.1        La crédibilité des témoins. 17

4.2        Le fardeau de preuve. 21

5.            les objections. 22

5.1        Le ouï-dire. 22

5.2        La règle de la meilleure preuve. 25

5.3        L'admissibilité de la preuve testimoniale. 25

6.            la captation.. 26

6.1        Les principes généraux. 26

6.2        La prise de contrôle et la manipulation. 28

6.3        L'isolement 33

6.4        Le dénigrement des proches. 34

6.5        La séparation du couple. 35

6.6        La signature du Testament de 2009. 36

6.7        La conclusion sur la captation. 39

7.            l'indignité. 41

7.1        L'intérêt et la prescription. 41

7.2        Les principes généraux. 42

7.3        Les motifs invoqués. 45

7.4        Le pardon. 46

7.5        La conclusion sur l'indignité. 47

8.            la reconstitution du testament de 2007. 47

9.            la reconstitution de l'acte de fiducie. 49

10.           les conclusions. 50

ANNEXE     52

 


1.         le RECOURS

[1]           M. Arturo Gatti (« M. Gatti ») décède au Brésil le 11 juillet 2009[1].

[2]           Le règlement de sa succession oppose :

·                    d'un côté,

§  sa mère, Mme Ida Gatti (« Mme Gatti »),

§  un de ses frères, M. Fabrizio Gatti,

§  et sa fille Sofia Gatti (« Sofia », représentée par sa mère et tutrice Mme Erika Rivera (« Mme Rivera »))

(collectivement les « Demandeurs »);

·                    et de l'autre :

§  sa conjointe, Mme Amanda Barbosa Rodrigues (« Mme Rodrigues » ou la « Défenderesse »).

L'annulation du Testament de 2009

[3]           Les Demandeurs veulent faire annuler le dernier testament de M. Gatti (le « Testament de 2009 »[2]) pour cause de captation. M. Gatti y désigne Mme Rodrigues comme légataire universelle.

[4]           Les Demandeurs allèguent captation au motif que Mme Rodrigues[3] :

·                    aurait manipulé et pris le contrôle de M. Gatti;

·                    l'aurait isolé de sa famille;

·                    aurait dénigré et calomnié ses proches, tant avant qu'après son décès.

[5]           Ils allèguent également que le Testament de 2009 :

·                    n'a été signé que quelques semaines avant la mort de M. Gatti, alors que les parties sont séparées depuis six mois, que M. Gatti réside chez sa mère et qu'il a consulté une avocate afin d'entamer des procédures de divorce;

·                    ne représente pas les dernières volontés de M. Gatti;

·                    a été signé en raison de pressions constantes et de l'influence indue exercées par Mme Rodrigues sur son époux;

·                    contient certaines informations erronées.

L'indignité

[6]           Les Demandeurs veulent également faire déclarer Mme Rodrigues indigne de succéder.

[7]           Ils allèguent que Mme Rodrigues est indigne de succéder au motif que[4] :

·                    elle a eu un comportement hautement répréhensible en prenant le contrôle de son conjoint et en l'isolant de sa famille;

·                    elle serait en possession d'un testament antérieur (le « Testament de 2007 »[5]) et refuserait de le leur faire parvenir;

·                    elle aurait « gêné le testateur, feu Arturo Gatti, dans la révocation du testament [Testament de 2007] :

§  a. En exerçant des menaces sur le testateur, particulièrement à l'effet qu'il pourrait ne plus jamais voir son fils, Arturo Gatti Junior, dû au fait qu'elle apporterait ce dernier avec elle au Brésil;

§  b. En exerçant des pressions auprès de feu Arturo Gatti et ce, avant ainsi que pendant la confection du testament [Testament de 2009]. »

La reconstitution du Testament de 2007 et de l'acte de fiducie

[8]           Selon les Demandeurs, c'est le Testament de 2007 qui représente les dernières volontés du défunt.

[9]           Dans ce testament M. Gatti lègue certains biens à son frère Fabrizio et à sa mère et lègue le résidu de la succession à la fiducie Arturo Gatti Irrevocable Trust I. Les biens de cette fiducie doivent être partagés entre Sofia et Mme Gatti à la mort de M. Gatti.

[10]        Comme les Demandeurs n'ont pu retrouver ni l'original du Testament de 2007 ni l'original de l'acte de fiducie, ils demandent au Tribunal de les reconstituer et de déclarer que les copies de ces documents valent comme s'il s'agissait d'originaux.

La position de Mme Rodrigues

[11]        Mme Rodrigues considère que toutes ces demandes sont mal fondées.

Les circonstances entourant le décès de M. Gatti

[12]        L'implication de Mme Rodrigues dans le décès de M. Gatti aurait eu un impact décisif sur le sort du litige.

[13]        Bien qu'à l'origine les Demandeurs aient réservé leur droit de soulever cette question dans la procédure introductive d'instance, ils ont finalement décidé, implicitement et explicitement, de ne pas l'invoquer. Cette question a été discutée dans des jugements antérieurs[6].

[14]        Néanmoins, il ressort assez clairement du procès que les Demandeurs et plusieurs des témoins de la demande sont convaincus que Mme Rodrigues est impliquée, d'une manière ou d'une autre, dans le décès de M. Gatti et cette conviction imprègne leur perception des faits.

[15]        Vu l'absence de toute preuve sur cette question, le Tribunal ne peut pas examiner la preuve à travers ce prisme.

[16]        Le Tribunal doit appuyer sa décision sur des faits prouvés et non sur des inférences tirées par les témoins à partir de faits non prouvés.

La conclusion du Tribunal

[17]        Pour les motifs qui suivent, le Tribunal donne raison à Mme Rodrigues.

[18]        Il n'y a pas de preuve de captation et, par conséquent, le Tribunal refuse d'annuler le Testament de 2009.

[19]        Il n'y a pas de preuve d'indignité.

[20]        Il n'y a pas lieu de reconstituer le Testament de 2007 ni l'acte de fiducie Arturo Gatti Irrevocable Trust I.

2.         les faits[7]

2.1       les années 1972-2005

[21]        M. Gatti naît le 15 avril 1972. Il est le fils d'Ida et de feu Giovanni Gatti.

[22]        Il a cinq frères et sœurs : Anna-Maria, Pina, Joe, Mirella et Fabrizio. Seul M. Fabrizio Gatti témoigne au procès.

[23]        M. Gatti quitte l'école alors qu'il n'est qu'adolescent. Ses amis d'enfance, Messieurs Rizzo et Santos et Mesdames Minero témoignent à l'audition.

[24]        Après le décès de son père, M. Gatti part vivre aux États-Unis et entreprend une carrière de boxeur professionnel, carrière qui le mène jusqu'au titre de champion mondial[8]. Il prendra sa retraite de la boxe professionnelle en juillet 2007.

[25]        Tout au long du procès, les amis et la famille de M. Gatti nient que ce dernier ait eu quelque problème que ce soit avec l'alcool ou la drogue. Pourtant, en 1997 et 1999, M. Gatti plaide coupable à deux accusations de conduite avec facultés affaiblies[9]. En 2001, un ami, M. Tom Casino, tente en vain de l'aider à régler cette problématique.

2.2       les années 2005-2006

[26]        En 2005, M. Gatti et M. Rizzo deviennent coactionnaires d'une compagnie de construction, le Groupe Gatti-Rizzo inc.

[27]        Au printemps 2005, M. Gatti entreprend une brève et houleuse relation amoureuse avec Mme Rivera, au New Jersey. Mme Rivera devient enceinte quelques semaines après avoir rencontré M. Gatti.

[28]        Sofia naît de cette union en mars 2006[10].

[29]        Des poursuites judiciaires acrimonieuses suivent concernant les obligations de M. Gatti envers la mère et l'enfant[11].

[30]        M. Fabrizio Gatti et des amis du défunt (Messieurs Rizzo et Santos et Mesdames Minero) présentent M. Gatti comme un être équilibré, patient, voire sans défaut. Le portrait qu'en dresse Mme Rivera, dans ses procédures judiciaires et déclarations sous serment, est tout autre[12] :

·                    M. Gatti lui est infidèle;

·                    il consomme des médicaments contre la douleur et d'autres pour dormir sur une base quotidienne;

·                    le couple consomme de l'alcool de manière excessive;

·                    M. Gatti peut boire jusqu'à l'intoxication;

·                    Mme Rivera constate la présence de marijuana dans la cafetière de M. Gatti;

·                    elle a entendu parler qu'il consomme également de la cocaïne et de l'ecstasy sans l'avoir personnellement constaté;

·                    elle a vu M. Gatti halluciner;

·                    M. Gatti lui a fait part d'une tentative de suicide provoquée par une surconsommation de médicaments et de drogues (la consommation excessive de médicaments et l'hospitalisation sont admises par M. Gatti dans sa défense aux procédures intentées par Mme Rivera).

[31]        En juin et en novembre 2006, M. Levine, avocat au New Jersey, rencontre M. Gatti pour discuter de planification successorale[13].

[32]        Quelques mois après la naissance de Sofia, M. Gatti amorce une relation amoureuse avec Mme Rodrigues. M. Gatti est alors âgé de 34 ans, Mme Rodrigues, de 20 ans. M. Gatti a déjà amassé une fortune personnelle grâce à sa carrière de boxeur. Mme Rodrigues est étudiante et danseuse dans un club[14].

[33]        Les droits d'accès de M. Gatti auprès de Sofia sont supervisés[15]. Mme Rivera ne veut pas qu'il soit seul avec l'enfant en raison de sa consommation d'alcool et de médicaments. Mme Rodrigues offre de superviser les visites avec Sofia, mais Mme Rivera refuse.

2.3       l'année 2007

2.3.1    Janvier à juillet 2007

[34]        En mars, Mme Rodrigues rencontre certains amis et membres de la famille de M. Gatti.

[35]        Le 26 avril, M. Gatti assure la sécurité financière de Sofia grâce à la signature d'un testament et de deux actes de fiducie (Arturo Gatti Irrevocable Trust I et Arturo Gatti Irrevocable Trust for the Benefit of Sophia B. Gatti)[16], préparés par M. Levine.

[36]        Le testament et l'acte de fiducie Arturo Gatti Irrevocable Trust I sont les deux documents dont les Demandeurs recherchent la reconstitution.

[37]        Quelques jours plus tard, M. Gatti et Mme Rodrigues se fiancent.

[38]        En juillet, Mme Rodrigues assiste au dernier combat professionnel de M. Gatti.

2.3.2    Août 2007

[39]        Mme Rodrigues et M. Gatti se marient à Las Vegas, le 26 août, sans avoir averti famille ou amis au préalable[17].

[40]        Quelques jours plus tôt, les conjoints concluent un contrat de mariage au New Jersey. C'est l'avocat John Lynch (frère de l'entraîneur de M. Gatti, M. Patrick Lynch[18]) qui rédige le contrat.

[41]        Dans ce contrat, Mme Rodrigues renonce à toute réclamation, de quelque type que ce soit, eu égard aux actifs de M. Gatti, qu'ils soient acquis avant ou après le mariage. Elle renonce même à réclamer une pension alimentaire en cas de cessation de vie commune. Elle devient néanmoins responsable des dettes communes du mariage[19].

2.3.3    Septembre et octobre 2007

[42]        À l'automne, M. Gatti participe à quelques rencontres des Alcooliques Anonymes avec son ami M. Casino et Mme Rodrigues.

[43]        M. Gatti aime beaucoup sa fille Sofia, mais n'accepte pas que les visites soient supervisées. Il ne respectera jamais l'horaire convenu dans l'ordonnance de sauvegarde du tribunal du New Jersey. Il voit Sofia sporadiquement, toujours en présence d'un tiers, jusqu'en octobre. Par la suite, il prend des nouvelles par téléphone, sans plus. Sofia n'est alors âgée que de 18 mois.

[44]        En octobre, Mme Rivera et M. Gatti signent une entente de règlement au bénéfice de Sofia, entérinée par un tribunal du New Jersey[20]. L'entente prévoit :

·                    la constitution de la fiducie Arturo Gatti Irrevocable Trust for the Benefit of Sophia B. Gatti[21];

·                    une pension alimentaire de 4 654 $ US par mois[22];

·                    un cautionnement d'un million de dollars pour garantir le paiement de la pension alimentaire[23];

·                    le remboursement de :

§  75 % des frais particuliers (camp d'été, activités parascolaires);

§  80 % des frais de scolarité;

§  75 % des frais de garde, jusqu'à concurrence de 500 $ US par mois;

§  75 % des frais médicaux, dentaires et d'optométrie non couverts par l'assurance;

·                    une assurance médicale;

·                    un fonds d'études de 100 000 $ US.

[45]        Malgré le consentement à jugement, les parties reviennent en cour à quelques reprises par la suite[24].

2.3.4    Novembre et décembre 2007

[46]        Fin novembre ou début décembre, Mme Rodrigues trouve son mari quasi inconscient sur le sol de la résidence familiale.

[47]        Elle l'emmène à The Watershed Addiction Treatment Programs en Floride du 4 au 13 décembre[25]. M. Gatti demande à sa sœur Anna-Maria de venir le chercher avant la fin du programme.

[48]        Certains membres de la famille Gatti viennent passer Noël au New Jersey, invités par Mme Rodrigues.

2.4       l'année 2008

2.4.1    Janvier à avril 2008

[49]        Le couple part en voyage de noces à Hawaï fin décembre - début janvier[26].

[50]        Mme Rodrigues relate qu'elle a toujours eu des différends avec M. Gatti mais qu'au début, de manière générale, le couple s'entendait bien. Cependant, force est de constater que déjà en janvier 2008, un incident se produit à Maui. Les policiers doivent intervenir à la suite d'une scène de jalousie entre les époux ivres.

[51]        Mme Rodrigues possède un passeport brésilien et ne peut plus résider aux États-Unis. Quant à M. Gatti, son visa d'athlète n'est plus valide depuis qu'il a pris sa retraite. Mme Rodrigues et M. Gatti doivent donc quitter le New Jersey.

[52]        Le couple part pour le Brésil. Mme Rodrigues y demeure pendant deux ou trois mois alors que M. Gatti fait des allers-retours entre le New Jersey, Montréal et le Brésil. M. Gatti consomme peu d'alcool lorsqu'il est au Brésil et y fréquente une église[27]. La relation de couple semble bien aller.

2.4.2    Mai à décembre 2008

[53]        M. Gatti et Mme Rodrigues s'installent à Montréal en mai. Ils veulent régulariser le statut de Mme Rodrigues au Canada et espèrent pouvoir un jour retourner vivre aux États-Unis, soit en permanence, soit en alternance entre Montréal et les États-Unis. M. Gatti est propriétaire d'un terrain en Floride. Il n'aime pas passer l'hiver au froid en raison de douleurs articulaires.

[54]        Après un séjour de quelques semaines chez Mme Gatti, ils emménagent sur la rue Jarry, dans un condominium appartenant au Groupe Gatti-Rizzo inc.

[55]        M. Gatti présente sa conjointe à ses amis. Au début, tout va bien. Mais la situation ne tarde pas à se détériorer.

[56]        En août, Mme Rodrigues consulte un avocat en droit matrimonial. La preuve ne révèle pas le contenu de cette consultation protégée par le secret professionnel[28].

[57]        Arturo Jr, l'enfant du couple, naît le 9 septembre. Mme Gatti assiste à l'accouchement. M. Gatti est très fier d'avoir un fils. Il est attentif à ses besoins.

[58]        Cela ne l'empêche pas de continuer à faire la fête dans les restaurants, bars et clubs de danseuses plusieurs fois par semaine jusqu'aux petites heures du matin. Ces sorties provoquent une discorde certaine dans le couple.

[59]        Le couple peut passer de bons moments ensemble, mais ces moments sont entrecoupés de périodes plus difficiles.

[60]        Par exemple, à l'automne, lors d'un repas au restaurant, Mme Rodrigues prétend que Sofia présenterait les traits d'une enfant trisomique. Ces propos choquent M. Gatti et la soirée se termine prématurément. Mme Rodrigues nie avoir tenu de tels propos.

[61]        À l'automne également, Mesdames Minero racontent qu'un soir Mme Rodrigues aurait parlé des membres de la famille Gatti disant qu'ils n'en voulaient qu'à l'argent de M. Gatti et que :

·                    son frère Joe est un perdant, qu'il a des problèmes financiers et qu'il est jaloux des succès de M. Gatti;

·                    sa sœur Anna-Maria a marié M. Dave Hilton qui a agressé sexuellement ses filles;

·                    sa sœur Pina est en dépression;

·                    son frère Fabrizio est également un perdant et qu'il est paresseux;

·                    son père feu Giovanni était un alcoolique, violent avec sa famille.

[62]        Pour Mme Rodrigues, il ne s'agit pas de dénigrer la famille, mais simplement de dresser le portrait de la situation. Ces propos mettent les sœurs Minero mal à l'aise. Elles estiment que Mme Rodrigues devrait plutôt essayer de trouver des points positifs à la famille.

[63]        Puis, vers 23 h 00, Mme Rodrigues devient furieuse à la lecture d'un message texte (la preuve ne révèle pas le contenu du message) et, sous le coup de la colère, aurait menacé de tuer M. Gatti. Les sœurs Minero ne croient pas qu'il s'agit d'une menace sérieuse, mais plutôt de propos prononcés sous le coup de la colère.

[64]        Le 6 décembre, Mme Rodrigues dépose une plainte pour violence conjugale. M. Gatti passe la nuit en prison.

[65]        Quelques jours plus tard, Mme Rodrigues, M. Gatti et Arturo Jr rejoignent Mme Gatti et son conjoint à Cuba. Mme Rodrigues a organisé ce voyage. C'est la première fois que M. Gatti part en vacances avec sa mère. Le voyage se déroule bien[29].

[66]        Ce modèle de disputes et réconciliations à quelques jours, ou même quelques heures d'intervalle se poursuit jusqu'au décès de M. Gatti.

[67]        Mme Gatti et son conjoint reviennent à Montréal le 14 décembre alors que M. Gatti, Mme Rodrigues et Arturo Jr continuent leur voyage aux Bahamas[30].

2.5       l'année 2009

2.5.1    Janvier à mars 2009

[68]        À la mi-janvier, M. Gatti et Mme Rodrigues passent la soirée avec des amis. Les invités assistent à une autre scène de jalousie. Puis, Mme Rodrigues veut rentrer à la maison parce que le baptême d'Arturo Jr est prévu pour le lendemain. La soirée se termine plus tôt que ne l'auraient voulu certains invités.

[69]        Au baptême, Mme Rodrigues se montre également insatisfaite du service reçu au restaurant et son comportement paraît déplacé aux yeux des amis de M. Gatti.

[70]        Les sœurs Minero décident de ne plus fréquenter Mme Rodrigues à partir de ce moment. Elles continuent cependant de recevoir la visite de M. Gatti et d'Arturo Jr.

[71]        La sœur de Mme Rodrigues, Flavia, est présente au baptême. Mme Rodrigues et M. Gatti envisagent d'assister à la remise des diplômes de Flavia en juin, au Brésil.

[72]        M. Gatti couche occasionnellement chez sa mère lorsqu'il rentre tard. Le sous-sol est aménagé pour lui.

[73]        Fin-janvier, février et mars, le couple voyage avec Arturo Jr au Mexique, au Panama et dans les Caraïbes[31].

[74]        Le 24 mars, de retour à Montréal, Mme Rodrigues demande une intervention policière pour violence conjugale. M. Gatti est ivre. En cour, M. Gatti s'engage à respecter plusieurs conditions[32] : s'abstenir de consommer de l'alcool ou des drogues, s'abstenir de communiquer directement avec Mme Rodrigues ou de s'approcher du domicile conjugal, sauf pour l'exercice de droits d'accès avec Arturo Jr et résider chez sa mère.

[75]        Ces conditions ne sont jamais respectées. Malgré les conseils de ses amis Messieurs Santos et Rizzo, M. Gatti continue de voir Mme Rodrigues et Arturo Jr de façon régulière, à la demande même de Mme Rodrigues.

2.5.2    Avril 2009

[76]        Les querelles continuent. La relation du couple devient très difficile.

[77]        M. Santos suggère à M. Gatti que Mme Rodrigues n'est intéressée que par son argent. Notamment, Mme Rodrigues se plaint régulièrement que M. Gatti paie une pension alimentaire trop élevée pour Sofia. M. Gatti tente de le rassurer en lui disant qu'il est protégé par son contrat de mariage.

[78]        Mais il y a encore également de bons moments, comme en témoignent leur ami M. Casino et la voisine et gardienne, Mme Purchio.

[79]        M. Gatti avoue à Mme Purchio avoir un problème avec l'alcool. Elle lui conseille de chercher de l'aide.

[80]        Le 15 avril, de nouvelles accusations sont portées contre M. Gatti pour ne pas s'être abstenu de consommer de l'alcool ou d'autres substances intoxicantes[33].

[81]        M. Gatti répète à plusieurs reprises à ses amis et à sa famille que sa relation avec Mme Rodrigues ne va pas bien, mais qu'il veut y travailler et avoir une bonne relation avec son fils. Il ne veut pas reproduire avec Arturo Jr la quasi-absence de relation qu'il a avec Sofia, causée en partie par l'éloignement géographique. Il sait que Mme Rodrigues n'a pas encore de statut de résidente permanente au Canada et il ne veut pas que Mme Rodrigues déménage au Brésil avec Arturo Jr si la relation de couple devait se terminer.

2.5.3    Mai 2009

[82]        Le 1er mai, M. Gatti offre une luxueuse automobile à Mme Rodrigues pour son anniversaire.

[83]        M. Gatti demande à M. Rizzo de l'aider à trouver un condominium, où il pourrait habiter, pour quitter le sous-sol chez sa mère. Puis, il lui demande de trouver un avocat pratiquant en droit matrimonial.

[84]        Début mai, M. Gatti visite un condominium sur la rue De Castelnau où il entend vivre seul et y recevoir son fils[34]. À la même période, il visite des appartements où Mme Rodrigues pourrait déménager parce que M. Gatti a décidé de ne pas acheter le condominium de la rue Jarry appartenant au Groupe Gatti-Rizzo inc.

[85]        Le 8 mai, M. Gatti signe une promesse d'achat pour un condominium sur la rue De Castelnau[35].

[86]        Le même jour, il consulte Me Schirm, avocate pratiquant en droit matrimonial[36], qui, à son tour, contacte Mme Rodrigues. Selon Mme Rodrigues, cet appel provoque une nouvelle réconciliation du couple. Sa version est contestée par Mme Gatti et M. Fabrizio Gatti.

[87]        Mme Rodrigues a déjà consulté une personne pour régulariser son statut avec Immigration Canada. Après plus d'un an, sa demande n'a toujours pas donné de résultats. Le 26 mai, elle rencontre un nouveau consultant, M. Reynelg, pour voir s'il peut l'aider à accélérer le processus[37].

2.5.4    Juin 2009

[88]        Le 2 juin, c'est au tour de M. Gatti de déposer une plainte contre Mme Rodrigues[38]. À l'occasion d'une querelle, Mme Rodrigues a égratigné le véhicule de M. Gatti avec une clé. Elle le reconnaît.

[89]        Le couple se réconcilie, encore une fois.

[90]        Le 5 juin, Mme Rodrigues consent à la levée de l'interdiction judiciaire pour M. Gatti de communiquer avec elle[39].

[91]        Le couple assiste à un festival italien à Montréal avec Mme Gatti et son conjoint.

[92]        Aux environs du 6 juin, M. Gatti, Mme Rodrigues et Arturo Jr partent quelques jours ensemble à Québec[40].

[93]        Depuis le début de l'année, le couple planifie un voyage au Brésil pour la fin juin. M. Gatti invite même sa mère et son conjoint à les accompagner. Ces derniers refusent.

[94]        M. Gatti et Mme Rodrigues décident de voyager d'abord en Europe[41]. Ils ont toujours rêvé d'un voyage de noces en Europe. Ils n'avaient choisi Hawaï, en décembre 2007, qu'en raison de l'impossibilité pour Mme Rodrigues de sortir et de revenir aux États-Unis sans document d'immigration valide.

[95]        Ils vont voyager en Europe sans Arturo Jr, mais ils veulent l'emmener au Brésil. Ils conviennent alors que M. Gatti conduira Arturo Jr aux États-Unis[42], chez la mère de Mme Rodrigues, qui va s'en occuper pendant le voyage des parents en Europe. Puis, au retour, Mme Rodrigues s'envolera directement vers le Brésil alors que M. Gatti reviendra à Montréal quelques jours, puis ira chercher l'enfant chez la grand-mère maternelle pour l'emmener au Brésil.

[96]        Mme Rodrigues prend rendez-vous chez le notaire Moidel pour le 11 juin. Elle lui demande de préparer une lettre autorisant M. Gatti à voyager seul avec Arturo Jr, lettre requise par les autorités d'immigration.

[97]        Le 12 juin, M. Gatti et Mme Rodrigues rencontrent le notaire Moidel. Mme Rodrigues signe la lettre. Les conjoints discutent également de dispositions testamentaires, de mandats en cas d'inaptitude et de promesse de fidélité[43] avec Me Moidel.

[98]        Le 15 ou le 16 juin, M. Gatti reconduit Arturo Jr au New Jersey et achète une bague pour Mme Rodrigues[44]. Il revient à Montréal.

[99]        Le 17 juin, les conjoints signent chacun un testament notarié devant le notaire Moidel et quittent le soir même pour Amsterdam[45]. Le testament signé par M. Gatti est le Testament de 2009 dont les Demandeurs recherchent l'annulation.

[100]     Le 22 juin, M. Gatti emmène Mme Rodrigues à Paris[46] et lui présente la bague achetée quelques jours plus tôt, en haut de la tour Eiffel[47].

[101]     Le 25 juin, Mme Rodrigues s'envole pour le Brésil et M. Gatti revient à Montréal[48].

[102]     Le 26 juin, M. Gatti signe l'acte d'achat notarié pour le condominium sur la rue De Castelnau[49].

[103]     Mme Gatti et Messieurs Rizzo et Santos suggèrent à M. Gatti de ne pas aller au Brésil puisque, selon eux, sa relation avec Mme Rodrigues est terminée. M. Gatti réaffirme qu'il veut tout tenter pour faire fonctionner son mariage, dans l'intérêt de son fils Arturo Jr.

[104]     À partir du Brésil, Mme Rodrigues écrit à M. Reynelg pour avoir des nouvelles de son dossier d'immigration. Fin juin, alors qu'il est toujours à Montréal, M. Gatti rencontre M. Reynelg pour remplir la demande de parrainage[50]. Les papiers ne sont pas envoyés directement aux autorités parce qu'il manque la signature de Mme Rodrigues.

2.5.5    Juillet 2009

[105]     Le 1er juillet, M. Gatti passe chercher Arturo Jr chez sa grand-mère maternelle aux États-Unis et rejoint Mme Rodrigues au Brésil, à temps pour la remise des diplômes de Mme Flavia Rodrigues[51].

[106]     Après avoir passé quelques jours avec des membres de la famille de Mme Rodrigues, le couple s'installe à Porto de Galinhas.

[107]     Le 11 juillet, M. Gatti décède, dans des circonstances nébuleuses. Mme Gatti et M. Fabrizio Gatti croient que Mme Rodrigues est impliquée dans le décès de son conjoint. À ce jour, Mme Rodrigues ne réussit pas à les convaincre du contraire.

2.5.6    Juillet à novembre 2009

[108]     M. Fabrizio Gatti et Mme Gatti apprennent de M. Rizzo ou de M. Patrick Lynch que M. Gatti a signé un testament en 2007. Ils obtiennent une copie non signée d'un testament. M. Fabrizio Gatti effectue plusieurs recherches pour retrouver l'original, en vain.

[109]     Notamment, le 21 juillet, M. Fabrizio Gatti et Mme Gatti se présentent à la Banque de Montréal pour vérifier si le coffret de sûreté de M. Gatti contient un testament. Selon la preuve entendue, le coffret est vide.

[110]     Peu après le décès de M. Gatti, M. Rizzo fait changer les serrures de la résidence familiale sur la rue Jarry. Ce n'est qu'en novembre, après avoir obtenu une autorisation judiciaire, que Mme Rodrigues obtient accès à la résidence et récupère certains objets[52]. Elle constate alors la disparition de nombreux biens.

[111]     En novembre, M. Reynelg aide Mme Rodrigues à déposer une demande de résidence permanente pour des motifs humanitaires, auprès des autorités d'immigration canadiennes. La demande est rejetée.

2.6       après 2009

[112]     Mme Rodrigues tente de renouer les liens entre Mme Gatti et Arturo Jr. Elle lui fait parvenir des photos et une invitation pour l'anniversaire de l'enfant en 2010.

[113]     Mme Gatti envoie une carte d'anniversaire et un cadeau pour Arturo Jr, mais ne reprend pas autrement contact, sauf pour une visite organisée pendant le procès, à l'automne 2011.

3.         les questions en litige

[114]     Le Testament de 2009 doit-il être annulé pour captation?

[115]     Mme Rodrigues doit-elle être déclarée indigne de succéder?

[116]     Le Testament de 2007 doit-il être reconstitué?

[117]     L'acte de fiducie Arturo Gatti Irrevocable Trust I doit-il être reconstitué?

[118]     Avant de statuer sur ces questions, le Tribunal discute certaines questions relatives à la preuve : crédibilité des témoins, fardeau de preuve et objections.

4.         la crédibilité des témoins et le fardeau de preuve

4.1       la crédibilité des témoins

[119]     Les questions en litige - captation, indignité - amènent les témoins à communiquer des faits enchevêtrés d'impressions. Il faut départager les uns des autres. Par exemple, il y a une différence entre dire « Mme Rodrigues isolait son conjoint des membres de sa famille » et relater un événement précis où Mme Rodrigues aurait empêché M. Gatti d'aller voir un membre de sa famille.

[120]     Même sur les éléments purement factuels, la preuve révèle des contradictions importantes. Certains témoignages sont tout simplement irréconciliables.

[121]     La crédibilité d'un témoin s'évalue en fonction de plusieurs critères, notamment son degré de perception et de connaissance des faits, sa faculté de mémoriser les événements passés et de les relater avec précision, son comportement, son mode d'expression, son indépendance par rapport aux parties en cause, son apparente sincérité, son intégrité, sa réticence[53].

[122]     Les circonstances dramatiques entourant le décès de M. Gatti ont été abondamment discutées et rediscutées entre les témoins depuis 2009. Les souvenirs particuliers de l'un se sont, avec le temps, intégrés aux souvenirs des autres, avec les distorsions inévitables qui en résultent alors que le Tribunal entend les témoins plus de deux ans après la survenance des faits.

[123]     De plus, la large couverture médiatique a contribué à augmenter cette distorsion. Le meilleur exemple de ceci est le témoignage de Mme Rivera. Sans avoir aucune connaissance personnelle des faits en litige, puisqu'elle n'a pas vu M. Gatti et Mme Rodrigues depuis l'automne 2007, elle offre à titre de témoignage ce qu'elle a lu ou entendu dans les médias.

[124]     Une déclaration antérieure d'un témoin, incompatible avec la version donnée au procès, peut constituer un élément nuisant à sa crédibilité. La preuve par témoin ne requiert aucune corroboration (art. 2844 C.c.Q.). Mais la corroboration contribue à étoffer la preuve[54].

[125]     La crédibilité de Mme Rodrigues, de Mme Gatti, de M. Fabrizio Gatti et de Mme Rivera est douteuse sur plusieurs points. Même les témoignages des amis d'enfance de M. Gatti ne paraissent pas entièrement indépendants. Le Tribunal mentionne ici quelques exemples tirés de la preuve pour illustrer son propos.

4.1.1    Mme Rodrigues

[126]     Le témoignage de Mme Rodrigues quant au déroulement de la séance de signature du contrat de mariage en août 2007 est un exemple où sa crédibilité est minée par la preuve contraire[55].

[127]     Mme Rodrigues prétend avoir signé le contrat de mariage sans le lire. Le Tribunal retient plutôt les témoignages de l'avocat John Lynch et de son adjointe Mme Di Antonio. M. Lynch s'est assuré qu'une autre avocate conseille Mme Rodrigues. Cette avocate a pris le temps de lire le contrat à Mme Rodrigues pour s'assurer qu'elle en comprenait bien le contenu avant de lui faire apposer sa signature.

[128]     Le témoignage de Mme Rodrigues concernant la suite des événements est encore moins crédible : elle affirme que, quelques jours après leur retour, M. Gatti, en sa présence, se serait présenté au bureau de M. Lynch, pour détruire l'original du contrat de mariage et ainsi lui prouver son amour. Mme Di Antonio aurait répondu avoir envoyé le contrat de mariage à leur résidence. Ils ne l'ont jamais reçu. Mme Rodrigues tient alors pour acquis que le contrat est perdu et n'a plus aucune valeur juridique.

[129]     Mme Di Antonio relate plutôt que, lors de cette visite survenue plusieurs mois plus tard, elle a remis une photocopie du contrat de mariage à M. Gatti plutôt que l'original. M. Gatti l'a déchiré devant sa conjointe, en faisant un clin d'œil à l'adjointe, laissant ainsi faussement croire que l'original du contrat de mariage était détruit. Puis, quelques jours plus tard, M. Gatti a téléphoné à Mme Di Antonio pour s'assurer qu'elle détenait toujours l'original du contrat de mariage[56]. Le Tribunal retient cette version qui provient d'un témoin indépendant des parties en litige.

4.1.2    Mme Gatti

[130]     Mme Gatti est dévastée par la perte de son fils et, visiblement, les membres de la famille ne l'ont pas tenue au courant de tous les faits pertinents de la vie de son fils. Mais il n'y a pas que de l'ignorance.

[131]     Elle affirme sans hésitation que son fils était présent et couchait chez elle entre janvier et juin 2009 alors qu'une preuve abondante démontre qu'il est parti en voyage avec sa femme pendant plusieurs semaines et qu'il passait également une partie de son temps à la résidence familiale.

[132]     Elle détient des biens appartenant à la succession depuis le décès de son fils en juillet 2009 et n'en a avisé la liquidatrice qu'au cours du procès. Elle prétend que personne n'est entré dans la chambre de M. Gatti depuis son départ pour le Brésil en 2009. Or, l'on y retrouve, notamment, une attestation de décès de M. Gatti[57].

4.1.3    Mme Rivera

[133]     Le Tribunal ne peut s'expliquer le comportement de Mme Rivera. Elle ne se joint au recours que quelques jours avant le début du procès[58], elle ignore tout des faits en litige n'ayant jamais revu M. Gatti depuis l'automne 2007 et ses explications sur sa motivation pour demander au Tribunal de déclarer Mme Rodrigues indigne sont incompréhensibles[59].

[134]     Dans les procédures au New Jersey intentées en 2006, Mme Rivera allègue sous serment que M. Gatti est infidèle, paie des prostituées, a tenté de se suicider en consommant une surdose de cocaïne, d'alcool et d'autres médicaments, qu'il souffre d'épisodes psychotiques et a besoin de traitements psychiatriques[60].

[135]     Puis, dans son interrogatoire au préalable[61] et dans une déclaration aux médias[62], elle effectue une volte-face complète niant que M. Gatti ait eu quelque problème d'alcool, de médicaments ou de drogue que ce soit. À l'audience, Mme Rivera revient d'abord à sa version initiale. Puis, elle tente de brouiller encore une fois les cartes[63], sans succès.

[136]     Le Tribunal conclut que le témoignage de Mme Rivera corrobore plutôt la thèse de la défense que celle de la demande eu égard à la consommation excessive d'alcool[64].

4.1.4    M. Fabrizio Gatti

[137]     M. Fabrizio Gatti n'a pas grand intérêt financier dans le litige. Tout au plus est-il légataire particulier pour certains objets dans le Testament de 2007.

[138]     Lorsque le procureur de Mme Rodrigues demande des informations sur les biens de la succession, M. Fabrizio Gatti, par l'entremise de son procureur, nie avoir quelque information que ce soit à divulguer. Pourtant, il sait pertinemment que plusieurs biens de la succession se trouvent au sous-sol chez sa mère et que Mme Rodrigues, la liquidatrice, devrait être mise en possession de ces biens.

[139]     Il intercepte le courrier du couple pendant des mois et retarde le règlement de la succession, obligeant ainsi cette dernière à payer des intérêts et même l'empêchant d'encaisser un chèque. Ce n'est qu'au procès que l'information est finalement divulguée[65].

[140]     Il nie avoir cherché le Testament de 2007 à la résidence familiale, alors qu'il y avait accès, qu'il a visité la chambre occupée par M. Gatti au sous-sol chez sa mère, qu'il a vérifié le coffret de sûreté à la banque[66], qu'il a téléphoné aux amis et membres de la famille et même téléphoné à une vingtaine d'entreprises d'entreposage au New Jersey[67]. Son témoignage sur cette question est tout simplement invraisemblable.

[141]     M. Fabrizio Gatti a contacté la voisine, Mme Purchio, pour lui demander de venir témoigner au procès du fait que Mme Rodrigues revenait souvent à la maison en état d'ébriété. Mme Purchio a refusé : elle n'a jamais vu Mme Rodrigues en état d'ébriété.

4.1.5    Les amis d'enfance

[142]     Les Demandeurs font témoigner quatre amis d'enfance de M. Gatti, Messieurs Rizzo et Santos et les sœurs Minero.

[143]     Il est vrai, comme le soulignent les Demandeurs, que ces témoins n'ont rien à gagner sur le plan financier dans ce litige.

[144]     Néanmoins, ils ne sont pas tout à fait indépendants. Ce sont des amis de longue date, non seulement de M. Gatti, mais également de la famille Gatti. Leur solidarité avec la famille est évidente.

[145]     Leurs descriptions de M. Gatti et de Mme Rodrigues manquent de nuances, tout comme celles données par Mme Gatti et par M. Fabrizio Gatti d'ailleurs. L'un n'a que des qualités et l'autre, que des défauts.

[146]     Messieurs Rizzo et Santos recommandaient à M. Gatti de mettre fin à sa relation avec Mme Rodrigues. Leur perception des événements est altérée par cette perspective.

4.2       le fardeau de preuve

[147]     Il appartient à celui qui invoque la captation ou l'indignité de la prouver par prépondérance de preuve.

[148]     Pour ce faire, il ne suffit pas pour les Demandeurs de miner la crédibilité de Mme Rodrigues. Il leur revient de prouver la captation et l'indignité.

[149]     Pourtant, fait inusité, deux des Demandeurs ne témoignent pas en demande, M. Fabrizio Gatti et Mme Rivera. C'est la défense qui doit les faire témoigner pour donner au Tribunal une vision complète de la situation factuelle.

[150]     Quant à Mme Gatti, elle n'est pas au courant de tous les faits pertinents et sa compréhension des conversations entre M. Gatti et Mme Rodrigues est limitée par le fait qu'ils se parlent en anglais et qu'elle ne parle que l'italien.

[151]     Le témoignage qu'un tribunal considère comme faux sur un point ne doit pas nécessairement être rejeté en entier[68]. Compte tenu des contradictions, au moment d'évaluer la preuve, le Tribunal préférera les éléments de preuve corroborés par une preuve écrite ou par les témoignages de témoins entièrement neutres.

[152]     Devant les innombrables contradictions, il n'est pas toujours aisé de séparer le bon grain de l'ivraie.

5.         les objections

[153]     Le Tribunal a tranché bon nombre d'objections à l'audience. D'autres ont été abandonnées.

[154]     Les objections 3 à 8, 14, 17 à 24, 26, 28, 30, 34, 41a, 48, 50, 53, 54, 70, 78, 124 et 128[69] ont été prises sous réserve et les procureurs ont présenté une argumentation sur ces objections en fin de procès.

[155]     Les objections portent sur :

·                    le ouï-dire;

·                    la règle de la meilleure preuve;

·                    l'admissibilité d'une preuve testimoniale.

5.1      le ouï-dire[70]

[156]     Les objections 3 à 8, 14, 17 à 24, 26, 28, 30, 34, 41a, 48, 50, 53, 54, 70, et 128 s'appuient sur la règle du ouï-dire. Les témoins veulent rapporter des paroles soit de M. Gatti, soit de Mme Rodrigues ou encore de M. Gatti qui rapporte des paroles de Mme Rodrigues.

[157]     Règle générale, les témoins témoignent à l'audience sur des faits dont ils ont une connaissance personnelle (articles 2843 C.c.Q. et 294 C.p.c.).

[158]     Comme le rappelle la Cour suprême du Canada dans l'arrêt Khelawon[71], « [n]otre système accusatoire attache une grande importance à l'assignation de témoins qui déposent sous la foi du serment ou d'une affirmation solennelle et dont le comportement peut être observé par le juge des faits, et le témoignage, vérifié au moyen d'un contre-interrogatoire ».

[159]     En effet, lorsque la déclaration est rapportée par une personne autre que celle qui a prononcé les paroles, le juge ne peut observer le comportement du déclarant et ce déclarant ne peut être contre-interrogé.

[160]     Il en va généralement de même de la déclaration faite autrement qu'à l'audience par un témoin au procès. Bien qu'en ce cas le déclarant puisse être contre-interrogé, il reste néanmoins qu'au moment où la déclaration est prononcée, la personne n'est pas sous serment et que le juge n'a pu observer son comportement.

[161]     Pour constituer une preuve par ouï-dire, la preuve doit être offerte pour établir la véracité de son contenu. En ce cas, la preuve est présumée inadmissible.

[162]     La détermination du but recherché est donc essentielle pour statuer sur l'admissibilité d'une preuve.

[163]     Pour les objections prises sous réserve, les parties indiquent qu'elles cherchent à prouver tant l'existence des déclarations que la véracité de leur contenu, sans plus de précision.

[164]     Deux exceptions à la règle du ouï-dire sont susceptibles de trouver application ici, celles des articles 2870 et 2871 C.c.Q. :

2870.    La déclaration faite par une personne qui ne comparaît pas comme témoin, sur des faits au sujet desquels elle aurait pu légalement déposer, peut être admise à titre de témoignage, pourvu que, sur demande et après qu'avis en ait été donné à la partie adverse, le tribunal l'autorise.

Celui-ci doit cependant s'assurer qu'il est impossible d'obtenir la comparution du déclarant comme témoin, ou déraisonnable de l'exiger, et que les circonstances entourant la déclaration donnent à celle-ci des garanties suffisamment sérieuses pour pouvoir s'y fier.

Sont présumés présenter ces garanties, notamment, les documents établis dans le cours des activités d'une entreprise et les documents insérés dans un registre dont la tenue est exigée par la loi, de même que les déclarations spontanées et contemporaines de la survenance des faits.

2871.    Lorsqu'une personne comparaît comme témoin, ses déclarations antérieures sur des faits au sujet desquels elle peut légalement déposer peuvent être admises à titre de témoignage, si elles présentent des garanties suffisamment sérieuses pour pouvoir s'y fier

[165]     Pour se prévaloir de l'exception de l'article 2870 C.c.Q., il faut remplir quatre conditions :

·                    la nécessité;

·                    la fiabilité;

·                    la recevabilité à tous autres égards (notamment la pertinence);

·                    la permission du Tribunal.

[166]     Pour se prévaloir de l'exception de l'article 2871 C.c.Q., il faut démontrer :

·                    la fiabilité;

·                    la recevabilité à tous autres égards.

[167]     Pour les témoins qui veulent rapporter des déclarations de M. Gatti, ce dernier étant décédé, tous conviennent que la nécessité, au sens de l'article 2870 C.c.Q., est démontrée.

[168]     En ce qui concerne la recevabilité de la preuve, il faut établir un seuil de fiabilité. Le Tribunal peut tenir compte des éléments corroboratifs dans l'appréciation de ce seuil de fiabilité.

[169]     Le fait que le déclarant ait ou non un motif pour mentir est une considération pertinente pour déterminer si les circonstances des déclarations sont suffisamment rassurantes quant à leur véracité pour être admises, mais il ne s'agit que d'un des facteurs à considérer.

[170]     La Défenderesse considère plusieurs déclarations comme inadmissibles en preuve en raison du manque de crédibilité du témoin qui veut rapporter des propos tenus par M. Gatti ou par Mme Rodrigues. La crédibilité du témoin qui rapporte la déclaration d'un tiers est une analyse utile pour déterminer la valeur probante d'une preuve plutôt que son admissibilité. Une déclaration peut être admissible même si, ultimement le Tribunal l'écarte en raison du manque de crédibilité du témoin qui la rapporte.

[171]     Pour les motifs énoncés dans l'Annexe jointe au jugement, les objections 6, 7, 8, 17, 18, 19, 20, 21, 24, 50, 53, 70 sont rejetées, les objections 3, 4, 5, 14, 22, 23, 28, 30, 34, 41a, 48, 54, 128 sont accueillies et l'objection 26 est partiellement accueillie.

5.2       la règle de la meilleure preuve

[172]     L'objection 78 porte sur l'admissibilité en preuve du rapport du service de police de Maui concernant l'intervention policière en janvier 2008[72]. L'objection de la Défenderesse s'appuie sur la règle de la meilleure preuve.

[173]     La déclaration qui a été faite par écrit doit être prouvée par la production de l'écrit (art.  2872 C.c.Q.), c'est-à-dire par la production de l'original ou d'une copie qui légalement en tient lieu (art. 2860 al. 1 C.c.Q.).

[174]     Le document provenant du service de police produit à l'audience n'a pas été introduit en preuve par un témoin, mais simplement déposé. L'avis sous l'article 403 C.p.c. a été contesté. Il ne s'agit pas d'une copie certifiée.

[175]     Le document est incomplet : la télécopie indique que le service de police de Maui a envoyé un document de seize pages aux Demandeurs alors que ceux-ci n'en produisent que neuf. Lors des événements, M. Gatti et Mme Rodrigues ont tous deux été amenés au poste de police. Or, le document produit ne concerne que Mme Rodrigues.

[176]     Dans ces circonstances, l'objection 78 au dépôt en preuve de P-32 est accueillie.

[177]     Néanmoins, Mme Rodrigues admet qu'il y a eu dispute ce soir-là et que les policiers sont intervenus. Elle ne se rappelle pas avoir injurié la policière, mais reconnaît qu'elle était ivre.

5.3       l'admissibilité de la preuve testimoniale

[178]     L'objection 124 porte sur l'admissibilité de la preuve testimoniale pour la reconstitution du Testament de 2007. Les Demandeurs veulent faire témoigner l'avocat Levine qui aurait rédigé le testament et les trois témoins lors de la signature, Mesdames Thompson et Firetto et M. McManus.

[179]     La Défenderesse invoque que la condition d'admissibilité de la preuve testimoniale édictée à l'article 775 C.c.Q. n'a pas été remplie :

775.      La preuve testimoniale d'un testament qui ne peut être produit est admise, que le testament ait été perdu ou détruit ou qu'il se trouve en la possession d'un tiers, sans collusion de celui qui veut s'en prévaloir.

[180]     Les Demandeurs ont recherché le Testament de 2007, sans jamais réussir à le retracer : coffret de sûreté, compagnie d'entreposage, amis, chambre de M. Gatti chez sa mère. Ils ne peuvent produire l'original. D'ailleurs, s'ils l'avaient en leur possession, il l'aurait sans doute déposé puisqu'il les avantage.

[181]     Mme Rodrigues prétend, quant à elle, ne jamais avoir vu le document.

[182]     Cette preuve est suffisante pour conclure que le testament a été perdu ou détruit ou qu'il se trouve en la possession d'un tiers, sans collusion de celui qui veut s'en prévaloir et admettre la preuve testimoniale.

[183]     L'objection est rejetée.

6.         la captation

6.1       les principes généraux[73]

[184]     Le fardeau de preuve repose sur les épaules de celui qui invoque captation.

[185]     La captation est un dol, un ensemble de manœuvres répréhensibles effectuées dans le but d'amener une personne à consentir une libéralité qu'elle n'aurait pas autrement consentie.

[186]     Il n'est pas contraire à la loi, en soi, de s'attirer les faveurs d'un testateur. La captation n'entraîne la nullité d'un testament qu'en présence de fraude ou de manœuvres dolosives. Le Tribunal doit être convaincu de l'existence d'un dol et que ce dol a été déterminant sur la volonté du testateur exprimée dans le testament attaqué.

[187]     Il faut examiner la situation de manière globale : l'âge, l'état de santé, la condition sociale et la personnalité du testateur, les dispositions testamentaires, l'isolement du testateur, le dénigrement des proches, les circonstances entourant la signature du testament.

[188]     La captation se prouve par preuve orale ou écrite, souvent par présomptions.

[189]     Les présomptions sont des conséquences que le tribunal tire d'un fait connu à un fait inconnu (art. 2846 C.c.Q.). Elles doivent être précises, graves et concordantes (art.  2849 C.c.Q.). Dans un arrêt devenu classique, le juge Lamer, alors à la Cour d'appel, fait siens les propos de l'auteur français Larombière[74] :

Les présomptions sont graves, lorsque les rapports du fait connu au fait inconnu sont tels que l’existence de l’un établit, par une induction puissante, l’existence de l’autre (...).

Les présomptions sont précises, lorsque les inductions qui résultent du fait connu tendent à établir directement et particulièrement le fait inconnu et contesté. S’il était également possible d’en tirer les conséquences différentes et mêmes contraires, d’en inférer l’existence de faits divers et contradictoires, les présomptions n’auraient aucun caractère de précision et ne feraient naître que le doute et l’incertitude.

Elles sont enfin concordantes, lorsque, ayant toutes une origine commune ou différente, elles tendent, par leur ensemble et leur accord, à établir le fait qu’il s’agit de prouver. ... Si ... elles se contredisent ... et se neutralisent, elles ne sont plus concordantes, et le doute seul peut entrer dans l’esprit du magistrat.

[190]     Un simple soupçon ou hypothèse ne suffit pas[75].

[191]     Aucun des exemples jurisprudentiels où des testaments sont annulés pour cause de captation ne vise une situation factuelle s'approchant des faits en l'instance[76]. Les testateurs dans ces affaires sont typiquement des personnes âgées, malades et isolées.

[192]     Il s'agit avant tout d'analyser la situation factuelle à la lumière de la preuve entendue.

[193]     La captation et la déclaration d'indignité constituent deux demandes distinctes[77]. La captation est un vice de consentement qui mène à la nullité du testament. La déclaration d'indignité empêche une personne d'hériter, mais n'emporte pas nullité du testament. Par contre, les faits pertinents à l'étude de l'un sont souvent également pertinents à l'étude de l'autre.

[194]     Le Tribunal analyse la preuve à la lumière de ces principes et en fonction des reproches allégués[78] :

·                    la prise de contrôle et la manipulation de M. Gatti par Mme Rodrigues;

·                    l'isolement de M. Gatti;

·                    le dénigrement des proches;

·                    la séparation du couple;

·                    les circonstances entourant la signature du Testament de 2009.

6.2       la prise de contrôle et la manipulation

6.2.1    Les sorties et l'alcool

[195]     Les Demandeurs nient avec véhémence que M. Gatti ait eu quelque problème que ce soit avec l'alcool, la drogue ou les médicaments. Pour la famille et les amis de M. Gatti, celui-ci aime bien s'amuser, c'est tout. Ils reconnaissent que M. Gatti est ivre à l'occasion, bien que rarement à leur avis.

[196]     Pourtant, la preuve démontre que :

·                    en 1997, M. Gatti plaide coupable à des infractions de conduite en état d'ébriété; ayant fait défaut de se conformer à son obligation de compléter un programme concernant l'alcoolémie, il est condamné à un jour de prison;

·                    en 2000, il plaide coupable à une accusation de conduite en état d'ébriété;

·                    en 2001, M. Casino tente d'aider M. Gatti avec ses problèmes d'alcool;

·                    en 2005, M. Gatti est hospitalisé pour consommation excessive de médicaments et de drogues;

·                    en 2006 et 2007, Mme Rivera affirme sous serment que M. Gatti consomme de l'alcool de manière excessive[79];

·                    à l'automne 2007, M. Gatti assiste à des rencontres avec les Alcooliques Anonymes, rencontres auxquelles participent également Mme Rodrigues et M. Casino, afin d'aider M. Gatti;

·                    en décembre 2007, M. Gatti séjourne en clinique de désintoxication après que sa femme l'ait trouvé quasi inconscient;

·                    en 2009, M. Gatti viole l'une des conditions de l'ordonnance de la Cour du Québec, c'est-à-dire l'interdiction de se trouver dans un restaurant où l'on vend de l'alcool et est condamné au paiement d'une amende.

[197]     L'on sait également que M. Gatti combinait la prise d'alcool avec des médicaments pour des douleurs et des somnifères.

[198]     Si l'on ajoute à ces événements, le témoignage de M. Fabrizio Gatti concernant une arrestation pour s'être battu en Floride et les plaintes pour violence conjugale, on peut certainement conclure à une consommation excessive.

[199]     L'important ici n'est pas de définir la nature du comportement de M. Gatti (visiblement les parties ne s'entendent pas sur la définition des termes « alcoolique » ou « problème avec l'alcool »).

[200]     Ce qui importe est que Messieurs Fabrizio Gatti, Rizzo, Santos et Sciangula et Mme Gatti reconnaissent que les sorties nocturnes de M. Gatti et sa consommation d'alcool étaient un sujet important de friction avec son épouse. Après tout, aux moments les plus difficiles de la relation, Mme Rodrigues est une jeune mère avec un bébé et le père passe plusieurs soirées et nuits par semaine à fêter dans les clubs.

6.2.2    L'argent

[201]     Plusieurs témoins font des reproches précis à Mme Rodrigues concernant certaines questions financières, notamment :

·                    que M. Gatti considérait qu'elle dépensait de manière excessive;

·                    qu'elle était avide d'informations sur les opérations financières du Groupe Gatti-Rizzo inc.;

·                    qu'elle a tenté d'obtenir un transfert de fonds important au Brésil dans les jours précédant le décès de M. Gatti;

·                    qu'elle se plaignait que la pension alimentaire payable pour Sofia était trop élevée.

[202]     La preuve prépondérante ne soutient aucune de ces prétentions sauf la dernière, que Mme Rodrigues explique.

            Les dépenses de Mme Rodrigues

[203]     Le seul événement précis invoqué pour soutenir que M. Gatti aurait trouvé que sa femme dépensait trop est l'incident du 2 juin 2009 où, à l'occasion d'une querelle, Mme Rodrigues égratigne le véhicule de M. Gatti. Elle reconnaît avoir égratigné la voiture, mais pas au motif qu'elle dépensait trop.

[204]     Selon Mme Rodrigues, les conjoints se disputent encore une fois à propos des sorties et de l'alcool.

[205]     Selon M. Rizzo, M. Gatti, considérant que sa conjointe dépensait trop, aurait décidé de réduire les fonds disponibles dans le compte conjoint pour voir combien de temps Mme Rodrigues prendrait pour dépenser cet argent. La querelle du 2 juin 2009 aurait eu lieu lorsque Mme Rodrigues se rend compte qu'il n'y a plus d'argent dans le compte de banque.

[206]     L'objection au témoignage de M. Rizzo sur cette question est accueillie. Même si elle avait été rejetée, la preuve documentaire ne soutient pas le témoignage de M. Rizzo[80].

[207]     Aucune preuve ne permet au Tribunal de conclure que M. Gatti trouvait sa femme trop dépensière.

[208]     De manière générale, la preuve démontre que M. Gatti a su amasser une fortune et en fait profiter les membres de sa famille, ses amis et, certainement, son épouse et ses enfants.

            Les opérations financières du Groupe Gatti-Rizzo inc.

[209]     M. Fabrizio Gatti suggère que Mme Rodrigues voulait tout savoir sur les informations financières du Groupe Gatti-Rizzo inc. L'affirmation est vague et générale.

[210]     M. Rizzo témoigne que Mme Rodrigues ne lui a posé aucune question à ce sujet.

[211]     Le Tribunal considère que ce reproche n'est pas prouvé.

            Le transfert d'argent au Brésil

[212]     Selon Messieurs Rizzo et Santos, Mme Rodrigues aurait demandé à M. McManus, le conseiller financier de M. Gatti, de transférer 300 000 $ dans un compte de banque au Brésil, dans les derniers jours de juin 2009. M. Gatti aurait été choqué par cette demande. Messieurs Rizzo et Santos insinuent qu'il y aurait une sorte de complot de Mme Rodrigues pour mettre la main sur l'argent appartenant à M. Gatti.

[213]     La preuve révèle plutôt que le 300 000 $ était pour payer le condominium sur la rue De Castelnau[81] et que la demande était pour l'envoi de fonds du compte américain au compte personnel de M. Gatti à Montréal.

            La pension alimentaire pour Sofia

[214]     Mme Rodrigues prétend que c'est M. Gatti qui, d'abord, se plaint du montant élevé de pension alimentaire qu'il paie pour Sofia, et qu'elle est d'accord avec lui.

[215]     Elle ne croit pas qu'il y ait nécessité que les visites entre M. Gatti et sa fille soient supervisées et considère que M. Gatti paie bien cher pour une enfant qu'il ne voit même pas.

[216]     Par contre, au décès de M. Gatti, Mme Rodrigues voit immédiatement à ce que Mme Rivera continue de recevoir la pension alimentaire pour Sofia.

6.2.3    La séduction

[217]     M. Fabrizio Gatti suggère qu'il est possible que Mme Rodrigues ait obtenu la signature d'un testament en sa faveur en usant de séduction. Il souligne : « Après tout, elle est une femme ».

[218]     La séduction qui n'est pas accompagnée de fraude ou de manœuvres dolosives ne constitue pas de la captation[82].

[219]     Les commentaires de M. Fabrizio Gatti, non appuyés d'une preuve factuelle, cadrent par ailleurs bien mal avec l'image de M. Gatti que les Demandeurs tentent de mettre en preuve.

[220]     M. Gatti n'est visiblement pas « séduit » contre son gré lorsqu'il signe son contrat de mariage, ni lors de sa mise en scène au bureau de M. Levine quand il déchire une copie du contrat de mariage pour faire croire à Mme Rodrigues que le contrat de mariage n'existe plus. Si Mme Rodrigues s'inquiétait de questions financières, elle n'était visiblement pas la seule.

[221]     La prépondérance de preuve démontre plutôt que M. Gatti a toujours gardé le contrôle de ses intérêts financiers :

·                    lorsqu'il a voulu priver Mme Rodrigues d'argent, il l'a fait. Par exemple, il la prive de tout bénéfice dans sa succession dans le Testament de 2007, testament signé quelques jours avant leurs fiançailles et il la prive également de tout bénéfice dans leur contrat de mariage;

·                    lorsqu'il a voulu donner de l'argent à sa femme ou l'avantager par testament - par exemple, dans le Testament de 2009 -, il l'a fait également.

6.2.4    Le comportement de Mme Rodrigues

[222]     La preuve démontre que les disputes sont importantes et fréquentes.

[223]     Mme Rodrigues reconnaît que, lorsqu'elle est en colère, elle peut crier et lancer des objets. Le langage qu'elle utilise alors est déplacé.

[224]     Quelques témoins considèrent que Mme Rodrigues se comporte comme une diva.

[225]     Même si les reproches spécifiques concernant l'argent ne sont pas prouvés, la preuve démontre que Mme Rodrigues parlait souvent d'argent. Le Tribunal est convaincu, à la lumière des témoignages entendus, que Mme Rodrigues était préoccupée par les questions monétaires, qu'elle en discutait avec son conjoint et que ce sujet a créé des tensions.

[226]     Il serait naïf de croire autrement. Mme Rodrigues ne possède aucun avoir matériel alors que son conjoint est multimillionnaire. Son contrat de mariage est entièrement rédigé en faveur de son conjoint. Le couple a un fils et la relation matrimoniale est pour le moins précaire puisque tous deux ont consulté des avocats en droit matrimonial. En cas de divorce ou de décès, ni Arturo Jr ni Mme Rodrigues ne sont expressément protégés.

[227]     Néanmoins, même si le comportement de Mme Rodrigues peut être déplacé, il n'est pas indicatif de prise de contrôle ou de manipulation de M. Gatti.

6.2.5    La conclusion sur la prise de contrôle et la manipulation

[228]     La preuve prépondérante démontre que :

·                    les disputes portaient principalement sur les sorties nocturnes de M. Gatti et sa consommation d'alcool;

·                    les époux étaient jaloux l'un de l'autre;

·                    l'absence de protection financière pour Mme Rodrigues créait des tensions entre M. Gatti et sa femme;

·                    les disputes étaient âpres et belliqueuses;

·                    Mme Rodrigues tenait des propos déplacés et désagréables.

[229]     Ces éléments démontrent la fragilité de la relation du couple.

[230]     Le comportement de Mme Rodrigues a certes irrité M. Gatti. Mais le Tribunal est d'avis que la preuve prépondérante ne démontre pas que Mme Rodrigues a pris le contrôle et manipulé M. Gatti l'incitant ainsi à signer un testament contre son gré.

6.3       l'isolement

[231]     Le Tribunal comprend difficilement comment les Demandeurs peuvent à la fois prétendre que les conjoints étaient séparés de janvier à juin 2009 et que Mme Rodrigues empêchait son conjoint de voir famille et amis.

[232]     Quoi qu'il en soit, la preuve ne démontre pas que Mme Rodrigues a tenté d'isoler M. Gatti.

[233]     C'est Mme Rodrigues qui a invité :

·                    des membres de la famille Gatti pour Noël en 2007;

·                    Mme Gatti et son conjoint à voyager à Cuba;

·                    Mme Gatti à assister à son accouchement;

·                    famille et amis au baptême d'Arturo Jr en janvier 2009.

[234]     Mme Rodrigues et M. Gatti ont assisté à un festival italien avec Mme Gatti et son conjoint en juin 2009. M. Gatti a également invité sa mère et son beau-père à les accompagner au Brésil.

[235]     En ce qui a trait aux sœurs et frères de M. Gatti, Mme Rodrigues n'a jamais rencontré Joe ni Mirella avant le décès de son conjoint. Quant à Pina et Anna-Maria, la preuve révèle peu sinon que la distance géographique créait un éloignement naturel. Si M. Gatti ne les voit pas, le choix lui revient. Il n'y a pas d'indice que Mme Rodrigues ait eu quelque implication que ce soit dans cette décision.

[236]     M. Gatti voyait sa mère, le conjoint de celle-ci et son frère Fabrizio régulièrement. M. Fabrizio Gatti reconnaît avoir vu son frère à sa guise, sans que Mme Rodrigues ne l'en empêche.

[237]     La preuve ne révèle rien qui démontrerait que Mme Rodrigues essayait d'isoler M. Gatti de sa fille Sofia. Au contraire, elle a offert de superviser elle-même les visites pour encourager les contacts entre le père et la fille.

[238]     Mme Rodrigues non seulement permettait à M. Gatti de voir son fils Arturo Jr, mais même l'y encourageait, malgré une ordonnance du tribunal le lui interdisant.

[239]     Quant aux amis, rien n'indique que Mme Rodrigues entravait les contacts de M. Gatti avec eux :

·                    M. Gatti visitait les sœurs Minero même après que celles-ci aient décidé de ne plus fréquenter Mme Rodrigues;

·                    il voyait M. Rizzo, son partenaire d'affaires, plusieurs fois par semaine;

·                    il sortait régulièrement avec Messieurs Santos et Sciangula le soir, plusieurs fois par semaine, et ce, même si Mme Rodrigues ne voulait pas.

[240]     Par ailleurs, Mme Rodrigues et M. Gatti ont beaucoup voyagé en 2009. Il est certain qu'ils ne fréquentaient pas la famille et les amis pendant ces périodes.

6.4       le dénigrement des proches

[241]     Selon plusieurs témoins de la demande, Mme Rodrigues critiquait la famille Gatti.

[242]     Même en demande, certains témoins reconnaissent que Joe a déjà eu des problèmes financiers et qu'il a pu être jaloux des succès de M. Gatti et que les propos tenus par Mme Rodrigues à l'égard des filles d'Anna-Maria sont exacts.

[243]     Mme Rodrigues relate que son opinion sur M. Fabrizio Gatti concorde avec celle qu'en avait son conjoint. Ils ont l'impression que M. Fabrizio Gatti n'aime pas travailler, qu'il n'est jamais heureux. Malgré tout, M. Fabrizio Gatti est le parrain d'Arturo Jr.

[244]     Quant aux autres membres de la famille, M. Gatti les fréquentait peu. Elle a toujours remarqué l'amour entre M. Gatti et sa mère. Personnellement, elle s'est toujours bien entendue avec Mme Gatti.

[245]     M. Fabrizio Gatti évoque également le dénigrement des proches de M. Gatti dans une déclaration de Mme Rodrigues aux médias, après son décès[83]. Un événement survenu après le décès de M. Gatti ne peut pas constituer, à lui seul, un indice de captation qui aurait vicié le consentement de M. Gatti lors de la signature du testament en juin 2009.

[246]     Parler en mal des membres de la famille de son conjoint constitue peut-être un comportement déplacé, mais la preuve ne démontre pas qu'il y a eu là dol ou manœuvres frauduleuses pour tenter d'éloigner M. Gatti de sa famille et faire signer un testament en sa faveur.

6.5       la séparation du couple

[247]     Messieurs Fabrizio Gatti, Santos et Rizzo et Mme Gatti prétendent que M. Gatti et Mme Rodrigues sont séparés depuis janvier 2009 et que M. Gatti habite au sous-sol chez sa mère. Mme Gatti jure que M. Gatti y a couché tous les jours entre janvier et juin 2009. Tous ont recommandé à M. Gatti de divorcer.

[248]     S'il est exact que M. Gatti dormait chez sa mère après ses sorties dans les clubs, et de plus en plus souvent en avril et mai 2009, il a néanmoins toujours maintenu sa relation conjugale.

[249]     Les disputes sont entrecoupées de périodes de réconciliation pendant lesquelles M. Gatti demeure régulièrement à la résidence familiale avec Mme Rodrigues et Arturo Jr. Il les voit sur une base régulière, sinon quotidienne. De plus, entre décembre 2008 et juillet 2009, le couple voyage à Cuba, aux Bahamas, au Mexique, au Panama, dans les Caraïbes, à Québec, en Europe et au Brésil[84].

[250]     La relation du couple ressemble à des montagnes russes. Les conjoints se réconcilient aussi souvent qu'ils se disputent. Pour ne donner que quelques exemples :

·                    en décembre 2008, M. Gatti est arrêté pour voies de fait sur Mme Rodrigues; quelques jours plus tard, ils se retrouvent en famille, avec Arturo Jr et les parents de M. Gatti, à Cuba;

·                    le 1er mai 2009, M. Gatti offre une automobile à Mme Rodrigues pour son anniversaire de naissance; le [...] 2009, il consulte une avocate en droit de la famille et signe une promesse d'achat sur un condominium de la rue De Castelnau où il envisage de recevoir son fils lors de l'exercice de droits d'accès;

·                    le 2 juin 2009, M. Gatti dépose une plainte auprès des policiers contre Mme Rodrigues; le 6 juin 2009, le couple est en voyage à Québec.

[251]     Certes, la preuve prépondérante (Mme Gatti et Messieurs Rizzo, Santos et Villeneuve, le courtier immobilier) démontre qu'en mai 2009, M. Gatti a acheté l'appartement sur la rue De Castelnau pour y vivre seul et pouvoir y accueillir son fils pendant l'exercice des droits d'accès[85].

[252]     Par ailleurs, la preuve démontre également que si tel était l'état d'esprit de M. Gatti au début mai 2009, la situation a évolué par la suite. Le couple s'est, une fois de plus, réconcilié.

[253]     Il semble que M. Gatti a, à un certain moment, parlé du condominium à Mme Rodrigues et suggéré qu'ils y emménagent en famille. Le témoignage de Mme Rodrigues à cet effet est corroboré par celui de Mme Purchio, la voisine et gardienne de l'enfant, témoin indépendant.

[254]     Mme Luz, une amie de Mme Rodrigues, M. Casino et Mme Purchio confirment que les conjoints formaient toujours un couple. Les conjoints vont ensemble à la cabane à sucre, au parc, à des fêtes publiques.

[255]     En juin 2009, les conjoints voyagent ensemble à Québec, en Europe et au Brésil. M. Gatti offre une bague à Mme Rodrigues. Il entreprend des démarches auprès des autorités d'immigration pour parrainer Mme Rodrigues à titre de conjoint.

[256]     M. Fabrizio Gatti reconnaît que son frère part en Europe pour tenter de faire fonctionner son mariage.

[257]     Le Tribunal conclut qu'entre janvier et juin 2009, le couple était certainement en difficulté, mais que les conjoints n'étaient pas séparés.

6.6       la signature du testament de 2009

[258]     Sur cet aspect, le Tribunal retient le témoignage du notaire Moidel, témoignage précis, par une personne qui n'a pas d'intérêt pécuniaire dans le litige[86].

[259]     Il est vrai que le choix de Me Moidel surprend[87]. Les explications données par Mme Rodrigues à cet égard ne sont pas entièrement satisfaisantes. Mais, il ne faut pas oublier qu'à l'origine, Me Moidel n'est consulté que pour préparer une lettre d'autorisation pour que M. Gatti puisse voyager avec Arturo Jr, puisque c'est lui qui emmènera l'enfant se faire garder chez la grand-mère maternelle au New Jersey pendant le voyage des parents en Europe.

[260]     Le 11 juin 2009, Mme Rodrigues rencontre Me Moidel et lui demande de préparer la lettre[88].

[261]     Me Moidel demande à Mme Rodrigues de lui transmettre certains documents d'identification, documents transmis le même soir[89]. Puis, le notaire s'informe de l'existence ou non de testaments puisque les parents vont voyager sans leur enfant. Mme Rodrigues l'avise qu'elle en discutera avec son mari.

[262]     Le 12 juin 2009, Mme Rodrigues et M. Gatti se présentent au rendez-vous chez Me Moidel. Mme Rodrigues signe l'autorisation de voyage[90].

[263]     Ils amorcent ensuite une discussion concernant les testaments. Les deux conjoints avisent le notaire qu'ils désirent se léguer réciproquement tous leurs biens. S'ils devaient décéder en même temps, tous les biens iraient à Arturo Jr. Ils discutent du choix d'un tuteur pour l'enfant. Le notaire suggère un choix identique dans chacun des testaments pour ne pas causer de difficulté advenant le cas où ils décéderaient au même moment. Ils conviennent de nommer la grand-mère maternelle tutrice à l'enfant.

[264]     Après avoir parlé des testaments, le notaire Moidel suggère de préparer également des mandats en cas d'inaptitude[91].

[265]     Puis les conjoints se mettent à discuter devant Me Moidel. M. Gatti promet d'être fidèle à sa femme et se dit prêt à lui verser une somme d'un million de dollars en cas d'infidélité. Pour garantir le paiement, Me Moidel offre de rédiger un acte d'hypothèque mobilière sur les actifs de M. Gatti. Le notaire reconnaît qu'il s'agit d'une procédure inhabituelle.

[266]     Le 17 juin 2009, le notaire lit les deux testaments en parallèle, en présence des deux époux. Lorsqu'il y a des distinctions, il les souligne.

[267]     Les deux testaments sont à peu près identiques[92] :

·                    ils révoquent tous les testaments antérieurs (art. 1);

·                    chaque époux lègue à l'autre l'universalité de ses biens (art. 6);

·                    les conjoints se nomment réciproquement liquidateurs (art. 10);

·                    en cas de décès de l'un des conjoints, l'autre deviendra tuteur de Arturo Jr (art. 7);

·                    en cas de décès des deux parents, la mère de Mme Rodrigues deviendra tutrice de l'enfant et M. Patrick Lynch, liquidateur et fiduciaire des biens de la succession (art. 7 et 10).

[268]     M. Gatti demande qu'on ajoute une clause dans son testament expliquant qu'il ne lègue rien à sa fille Sofia puisqu'elle est déjà bénéficiaire d'un fonds d'études, d'une fiducie et d'une pension alimentaire jusqu'à l'âge de 18 ans (art. 7).

[269]     Les époux signent chacun leur testament.

[270]     Les testaments comportent des mentions erronées. Ils indiquent que les parties se sont mariées sans contrat de mariage et que leur régime matrimonial est celui de la province de Québec où M. Gatti était domicilié au moment du mariage (art. 3).

[271]     L'on sait maintenant qu'un contrat de mariage existait. Me Moidel affirme avoir inscrit l'information donnée par ses clients.

[272]     Mais ceci n'est pas nécessairement inexplicable. Si, comme le Tribunal l'a décidé, l'on retient la version de M. John Lynch et de Mme Di Antonio concernant la simulation de M. Gatti d'avoir déchiré son contrat de mariage devant son épouse pour lui laisser faussement croire qu'il n'existait plus, il est possible qu'il ait dit au notaire ne pas avoir de contrat de mariage[93].

[273]     Quant à savoir quel était le domicile de M. Gatti au moment du mariage, il s'agit d'une question juridique discutable. M. Gatti résidait aux États-Unis depuis plusieurs années, mais avec un statut d'athlète. La détermination du domicile est une question plus complexe.

[274]     De toute manière, même si ces informations étaient erronées, le Tribunal n'y voit pas un indice de consentement vicié à la signature du testament.

[275]     Le notaire Moidel indique que M. Gatti ne lui a pas mentionné l'existence d'un autre testament[94].

[276]     Le même jour, M. Gatti signe également une hypothèque sur l'universalité de ses biens, jusqu'à concurrence d'un million de dollars, pour garantir sa promesse de fidélité[95], mais les conjoints ne signent pas les mandats en cas d'inaptitude préparés par le notaire.

[277]     La durée de la séance de signature dure entre 30 et 45 minutes. Rien n'indique que les formalités n'ont pas été remplies correctement.

[278]     Le notaire est d'avis que, ce jour-là, M. Gatti comprend très bien le contenu des documents qui sont lus, expliqués et qui ont été discutés lors de la rencontre antérieure. M. Gatti signe de façon volontaire et sans hésitation.

[279]     Même si Mme Rodrigues est plus volubile que M. Gatti devant le notaire, M. Gatti signifie néanmoins clairement son consentement à signer le testament et la promesse de fidélité.

[280]     Les Demandeurs invoquent l'impossibilité pour deux personnes de faire un testament conjoint (art. 704 C.c.Q.). Il n'y a pas ici de testament conjoint, mais deux documents bien distincts, signés séparément. Le jugement Parent c. Stocola (Succession de), soumis par les Demandeurs eux-mêmes, explique bien la distinction entre un testament conjoint et deux documents juridiques séparés valides, même si fait en contemplation l'un de l'autre[96].

[281]     Dans son témoignage, M. Rizzo insinue qu'en raison de son faible degré de scolarité, M. Gatti n'aurait pas compris le testament qu'il signait. Cette opinion n'est pas appuyée par la preuve. Le Testament de 2009 est moins complexe que d'autres documents juridiques signés par M. Gatti dans le passé. De plus, Me Moidel en a expliqué le contenu à M. Gatti.

[282]     En plaidoirie, l'avocat des Demandeurs suggère que la seule présence de Mme Gatti chez le notaire au moment de la signature du Testament de 2009 constituait une pression indue. La preuve ne soutient pas cette affirmation. Le notaire Moidel a bien expliqué la séance de signature et il n'y a eu aucune pression exercée sur M. Gatti à ce moment.

[283]     Les conjoints paraissent heureux. M. Gatti vient d'acheter une bague à sa conjointe et ils s'apprêtent à partir pour l'Europe. Il s'agit vraisemblablement d'une période de réconciliation.

6.7       la conclusion sur la captation

[284]     Bien que le couple ait connu des difficultés majeures, les conjoints n'étaient pas séparés depuis six mois.

[285]     M. Gatti a passé la nuit chez sa mère à plusieurs reprises et de plus en plus fréquemment dans les derniers mois.

[286]     Mais M. Gatti était régulièrement avec Mme Rodrigues, en voyage ou à la résidence familiale à Montréal. Ils n'ont jamais cessé d'être un couple, malgré toutes leurs difficultés matrimoniales.

[287]     Même si, de part et d'autre, les conjoints ont consulté des avocats pratiquant en droit matrimonial, ils n'ont intenté aucune procédure judiciaire de séparation ou de divorce.

[288]     Même après ces consultations, le couple s'est réconcilié.

[289]     M. Gatti a signé un testament notarié en faveur de Mme Rodrigues en toute connaissance de cause.

[290]     Les dispositions testamentaires ne surprennent pas nécessairement. Le notaire Moidel considère ce testament comme un testament typique pour une jeune famille qui s'apprête à voyager sans leur bébé. M. Gatti a déjà assuré la sécurité financière de sa fille Sofia en 2007[97]. Mme Rodrigues est sa conjointe, avec qui il vient de se réconcilier. En cas de décès, c'est elle qui s'occupera d'Arturo Jr. Il n'y a aucune raison de penser qu'elle privera Arturo Jr de quoi que ce soit.

[291]     Lorsque M. Gatti décide de léguer ses avoirs à Mme Rodrigues, il agit peut-être rapidement et sous impulsion, alors qu'il vient de se réconcilier et s'apprête à partir pour un second « voyage de noces », mais de telles circonstances ne constituent pas de la captation.

[292]     Peut-être M. Gatti a-t-il signé le Testament de 2009 pour favoriser le succès de son union avec Mme Rodrigues. Ses motifs lui appartiennent. Il a toute la liberté de tester.

[293]     Cela ne veut pas dire que Mme Rodrigues a usé de fraude ou de manœuvres dolosives pour se faire déclarer légataire universelle, ni que son comportement a influencé indûment le testateur.

[294]     Mme Rodrigues n'a jamais éloigné M. Gatti de sa famille et de ses amis; au contraire, elle a pris l'initiative de plusieurs rencontres avec la famille. Les amis qui relatent certains événements ponctuels n'avaient pas nécessairement une vue d'ensemble sur la relation du couple.

[295]     M. Fabrizio Gatti reconnaît que son frère écoutait parents et amis, mais qu'ensuite, il décidait lui-même.

[296]     Il n'y a pas de preuve de captation et donc, pas matière à annuler le Testament de 2009.

7.         l'indignité

7.1       l'intérêt et la prescription

[297]     L'article 623 C.c.Q. prévoit que tout successible peut intenter un recours en déclaration d'indignité.

[298]     Puisque le Tribunal rejette l'argument de captation et n'annule pas le Testament de 2009, ni Mme Gatti ni M. Fabrizio Gatti n'héritent. Ils ne sont donc pas des successibles au sens de l'article 623 C.c.Q.

[299]     En conséquence, ni l'un ni l'autre n'ont l'intérêt nécessaire, au sens de l'article 55  C.p.c., pour requérir une déclaration d'indignité de Mme Rodrigues.

[300]     Quant au recours de Sofia[98], l'article 623 C.c.Q. prévoit également qu'un recours en déclaration d'indignité doit être intenté « dans l'année de l'ouverture de la succession ou de la connaissance de l'indignité ».

[301]     M. Gatti étant décédé le 11 juillet 2009, elle devait intenter son action avant le 11 juillet 2010. À cette date, elle avait pleine connaissance des faits en litige. Pourtant, ce n'est que le 15 août 2011 qu'elle manifeste pour la première fois son intention de se joindre au litige.

[302]     Dans le jugement permettant l'amendement pour joindre Mme Rivera à titre de codemanderesse[99], le Tribunal a reporté au fond la question de la prescription du recours en indignité puisque, de toute manière, cet argument ne s'appliquait qu'à la demande de déclaration d'indignité et non aux autres questions en litige.

[303]     Il n'y a aucun motif valable qui retarderait le point de départ de la prescription ni qui justifierait une interruption de la prescription au sens de l'article 2896 C.c.Q., tel qu'invoqué par Mme Rivera, à titre de tutrice de Sofia :

2896.    L'interruption résultant d'une demande en justice se continue jusqu'au jugement passé en force de chose jugée ou, le cas échéant, jusqu'à la transaction intervenue entre les parties.

Elle a son effet, à l'égard de toutes les parties, pour tout droit découlant de la même source.

[304]     L'interruption de l'article 2896 C.c.Q. ne profite qu'aux personnes qui sont déjà parties au litige[100].

[305]     De plus, il serait difficile de justifier que Mme Rivera puisse bénéficier d'une interruption de prescription en raison d'un recours intenté par deux personnes qui n'ont même pas l'intérêt nécessaire pour le faire, et ce, simplement parce que, pour des raisons de saine gestion des ressources judiciaires, toutes les demandes ont été entendues lors d'une seule audition.

[306]     L'absence d'intérêt des uns et la prescription du recours de l'autre suffisent à rejeter cette demande.

[307]     De toute manière, avec la preuve entendue, le Tribunal aurait rejeté la demande de déclaration d'indignité.

7.2       les principes généraux

[308]     Le Code civil du Québec précise dans quelles circonstances un héritier peut être indigne de succéder. Dans certains cas, l'indignité existe de plein droit; dans d'autres, elle peut être déclarée par un tribunal :

620.      Est de plein droit indigne de succéder :

1°         Celui qui est déclaré coupable d'avoir attenté à la vie du défunt;

2°         Celui qui est déchu de l'autorité parentale sur son enfant, avec dispense pour celui-ci de l'obligation alimentaire, à l'égard de la succession de cet enfant.

621.      Peut être déclaré indigne de succéder :

1°         Celui qui a exercé des sévices sur le défunt ou a eu autrement envers lui un comportement hautement répréhensible;

2°         Celui qui a recelé, altéré ou détruit de mauvaise foi le testament du défunt;

3°         Celui qui a gêné le testateur dans la rédaction, la modification ou la révocation de son testament.

(soulignement ajouté)

[309]     Les Demandeurs allèguent que Mme Rodrigues a eu un comportement hautement répréhensible au sens du paragraphe 1 de l'article 621  C.c.Q. Ils n'invoquent pas que Mme Rodrigues a exercé des sévices sur le défunt.

[310]     Des cas de fraude, d'abus et de délits majeurs peuvent donner ouverture à une déclaration d'indignité[101].

[311]     La jurisprudence fournit plusieurs exemples permettant de mieux cerner ce qu'est[102] ou n'est pas un comportement hautement répréhensible[103].

[312]     Le comportement doit être volontaire et intentionnel[104].

[313]     Des fautes graves dans l'administration des biens du testateur (comme prélever des sommes appartenant au testateur pour payer ses propres impôts, retirer de l'argent du compte bancaire du testateur pour des fins personnelles) sont considérées comme des comportements hautement répréhensibles[105].

[314]     Entreprendre des procédures en séparation de corps et en pension alimentaire et ne pas reprendre son époux à la maison après une hospitalisation n'ont pas été considérés comme un comportement justifiant une déclaration d'indignité[106].

[315]     La notion de « comportement hautement répréhensible » en matière testamentaire est analogue à celle de « comportement gravement répréhensible » utilisée par le législateur en matière de donation (art.1836 C.c.Q.). Dans Desmarais c. Ziggiotti[107], la Cour d'appel souligne :

[20]       L'ingratitude sanctionnée par la loi ne résulte pas du simple défaut de reconnaissance. Pour un exemple donné, l'amitié qui se tarit, l'affection qui se perd ne seront pas sanctionnées même si cette amitié ou cette affection sont à l'origine du don. L'ingratitude de l'article 1836 C.c.Q. n'est punissable que si elle découle de faits positifs qui révèlent l'existence d'un comportement gravement répréhensible dirigé contre le donateur par le donataire. L'action de l'ingrat sera grave et réfléchie. Règle générale, il doit y avoir une intention malveillante. Il y a lieu d'examiner de près le mobile à la base de l'action coupable pour identifier la nature plus ou moins perverse de l'acte répréhensible.

[21]       À l'opposé, les tribunaux excusent le geste spontané mû bien souvent par la colère et qui ne témoigne pas d'une volonté marquée de manquer à son devoir de reconnaissance. De même, il sera tenu compte de tout élément provocateur attribuable au donateur. Je ne saurais trop insister également sur la gravité du comportement. À cet égard Demolombe écrit :

[…]

Surtout, ils rechercheront l’intention, la volonté, si l’injure n’a pas été l’effet d’un mouvement presque involontaire de colère, ou si elle a été commise froidement et avec préméditation; car c’est là qu’est principalement la noirceur de l’âme et l’ingratitude!

[22]       La «gravité» du comportement répréhensible est le facteur dominant énoncé à l'article 1836 C.c.Q. Il marque la volonté législative de faire de la révocation pour cause d'ingratitude une mesure législative d'exception au principe de l'irrévocabilité des donations entre vifs. Ce facteur reprend l'approche traditionnelle qui exige que les injures, les sévices et les délits présentent un caractère certain de gravité.

(soulignement dans l'original)

[316]     Celui qui invoque l'indignité doit la prouver par preuve prépondérante verbale, écrite ou par des présomptions graves, précises et concordantes. Il ne faut pas conclure à l'indignité sur la base de simples soupçons[108].

[317]     Le Tribunal analyse la preuve à la lumière de ces principes et en fonction des reproches allégués[109] :

·                    le contrôle de M. Gatti;

·                    l'isolement de la famille;

·                    les pressions avant et pendant la confection du Testament de 2009;

·                    la possession du Testament de 2007;

·                    la « gêne » dans la révocation du Testament de 2007 en menaçant de partir pour le Brésil avec Arturo Jr.

7.3       les motifs invoqués

7.3.1    Le contrôle, les pressions et l'isolement de sa famille

[318]     Le Tribunal a déjà décidé que les Demandeurs n'ont pas apporté de preuve prépondérante que Mme Rodrigues contrôlait M. Gatti, ni qu'elle ait fait pression sur lui avant et pendant la confection du Testament de 2009 ni qu'elle l'ait isolé de sa famille (voir la section 6). Ces allégations sont mal fondées.

[319]     Les Demandeurs invoquent également que Mme Rodrigues a continué de dénigrer la famille Gatti, même après la mort de son époux. Ils font référence à une lettre envoyée par Mme Rodrigues aux médias en août 2009[110]. Rien dans cette lettre ne constitue un motif d'indignité. Mme Rodrigues y relate sa perception de la situation.

7.3.2    La possession du Testament de 2007

[320]     Les Demandeurs croient que Mme Rodrigues est en possession de l'original du Testament de 2007 simplement parce qu'elle est la conjointe de M. Gatti et que, n'étant pas bénéficiaire, elle a tout intérêt à cacher ou détruire le testament.

[321]     Il s'agit de spéculation, aucunement appuyée pas la preuve.

7.3.3    La « gêne » dans la révocation du Testament de 2007

[322]     À la question de savoir en quoi Mme Rodrigues a « gêné » M. Gatti dans la révocation du Testament de 2007 (tel qu'invoqué au paragraphe 45 de la Requête), M. Fabrizio Gatti est incapable de répondre[111].

[323]     Mme Rodrigues n'a aucun intérêt à « gêner » M. Gatti dans la révocation du Testament de 2007 alors qu'elle n'est même pas bénéficiaire, d'autant plus que la preuve ne démontre même pas qu'elle connaissait l'existence du Testament de 2007.

[324]     Sans doute, les Demandeurs veulent plutôt démontrer que Mme Rodrigues a « poussé » M. Gatti à révoquer le Testament de 2007 pour en rédiger un nouveau en sa faveur, en menaçant de partir vivre au Brésil avec Arturo Jr., privant ainsi M. Gatti de voir son fils.

[325]     S'il y avait réellement eu menace, M. Gatti n'aurait pas amené Arturo Jr chez la mère de Mme Rodrigues aux États-Unis, puis au Brésil, en juin 2009. Il aurait consulté Me Schirm pour qu'elle prenne les procédures appropriées[112].

[326]     Plusieurs témoins ont évoqué les craintes de M. Gatti à cet égard[113]. Les témoignages sont succincts, rapportés hors contexte et parfois, sans préciser à quel moment les propos ont été prononcés. Ils démontrent une « crainte » de M. Gatti mais non une « menace » de Mme Rodrigues.

[327]     Mme Rodrigues reconnaît avoir menacé d'intenter des procédures en divorce si M. Gatti continuait à revenir ivre à la maison, mais nie avoir jamais menacé de le priver de voir son fils en partant vivre au Brésil.

[328]     Rien dans la preuve ne démontre d'intention de Mme Rodrigues de retourner vivre au Brésil. Même après le décès de M. Gatti, elle tente d'émigrer au Canada[114].

[329]     Il est certain par ailleurs que M. Gatti devait être préoccupé par la possibilité réelle qu'en cas de séparation ou de divorce, Mme Rodrigues ne puisse résider au Canada. Mme Rodrigues ne peut plus aller aux États-Unis. Elle est citoyenne brésilienne et elle n'est au Canada que de manière temporaire.

[330]     Cela explique sans doute pourquoi :

·                    en mai 2009, lorsque M. Gatti consulte une avocate et achète le condominium sur la rue De Castelnau, il cherche également un appartement pour Mme Gatti à Montréal;

·                    en juin 2009, il consulte un conseiller en immigration et signe une demande de parrainage pour régulariser le statut de Mme Rodrigues au Canada.

[331]     De nombreux témoins relatent l'attachement de M. Gatti à son fils et le fait qu'il voulait s'impliquer dans la vie de ce dernier alors qu'il n'a pas été capable d'être aussi présent avec Sofia. M. Gatti a relaté à plusieurs personnes qu'il tentait de sauver son mariage, dans l'intérêt d'Arturo Jr.

7.4       le pardon

[332]     L'article 622 C.c.Q. précise que l'indignité est une peine privée qui peut être pardonnée[115] :

622.      L'héritier n'est pas indigne de succéder et ne peut être déclaré tel si le défunt, connaissant la cause d'indignité, l'a néanmoins avantagé ou n'a pas modifié la libéralité, alors qu'il aurait pu le faire.

[333]     Lors de sa dernière conversation avec sa mère, M. Gatti lui a dit de ne pas s'inquiéter parce que sa femme et lui allaient se réconcilier. Puis, il a signé un testament en faveur de sa conjointe, est parti en Europe avec elle pour un « second voyage de noces » et lui a remis une bague en haut de la tour Eiffel.

[334]     Même M. Fabrizio Gatti reconnaît que son frère avait peut-être pardonné à Mme Rodrigues puisqu'il avait un bon cœur.

[335]     Si même il y avait eu indignité, elle a été pardonnée par M. Gatti.

7.5       la conclusion sur l'indignité

[336]     Mme Gatti et M. Fabrizio Gatti n'ont pas l'intérêt nécessaire pour demander la déclaration d'indignité puisqu'ils ne sont pas des successibles.

[337]     Le recours de Sofia est prescrit.

[338]     Les disputes entre conjoints, les propos et l'attitude parfois déplacée de Mme Rodrigues ne constituent pas un motif pour la déclarer inhabile à succéder pour cause d'ingratitude.

[339]     Il faut se garder de prononcer une déclaration d'indignité au motif que les amis et la famille de M. Gatti l'encourageaient à divorcer en raison de la discorde entre les époux.

[340]     Certes, il y avait des disputes sérieuses, mais il y avait aussi des périodes de réconciliation. Il n'y a pas de preuve d'intention malveillante, d'actions graves et réfléchies, mais plutôt de gestes et de paroles prononcées sous le coup de la colère.

[341]     Le jugement de Droit de la famille - 08934[116], où le juge Cullen rejette une demande d'annulation d'une donation est celui dont les faits s'approchent le plus des faits en litige ici : épouse colérique, disputes et réconciliations à répétition, interventions des policiers, etc.

[342]     Le Tribunal conclut que la preuve ne révèle pas de comportement hautement répréhensible qui justifierait une déclaration d'indignité et que, de toute manière, M. Gatti avait pardonné à Mme Rodrigues.

8.         la reconstitution du testament de 2007

[343]     Les Demandeurs invoquent que M. Gatti aurait signé un testament le 26 avril 2007, avant le mariage de M. Gatti et de Mme Rodrigues et avant la naissance de Arturo Jr, alors que sont en cours les procédures judiciaires contre Mme Rivera concernant Sofia.

[344]     Selon eux, ce testament serait le document produit comme pièce P-6. La pièce P-6 est une photocopie d'un testament non signé.

[345]     Les Demandeurs sont incapables de produire l'original non plus qu'une photocopie signée.

[346]     Comme le permettent les articles 763 et 765 C.c.Q, M. Gatti a expressément révoqué le Testament de 2007 dans le Testament de 2009[117] :

Article First

I hereby revoke all former wills, codicils or other testamentary dispositions of every nature and kind whatsoever by me at any time heretofore made and declare this to be and contain my Last Will and Testament.

[347]     Puisque la demande d'annulation du Testament de 2009 est rejetée, il faut donner plein effet à cette clause.

[348]     Les Demandeurs ont également débattu de la possibilité que Mme Rodrigues ait détruit ou caché le Testament de 2007 ou que M. Gatti l'ait déchiré avec l'intention de le révoquer (art. 767 C.c.Q.). Cette question devient sans importance puisque le Testament de 2009 contient une révocation expresse.

[349]     De toute manière, les Demandeurs ne respectent pas les exigences de l'article 774 C.c.Q. pour obtenir une reconstitution de testament :

774.      Le testament qui n'est pas produit ne peut être vérifié; il doit être reconstitué à la suite d'une action à laquelle les héritiers, les autres successibles et les légataires particuliers ont été appelés, et la preuve de son contenu, de son origine et de sa régularité doit être concluante et non équivoque.

(soulignement ajouté)

[350]     L'un des héritiers au testament n'a pas été appelé au litige, le Arturo Gatti Irrevocable Trust I.

[351]     La preuve démontre qu'un testament a bel et bien été signé en avril 2007, mais elle ne démontre pas de manière concluante et non équivoque que le document P-6 déposé en preuve au dossier est identique au testament signé par M. Gatti[118].

[352]     Comme le souligne le juge Chaput dans Trudel (Succession de) c. Trudel[119], la copie ne fait preuve que si l'on établit la conformité avec l'original. La jurisprudence rappelle la prudence qui doit guider les tribunaux dans la reconstitution de testaments[120].

[353]     La demande de reconstitution du Testament de 2007 est rejetée.

9.         la reconstitution de l'acte de fiducie[121]

[354]     Les Demandeurs qui espèrent obtenir l'annulation du Testament de 2009 et la reconstitution du Testament de 2007 font face à une dernière difficulté.

[355]     Aux termes du Testament de 2007, sauf pour certains legs particuliers à Mme Gatti et à M. Fabrizio Gatti, c'est la fiducie Arturo Gatti Irrevocable Trust I qui hérite et aucun original de l'acte de fiducie n'est au dossier.

[356]     Il n'existe pas de procédure de « reconstitution » d'acte de fiducie en droit québécois.

[357]     Pour atteindre le but recherché, c'est-à-dire faire reconnaître la photocopie qu'ils détiennent comme étant conforme à l'original, les Demandeurs auraient pu se prévaloir de l'article 2860 C.c.Q. :

2860.    L'acte juridique constaté dans un écrit ou le contenu d'un écrit doit être prouvé par la production de l'original ou d'une copie qui légalement en tient lieu.

Toutefois, lorsqu'une partie ne peut, malgré sa bonne foi et sa diligence, produire l'original de l'écrit ou la copie qui légalement en tient lieu, la preuve peut être faite par tous moyens.

[…]

[358]     En l'occurrence, même si les Demandeurs ont prouvé que M. Gatti a signé l'acte de fiducie en avril 2007, ils n'ont pas prouvé que, malgré leur bonne foi et leur diligence, ils sont incapables de produire l'original[122] : personne n'a demandé à M. Patrick Lynch, le fiduciaire, ou à la Morgan Stanley Trust Company, le dépositaire et le fiduciaire après le décès de M. Gatti, s'ils sont en possession de l'original de l'acte de fiducie.

10.       les conclusions

[359]     Les Demandeurs recherchent l'annulation du Testament de 2009 pour cause de captation. Ils n'ont pas prouvé, par prépondérance de preuve, la présence de captation.

[360]     Ils n'ont pas invoqué ni prouvé que Mme Rodrigues serait impliquée dans le décès de son conjoint.

[361]     Mme Rodrigues n'a pas pris le contrôle ni manipulé M. Gatti de manière à le forcer à l'avantager. Elle ne l'a pas isolé de ses proches ni dénigré les membres de sa famille au point où ces derniers se seraient éloignés de lui.

[362]     Les conjoints ont eu des disputes sérieuses, parfois violentes. Mais les disputes sont suivies d'autant de réconciliations. Les conjoints n'étaient pas séparés dans les mois précédant le décès de M. Gatti.

[363]     M. Gatti a volontairement signé le Testament de 2009 et nommé Mme Rodrigues légataire universelle.

[364]     Le Testament de 2009 est valable et il révoque le Testament de 2007.

[365]     Mme Gatti et M. Fabrizio Gatti, n'étant pas héritiers potentiels, n'ont pas l'intérêt nécessaire pour demander une déclaration d'indignité. Quant au recours de Sofia, il est prescrit.

[366]     De toute manière, la preuve ne démontre pas de comportement répréhensible qui aurait justifié une déclaration d'indignité. Enfin, M. Gatti avait pardonné à sa conjointe.

[367]     Il n'y a pas lieu de reconstituer le Testament de 2007, ni l'acte de fiducie Arturo Gatti Irrevocable Trust I.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[368]     REJETTE la requête;

[369]     AVEC DÉPENS.

 

 

__________________________________

CLAUDINE ROY J.C.S.

 


 

 

Me Carmine Mercadante

Me David Roux

mercadante di pace

Avocats de Mme Gatti, M. Fabrizio Gatti et Mme Rivera

 

Me Pierre-Hugues Fortin

Me Philippe Duplantie

kalman samuels

Avocats de Mme Rodrigues

 

Dates d’audience :

6 septembre au 20 octobre 2011


ANNEXE

Les objections 3, 4, et 5

[370]     M. Santos entend une conversation téléphonique entre Mme Rodrigues et M. Gatti. Il veut rapporter les paroles de M. Gatti[123] :

"Amanda, it's over. The relationship …"

"Amanda, it's over. The relationship is over."

"Amanda, it's over."

"Your (sic) a pig …"

"Amanda, you're a pig - he goes - you don't clean, you don't cook - he goes - it's over."

"I'm fed up of that dirty mouth of yours."

"Amanda, they know that you're a stripper".

[371]     Les Demandeurs veulent prouver que la relation entre les parties était terminée au moment de la déclaration. Il s'agit de ouï-dire.

[372]     M. Santos ne rapporte pas les paroles de Mme Rodrigues, seulement celles de M. Gatti. Tout ce que l'on sait est que M. Gatti était rouge de colère.

[373]     Il n'y a aucune preuve des circonstances entourant la déclaration qui démontrerait la fiabilité de celle-ci.

[374]     Le Tribunal accueille les objections.

Les objections 6, 7, 8, 17 et 50

[375]     M. Santos, Mme Gatti et M. Villeneuve, le courtier immobilier, témoignent que M. Gatti a acheté l'appartement sur la rue De Castelnau pour y vivre seul et pouvoir y accueillir son fils pendant l'exercice de droits d'accès[124] :

C. Santos :

… it was a perfect place...

"It's a nice…"

"When I'm going to have him [Arturo Jr], on my visits - he goes - that's where Junior is going to sta[y]. I'm going to build him a really nice room - he goes - I like the fact that there's a park in the front because…"

A-         So, I remember him saying there's a park in the front, it's perfect for Junior to play, for X [Hex], which is his dog, to play. So it was a perfect spot.

Q-        Did he discuss madame Rodrigues coming to the condo?

A-         Definitely. At that point, it was clear that him and Amanda were not together.

R. Villeneuve :

Q-        Okay. Did you have any discussions with Mr. Gatti concerning the reason why he was buying the condo?

A-         Yes, he was purchasing on his own, I… he had made it clear that he left his wife and that …

A-         Well, reason, yes, he was purchasing it on … from what he told me, he was purchasing it on his own to live… And he wanted to… I know he was very anxious to… he said that his son might be staying with him at times and that he was going to… he wanted to make sure the apartment was appropriate, so that when his son stayed with him, that he would have a room set up.

Because the apartment was kind of strangely laid out, he didn't have two (2) bedrooms and he wanted to create a second bedroom for his son; he said that's what he wanted to do. […] And that's why he was concerned about a second bedroom, because he said his son would be staying with him at times.

I. Gatti :

Q-        Est-ce que vous en aviez parlé…est-ce qu’Arturo vous en avait parlé de ce condominium-là avant?

A-         Bien, il l’a acheté parce qu’ils se sont séparés, donc afin qu’il puisse s’en aller seul. C’est ça que…

[…]

A-         Alors, on est allé en haut et Arturo dit… Arturo, il a dit à Geraldo : « On va faire la chambre comme ça, on va faire ça comme ça. Je vais enlever la céramique, je vais la rénover. » Donc, il partait de chez moi pour aller dans son condominium.

[376]     Les Demandeurs veulent mettre en preuve la véracité du contenu, c'est-à-dire que M. Gatti achète un condominium en prévision d'une séparation possible, qu'il entend y vivre seul et y recevoir son fils lors de l'exercice de droits d'accès. Il s'agit de ouï-dire.

[377]     Le Tribunal considère que les exigences de l'article 2870 C.c.Q. sont remplies. La preuve est pertinente. Le décès de M. Gatti démontre la nécessité. La condition de fiabilité est remplie. M. Gatti a fait la même déclaration à trois personnes différentes. Le courtier immobilier est un tiers indépendant qui n'a aucun intérêt à mentir. Cette déclaration concorde avec la preuve qui démontre qu'en mai 2009, le couple est en difficulté et que les disputes sont acrimonieuses. D'ailleurs, M. Gatti consulte une avocate en droit matrimonial le jour même où il signe la promesse d'achat.

[378]     Le Tribunal rejette les objections.

L'objection 14

[379]     M. Sciangula entend une conversation téléphonique entre M. Gatti et Mme Rodrigues[125] :

She told him straight: "I'm going to leave. I'm going to go back to Brazil and you're not going to see your son."

[380]     Le but recherché par l'introduction en preuve de ce témoignage est de prouver que Mme Rodrigues menaçait de quitter pour le Brésil et d'ainsi empêcher M. Gatti de voir son fils. Il s'agit de ouï-dire.

[381]     Le témoin ne précise pas quand cet événement est survenu, ni quel était l'objet de la dispute. Il ne se souvient que de cette phrase. Les propos sont prononcés sous le coup de la colère.

[382]     Mme Rodrigues est présente à l'audience et nie avoir jamais proféré de telles menaces.

[383]     La condition de fiabilité de l'article 2871 C.c.Q. n'étant pas remplie, la déclaration ne peut faire preuve de son contenu.

[384]     Le Tribunal accueille l'objection.

L'objection 18

[385]     M. Rizzo relate des propos insultants de Mme Rodrigues, propos qui auraient été prononcés en mai 2008, alors qu'elle se dispute avec M. Gatti et que M. Rizzo est présent[126] :

Him and Amanda get into a fight and Amanda starts right away, "You’re a loser. You’re good for nothing. All you could make money on is by bleeding. You hear? You’re a nobody. You’re nothing. At the Gomez fight, I was embarrassed. I was embarrassed of you. I was embarrassed to be your wife. Your mother is a whore. Your mother is a bitch. Your sisters are hookers. Fabi is a loser. He’s a loser. Do you hear me? He’s a loser."

And then Arturo approaches himself towards the door and he says, "Tony…"

And she tells Arturo, […] "You're my bitch. Clean, bitch, clean" [after breaking crystal]. […]

[…] And Amanda looks at me, she's naked, and she tells me, "Come in, pussy."

[386]     Le but du témoignage est de relater une dispute à laquelle le témoin a assisté. Il ne s'agit pas de prouver la véracité du contenu des propos rapportés. Il ne s'agit pas de ouï-dire.

[387]     Le Tribunal rejette l'objection.

L'objection 19

[388]     M. Gatti dit à M. Rizzo avoir été embarrassé par la conduite de Mme Rodrigues pendant le baptême[127] :

The baptism was okay, except Amanda had a fit. She made us move from one hall to another hall. The poor waiters were getting treated rotten. And she told him, "You know what? I want you to give me good drinks. These are cheap drinks. And put me in a better hall", and he moved us. Arturo was next to me. He goes, "Tony, I’m so embarrassed, I want to hide myself." I said, "It’s okay, Arturo, the night is going to be over soon."

[389]     Le but recherché est de prouver que Mme Rodrigues était insatisfaite du service reçu au restaurant et que ses exigences ont embêté M. Gatti. Il s'agit de ouï-dire.

[390]     Plusieurs autres témoins confirment que Mme Rodrigues s'est plainte de l'organisation au restaurant, qu'elle est exigeante et mécontente des services reçus. La fiabilité de la déclaration est démontrée.

[391]     Le Tribunal rejette l'objection.

Les objections 20 et 21

[392]     M. Rizzo veut rapporter des paroles de M. Gatti qui rapporte des paroles de Mme Rodrigues, de même que des propos tenus par M. Gatti lui-même[128] :

He talked to me. He needed to talk to someone. He called me and he said, "Listen, Tony, she’s really pushing me. I got to go for my daughter’s birthday. She’s pushing me to talk to Tom McManus." Tom McManus is …

[…]

She was pushing…she was pushing him to go see Tom McManus. He is Arturo’s financial adviser. Arturo told me that she wanted him to change his will. I told him, "Arturo, that’s great. You know, it’s a good thing to change your will." I said, "You have two (2) kids. Your relationship is upside down. You know what you do? Split it. Leave fifty percent (50%) to your daughter and fifty percent (50%) to your son." And what he told me was, "Tony, you’re not understanding me." I said, "What do you mean, Arturo?"

[…] "Amanda wants me to leave everything to her. I will never do that." Those were his words.

[393]     Le but est de faire la preuve que Mme Rodrigues a demandé à M. Gatti de l'avantager dans un testament et la réaction de M. Gatti à cette demande. Il s'agit de ouï-dire.

[394]     Le témoin témoigne de nouveau plus tard, au même effet, et ce, sans objection (09-09-2011, p. 78 à 82).

[395]     Comme le Tribunal le souligne dans le jugement[129], étant donné les relations du couple, il est probable que Mme Rodrigues a discuté de ce qui arriverait à Arturo Jr et à elle en cas de séparation, de divorce ou de décès de M. Gatti.

[396]     L'exception de l'article 2870 C.c.Q. trouve application, les conditions de nécessité et de fiabilité sont remplies.

[397]     Le Tribunal rejette les objections.

L'objection 22

[398]     M. Rizzo veut rapporter une partie de phrase de M. Gatti qui serait une réaction à un message texte envoyé par Mme Rodrigues en mars 2009[130] :

Q-        How do you know?

A-         Because he showed it to me. He showed it to me. He was really sad. He said, "You know what, Tony? There’s a problem with her…"

[399]     Le but de cette déclaration est de prouver qu'il y a « un problème » avec Mme Rodrigues, donc la véracité du contenu de la déclaration. Il s'agit de ouï-dire.

[400]     Le Tribunal ignore ce que contenait le message texte. Il n'y a aucun autre détail fourni sur les circonstances dans lesquelles les paroles ont été prononcées.

[401]     La condition de fiabilité de l'article 2870 C.c.Q. n'est pas remplie.

[402]     Le Tribunal accueille l'objection.

L'objection 23

[403]     M. Rizzo veut rapporter des propos de M. Gatti[131] :

After the hearing, I remember one night we went to play hockey and Arturo had… he had a shiner under his eye. I’ve noticed this two (2) or three (3) times. Then I finally got fed up and I asked him, I said, "Arturo, what happened to you?" He said, "Playing hockey." I said, "Arturo, did you forget I play hockey with you?" So then he smiled and he told me, "She sucker-punched me."

[404]     Le but est de prouver que Mme Rodrigues a frappé M. Gatti. Il s'agit de ouï-dire.

[405]     Encore une fois, l'épisode est cité sans précision sur le contexte. Aucun témoin ne corrobore cette version. Mme Rodrigues le nie. La condition de fiabilité n'est pas remplie.

[406]     Le Tribunal accueille l'objection.

L'objection 24

[407]     M. Rizzo veut témoigner que M. Gatti lui a demandé de trouver un avocat pratiquant le droit matrimonial[132] :

Q-        After this, could you tell us when you met Mr. Gatti next?

A-         After this, Arturo had called me. He said, "Tony, you know what? I have had enough. Can you find me a lawyer?" At that time, I called…

[408]     Il s'agit de ouï-dire.

[409]     Après que l'objection ait été prise sous réserve, Me Schirm a témoigné et confirmé avoir rencontré Messieurs Rizzo et Gatti pour une consultation en droit matrimonial[133]. Le témoignage est ainsi corroboré. Les conditions de l'article 2870 C.c.Q. sont remplies.

[410]     Le Tribunal rejette l'objection.

L'objection 26

[411]     M. Rizzo veut relater l'inquiétude de M. Gatti à ce que Mme Rodrigues et Arturo Jr déménagent au Brésil[134] :

Yes, during that time, he wanted to get divorced. He wanted to get divorced, He had a lot of preoccupations about his son. He was always talking about his son. He said, "You know what, Tony?"

He had a lot of worries about his son. He told me, "Tony, I do not want to lose my son. She wants me to sign a Brazilian passport for him." He was legally advised not to do it and he had a big fear with that.

He goes, "If she takes my son, I’ll never see him." And I told him, "Arturo, you’re not making sense. What are you talking about, you’ll never see him again?" He said, "Tony, you have no idea how it is in Brazil. You haven’t been there." Don’t judge what I’m telling you, he said, "I’m horrified, I’m scared."

[412]     Le but de mettre cette déclaration en preuve est de prouver que Mme Rodrigues veut que M. Gatti signe le formulaire de passeport brésilien pour Arturo Jr. Mme Rodrigues reconnaît qu'elle voulait que son fils ait un passeport brésilien.

[413]     Les Demandeurs, avec cette déclaration, veulent également prouver que M. Gatti craignait que de ne plus revoir son fils s'il partait au Brésil et, à cette fin seulement, il ne s'agit pas de ouï-dire, mais simplement de témoigner sur l'état d'esprit de M. Gatti. Cette inquiétude est corroborée par plusieurs témoins. Le Tribunal analyse cette question dans le jugement (voir la section 7.3).

[414]     Par contre, cette déclaration ne fait pas preuve que, réellement, M. Gatti ne reverrait plus son fils s'il partait au Brésil avec sa mère. Il s'agirait alors de ouï-dire et la preuve ne révèle pas de circonstances démontrant la fiabilité de la déclaration.

[415]     L'existence de la déclaration fait preuve que M. Gatti s'inquiète de ne plus voir son fils s'il part au Brésil avec Mme Rodrigues.

[416]     Le Tribunal accueille partiellement l'objection.

L'objection 28

[417]     M. Rizzo veut rapporter des propos tenus lors d'une rencontre avec M. Gatti au gymnase, en juin 2009, après le voyage en Europe[135] :

He probably stayed with me about two (2) hours. I asked him what happened on his trip. He says, "Tony, I don’t even want to go there." I understood and I didn’t…

[418]     Les Demandeurs comprennent de cette phrase que le voyage en Europe ne s'est pas bien passé pour le couple.

[419]     L'article 2870 C.c.Q. exige, pour que la déclaration soit autorisée, qu'il s'agisse de faits au sujet desquels le témoin aurait pu légalement déposer. Il s'agit ici surtout d'une question de pertinence, car ces mots ne servent pas à faire progresser le débat.

[420]     En effet, cette seule phrase ne prouve rien d'autre que le fait que M. Gatti ne voulait pas raconter son voyage à M. Rizzo. Rien n'explique la cause de cette réticence de M. Gatti.

[421]     Le Tribunal accueille l'objection.

L'objection 30

[422]     M. Rizzo recommande à M. Gatti de ne pas partir au Brésil. Il veut mettre en preuve la réponse de M. Gatti[136] :

I also told him, "Arturo, this doesn’t feel right and it doesn’t smell right. Why do you have to leave right away? Why, Arturo?" I said, "Arturo, it doesn’t smell right. I don’t trust what’s… do not go. Please, do not go." You know what he responded to me? He said, "Tony…" […]

"And what is anybody going to do?"

[423]     Les Demandeurs ne précisent pas ce qu'ils désirent prouver avec la phrase « And what is anybody going to do? ».

[424]     Le Tribunal accueille l'objection sur la base de la pertinence, la déclaration ne prouve rien.

L'objection 34

[425]     M. Gatti possède deux comptes de banque personnels et un compte de banque conjoint. Mme Rodrigues utilise le compte de banque conjoint pour ses dépenses et celles de la famille.

[426]     M. Rizzo prétend que M. Gatti trouvait sa femme trop dépensière et qu'il aurait décidé de réduire l'argent disponible dans le compte de banque conjoint pour qu'elle diminue ses dépenses[137] :

Yes, one day, he called me and he said, "Tony, come with me at the bank, I have to put Amanda on a diet." I didn’t understand what he was getting at. I went with him anyway. We went to the BMO, the Bank of Montreal on Jean-Talon and Langelier. They had a joint account together. There was approximately two hundred and fifty thousand dollars ($250,000) in there and he left her thirteen thousand dollars ($13,000).

He said, "She’s spending between six (6)…" […]

He said, "She's spending between six (6) to eight thousand dollars ($8,000) a week and I want to see how long these thirteen thousand dollars ($13,000) last her." That's what caused the incident of her scratching the truck at the Madison Restaurant.

[427]     Le but de la déclaration est de démontrer que Mme Rodrigues dépense exagérément et que M. Gatti veut voir combien de temps elle prendrait pour dépenser 13 000 $. Il s'agit de ouï-dire.

[428]     Les Demandeurs n'ont pas apporté la preuve que les circonstances entourant la déclaration donnent à celle-ci des garanties suffisamment sérieuses pour pouvoir s'y fier.

[429]     De plus, la crédibilité du témoin laisse à désirer et la preuve documentaire n'appuie pas la version de M. Rizzo.

[430]     L'analyse du relevé du compte conjoint pour la période comprise entre le 24 avril 2009 et le 24 juin 2009 (P-24) contredit les propos de M. Rizzo :

·                    il n'y a jamais eu pendant cette période 250 000 $ dans le compte conjoint comme le prétend M. Rizzo;

·                    M. Gatti a transféré 70 000 $ du compte conjoint à un compte personnel le 6 mai 2009 et le solde ce jour-là est de 13 898 $;

·                    le compte conjoint est vide le 1er juin 2009, donc 25 jours plus tard et non 4 à 6 jours comme le prétend M. Rizzo;

·                    le dernier 6 694 $ a servi à payer le compte conjoint MasterCard (D-12, p. 10), compte posté à M. Gatti chez sa mère et non à la résidence familiale; on peut donc penser que c'est lui qui a payé le compte MasterCard et ainsi vidé le compte conjoint;

·                    le Tribunal est incapable de conclure à la lecture des relevés bancaires lequel des conjoints dépense l'argent puisqu'il s'agit d'un compte conjoint.

[431]     Le Tribunal accueille l'objection.

L'objection 41a

[432]     En mai 2008, au retour d'une séance de magasinage à laquelle participent Mme Gatti et Mme Rodrigues, M. Gatti et sa conjointe discutent ensemble en anglais (Mme Gatti ne parle que l'italien). Puis, M. Gatti dit à sa mère[138] :

Q-        Madame, allez-y. Qu’est-ce que Arturo vous a dit?

R-        Alors, Arturo m’a dit à moi: "Maman, mets pas ton nez où est-ce que Amanda dépense."

[433]     Si les Demandeurs veulent prouver que M. Gatti ne veut pas que sa mère se préoccupe de ce que Mme Rodrigues dépense. Il s'agit de ouï-dire.

[434]     Le témoignage est trop vague pour que le Tribunal puisse conclure que la condition de fiabilité de l'article 2870 C.c.Q. est remplie.

[435]     Au surplus, cette information n'est pas pertinente pour statuer sur les questions en litige.

[436]     Le Tribunal accueille l'objection.

L'objection 48

[437]     Mme Gatti relate des propos de M. Gatti selon lesquels Mme Rodrigues lui aurait demandé d'aller acheter du lait pour l'enfant alors qu'il y en avait déjà à la résidence[139] :

Q-        Madame, après la conversation entre monsieur Gatti et madame Rodrigues, qu’est-ce que votre fils vous dit à propos du lait?

[…]

R-        Il m'a dit, il m'a parlé en italien, puis il me demande, "Elle m'a demandé, à moi, où est-ce qu'il est le lait?" Puis, moi, je lui ai dit: "Bien, le lait, il y en a plein à la maison." Fait que, moi, je lui ai dit: "Arturo - je dis - écoute, s'il y a vraiment pas de lait puis... apporte le lait à l'enfant." Et, lui, il m'a répondu en italien, dans notre langue, il a dit: "M'man, du lait il y en a à la maison."

[438]     Si le but de la déclaration est de prouver qu'il y a ou non du lait à la résidence familiale, il s'agit de ouï-dire. Les Demandeurs n'ont pas apporté la preuve que les circonstances entourant la déclaration donnent à celle-ci des garanties suffisamment sérieuses pour pouvoir s'y fier.

[439]     Au surplus, ces propos ne sont pas pertinents pour régler les questions en litige.

[440]     Le Tribunal accueille l'objection.

L'objection 53

[441]     Mme Gatti veut rapporter les paroles qu'aurait tenues M. Gatti un mois ou deux avant le départ en voyage de juin 2009[140] :

[…] "M'Man, Amanda est folle et elle veut toutes mes affaires à moi."

[442]     Le but de cette preuve est de démontrer que Mme Rodrigues « veut toutes les affaires » de M. Gatti. Il s'agit de ouï-dire.

[443]     Ces propos concordent avec ceux rapportés par M. Rizzo (voir les objections 20-21).

[444]     Le Tribunal conclut que le seuil de fiabilité requis au stade de l'admissibilité est démontré.

[445]     Le Tribunal rejette l'objection.

L'objection 54

[446]     Mme Gatti témoigne sur une menace qu'aurait prononcée Mme Rodrigues[141] :

Q-        Madame, est-ce que votre fils vous a parlé de Junior quand il y avait des disputes avec madame Rodrigues? O.K., je vais répéter, je vais reformuler la question, excuse-moi. Quand ils se disputaient avec sa femme, est-ce qu’il avait des discussions concernant Junior?

R-         Ce qu’il m’a dit, mon fils à moi, il m’a dit: "M’man…"

[…]

R-        "Moi, je dois aller au Brésil parce qu'elle me menace pour ne pas voir mon enfant". […]

"Je dois aller au Brésil, parce que sinon, l'enfant, je le revois plus, elle va pas me faire voir l'enfant".

[447]     Le but de cette preuve est de démontrer que Mme Rodrigues menace M. Gatti de ne plus le laisser voir son fils s'il ne va pas au Brésil. Il s'agit de ouï-dire.

[448]     Il s'agit du seul témoin qui utilise directement le mot « menace » (selon la traduction offerte au procès puisque Mme Gatti témoigne en italien).

[449]     Le témoin ne situe pas avec précision la déclaration dans le temps, ni dans quelle circonstance elle aurait été prononcée. Le Tribunal ignore dans quel état d'esprit M. Gatti était à ce moment où il aurait rapporté des paroles de Mme Rodrigues et ignore le contexte dans lequel Mme Rodrigues aurait prononcé ces mots.

[450]     La condition de fiabilité de l'article 2870 C.c.Q. n'est pas remplie.

[451]     Le Tribunal accueille l'objection.

[452]     Par ailleurs, lors de sa dernière rencontre avec son fils, Mme Gatti relate que ce dernier lui a dit de ne pas s'inquiéter, que tout allait s'arranger.

L'objection 70

[453]     Mme Di Antonio, l'adjointe de l'avocat John Lynch qui a rédigé le contrat de mariage relate un appel téléphonique de M. Gatti[142] :

Q-        Now, after that encounter, did you speak to Mr. Gatti after that, concerning the pre-nup?

A-         Yes.

Q-        Could you tell My Lady when?

A-         He called…

Q-        Could you tell the Court what he asked you?

A-         He asked me if I still had the original pre-nuptial agreement, and I said, "Of Course, Arturo", and that was it.

[454]     Le but recherché est d'établir que, à la suite de la rencontre au bureau de l'avocat Lynch où M. Gatti a déchiré, devant Mme Rodrigues, une photocopie de son contrat de mariage, il a téléphoné à l'adjointe pour s'assurer que l'original existait toujours[143]. Il s'agit de ouï-dire.

[455]     Le témoignage de Mme Di Antonio est clair et précis. Mme Di Antonio est un témoin indépendant qui n'a aucun intérêt à mentir. La condition de fiabilité de l'article 2870 C.c.Q. est remplie.

[456]     Le Tribunal rejette l'objection.

L'objection 128

[457]     M. Casino témoigne avoir dit à M. Gatti qu'en raison de ses problèmes d'alcool, il ne se battait qu'à 50 % de sa capacité. Et M. Gatti aurait répondu : « If that … »[144].

[458]     La conversation remonte à 2001.

[459]     La Défenderesse indique vouloir que la réponse du témoin fasse la preuve que M. Gatti a reconnu avoir un problème avec l'alcool. Il s'agit de ouï-dire.

[460]     Les propos sont trop vagues pour conclure que M. Gatti dans ces deux mots y reconnaissait avoir un problème avec l'alcool à ce moment.

[461]     Le Tribunal accueille l'objection.

 

 



[1]     P-1.

[2]     P-8.

[3]     Requête introductive d'instance ré-ré-amendée (la « Requête »), par. 23-42.

[4]     Id., par. 43-47.

[5]     P-6.

[6]     Gatti c. Barbosa Rodrigues, 2011 QCCS 4693 , par. 90-126; Gatti c. Barbosa Rodrigues, 2011 QCCS 5020 ; Procès-verbal du 07-10-2011, p. 5; Requête introductive d'instance et Requête introductive d'instance amendée. Jamais les Demandeurs n'ont demandé de tenir compte du contenu du rapport d'enquête qui conclurait que M. Gatti ne s'est pas suicidé (sauf pour demander une remise du procès pour étudier ce document), document pourtant déposé dans une action en dommages intentée par Mme Rivera aux États-Unis pendant l'audience du présent procès, D-35.

[7]     Au procès, les témoins relatent souvent des événements sans les situer de manière précise dans le temps. Le Tribunal reconstitue la chronologie en fonction de la preuve et avec les imprécisions qu'elle comporte.

[8]     P-15.

[9]     D-36 et D-37.

[10]    P-31.

[11]    D-50 à D-54.

[12]    Id.

[13]    D-46.

[14]    Bien que Mme Rodrigues l'ait toujours nié, la prépondérance de la preuve démontre qu'elle travaillait alors comme danseuse dans un club, voir notamment P-39. La négation de ce fait n'a pas d'impact direct sur le sort du litige, mais nuit à la crédibilité de Mme Rodrigues.

[15]    P-14-1.

[16]    P-5, P-6 et P-38.

[17]    P-2; D-1-6 à D-1-11.

[18]    Bien qu'annoncé comme témoin en demande, M. Patrick Lynch ne témoigne pas au procès.

[19]    P-3.

[20]    P-14-2.

[21]    Déjà créée six mois plus tôt : P-38. Selon l'article 2 du jugement (P-14-2), 250 000 $ US ont été déposés dans la fiducie en avril 2007. L'argent a été utilisé pour acheter une résidence dont la fiducie est partiellement propriétaire. L'article 7 du Testament de 2009 réfère à une somme de 500 000 $ US.

[22]    P-14-3.

[23]    Déposé dans le compte en fidéicommis de l'avocat de l'enfant, E. Rivera, 07-10-2011, p. 110-112.

[24]    P-14-3, P-14-4 et P-14-5.

[25]    D-3.

[26]    D-1-12 à D-1-15.

[27]    D-1-34 à D-1-42.

[28]    Gatti c. Barbosa Rodrigues, 2011 QCCS 4771 (requête pour permission d'appeler rejetée, 2011 QCCA 1786 ). Mme Rodrigues nie d'abord avoir consulté un avocat en droit matrimonial. Mais Me Schirm, l'avocate consultée par M. Gatti en 2009, relate que Mme Rodrigues lui a elle-même communiqué le nom de son avocat, Me Stotland.

[29]    D-1-121 à D-1-133.

[30]    D-1-134 à D-1-158.

[31]    D-1-162 à D-1-197 et D-39.

[32]    D-4.

[33]    Id.

[34]    Voir la section 6.5 et les objections 6, 7, 8, 17 et 50 de l'Annexe, par. [375] à [378].

[35]    P-34 et P-35.

[36]    Le contenu de la consultation est protégé par le secret professionnel, Gatti c. Barbosa Rodrigues, précité, note 28.

[37]    P-27, P-28 et D-49.

[38]    P-12.

[39]    D-4.

[40]    D-12, p. 11.

[41]    D-1-237 à D-1-251 et D-12.

[42]    Mme Rodrigues ne peut les accompagner parce qu'elle ne peut entrer aux États-Unis.

[43]    Voir la section 6.6.

[44]    D-12, p. 22.

[45]    D-33 et D-41.

[46]    Id.

[47]    D-1-239 à D-1-242.

[48]    D-41.

[49]    D-16, D-17 et D-18.

[50]    M. Reynelg est incapable de produire à l'audience quelque preuve écrite que ce soit qui confirmerait la visite de M. Gatti à ses bureaux. Il a perdu le dossier, de manière inexplicable. Le Tribunal estime néanmoins que son témoignage est crédible. Il décrit en détail sa visite avec M. Gatti avec précision et il dépose une lettre envoyée à Immigration Canada en octobre 2009, confirmant ses propos; P-25, P-26, P-29, P-30 et D-49; E. Reynelg, 04-10-2011, p. 158-202; 06-10-2011, p. 6-50.

[51]    D-12.

[52]    Gatti c. Barbosa Rodrigues, 2009 QCCS 5012 .

[53]    P. TESSIER et M. DUPUIS, « Les qualités et les moyens de preuve », dans Preuve et procédure, Collection de droit 2011-2012, École du Barreau, vol. 2, Cowansville, Éd. Yvon Blais, 2011, p. 297-298; L. DUCHARME, Précis de la preuve, 6e éd., Montréal, Wilson & Lafleur, 2005, p. 213-215; J.-C. ROYER et S. LAVALLÉE, La preuve civile, 4e éd., Cowansville, Éd. Yvon Blais, 2008, p. 129; Raymond v. Township of Bosanquet, (1919) 59 S.C.R. 452; White v. The King, [1947] R.C.S. 268.

[54]    Id.

[55]    Voir également les notes de bas de page 14 et 28.

[56]    Voir l'Annexe, l'objection 70, par. [453] à [456].

[57]    D-28.

[58]    Gatti c. Barbosa Rodrigues, 2011 QCCS 4693 ; c'est M. Fabrizio Gatti qui avance l'argent pour payer le cautionnement pour frais ordonné par le Tribunal, Gatti c. Barbosa Rodrigues, 2011 QCCS 4774 .

[59]    E. Rivera, 07-10-2011, p. 147-165 : Mme Rodrigues aurait manipulé M. Gatti en lui faisant croire qu'il aurait une vie plus stable parce qu'il la mariait. En offrant de superviser les visites de Sofia, Mme Rodrigues aurait encore manipulé M. Gatti et Mme Rivera aurait eu peur de perdre la garde de Sofia. Mme Rodrigues aurait été trop brusque avec Sofia et aurait tenu des propos d'un goût douteux à son sujet en 2007. Mme Rodrigues a été arrêtée par un policier à Maui en janvier 2007.

[60]    D-50, D-53 et D-54.

[61]    E. Rivera, 15-09-2011, p. 25-26.

[62]    D-52.

[63]    E. Rivera, 07-10-2011, p.185-186, 193-200.

[64]    Voir la section 6.2.1.

[65]    D-28, D-30 à D-34.

[66]    D-44, D-45 et D-48. M. Fabrizio Gatti et Mme Gatti ont réussi à accéder au coffret de sûreté à la banque sans avoir de copie de testament et sans avoir été nommés liquidateurs de la succession et leurs témoignages concernant le déroulement de cette visite sont contredits partiellement par les deux employés de la banque.

[67]    D-28. M. Rizzo confirme qu'il n'y avait aucune trace d'entrée par effraction dans l'appartement lorsqu'il a fait changer les serrures après le décès de M. Gatti (T. Rizzo, 09-09-2011, p. 108-146).

[68]    L. DUCHARME, Précis de la preuve, précité, note 53, p. 215.

[69]    Les objections sont numérotées dans les procès-verbaux de l'audience.

[70]    J.-C. ROYER et S. LAVALLÉE, précité, note 53, p. 527-542, 577-578; R. c. Blackman, 2008 CSC 37 ; R. c. Couture, 2007 CSC 28 ; R. c. Khelawon, 2006 CSC 57 ; R. c. O'Brien, [1978] 1 R.C.S. 591Royal Victoria Hospital c. Morrow, [1974] R.C.S. 501 ; Lemoyne c. Lemoyne, J.E. 2003-1952 (C.S.); Leclerc c. Lafrance, J.E. 99-1174 (C.S.).

[71]    R. c. Khelawon, précité, note 70, par. 35.

[72]    P-32.

[73]    M.-C. ARMSTRONG, É. PINARD et C. GENDRON, « L'annulation de testaments pour motif de captation et caducité de legs pour motif d'indignité », dans Fiducies personnelles et successions, Service de la formation continue, Barreau du Québec, vol. 269, Cowansville, Éd. Yvon Blais, 2007, p. 51-72; H. ROCH, Testaments et vérification, Montréal, Wilson & Lafleur, 1951, p. 85-90; A. J. BARETTE, « La capacité et l'acte testamentaire », dans Développements récents en successions et fiducies, Service de la formation continue, Barreau du Québec, vol. 324, Cowansville, Éd. Yvon Blais, 2010; J. BEAULNE, Droit des successions, 4e éd., Montréal, Wilson & Lafleur, 2010, p. 381-396; Stoneham et Tewkesbury (Corp. mun. des cantons unis de) c. Ouellet, [1979] 2 R.C.S. 172 ; Mayrand c. Dussault, (1907) 38 R.C.S. 460; Thibault c. Guilbault, J.E. 99-434 (C.A.); Didone c. Didone-Gagnon, J.E. 94-1772 (C.A.) (autorisation de pourvoi à la C.S.C. rejetée); Girard c. Cloutier, J.E. 91-1643 (C.A.) (autorisation de pourvoi à la C.S.C. rejetée); Gagné c. Taillon, 2011 QCCS 1603 ; Léger c. Léger (Succession de), 2011 QCCS 1087 ; Pepin c. Boucher, 2011 QCCS 720 ; Pupella c. Fernandes, 2009 QCCS 3002 ; S.A. c. F.A., 2008 QCCS 3591 ; Maltais c. Hébert (Succession de), 2007 QCCS 6504 (appel rejeté sur requête, 2008 QCCA 475 ); Savoie c. Savoie, J.E. 2002-790 (C.S.) (appel rejeté).

[74]    Longpré c. Thériault, [1979] C.A. 258 , 262.

[75]    J.-C. ROYER et S. LAVALLÉE, précité, note 53, p. 742-743; Mongeau c. Mongeau, J.E. 85-90 (C.A.); Girard c. Cloutier, précité, note 73.

[76]    Gauthier (Succession de), 2007 QCCA 466 ; Masse-Lafortune (Succession de), [2003] R.J.Q. 1437 (C.A.); Babineau c. Rioux, J.E. 2000-1148 (C.A.); Collin-Evanoff c. Cadieux, J.E. 88-689 (C.A.); Barbeau c. Feuiltault, (1908) 17 B.R. 337; Barroso c. Da Silva Alves, 2010 QCCS 1118 ; Martin c. Martin, 2006 QCCS 2757 ; L.S. c. M.P., J.E. 2005-1168 (C.S.); Michaud c. L'Espérance, J.E. 2002-963 (C.S.); Savoie c. Savoie, précité, note 73; Cinq-Mars c. Boulard-Cinq-Mars, B.E. 97BE-459 (C.S.); Barrière c. Duhaime, J.E. 95-1459 (C.S.) (appel rejeté, J.E. 96-2186 ); Bouchard c. Bouchard, [1959] R.P. 7 (C.S.).

[77]    Laliberté c. Guinta, J.E. 2000-516 (C.S.), par. 60.

[78]    Voir les paragraphes [4] et [5].

[79]    D-50, D-51, D-53 et D-54.

[80]    Voir l'Annexe, l'objection 34, par. [425] à [431].

[81]    D-47; T. McManus, 03-10-2011, p. 276-288.

[82]    Voir P. MALAURIE, Droit civil : les successions, les libéralités, Paris, Lextenso Éditions, à jour au 15 mars 2008, p. 155.

[83]    P-9.

[84]    D-1 et D-39.

[85]    Voir l'Annexe, les objections 6, 7, 8, 17 et 50, par. [375] à [378].

[86]    Mme Rodrigues confond les dates et le déroulement des visites : A. Rodrigues, 16-09-2011, p. 114-127; 22-09-2011, p. 93-102.

[87]    Le Groupe Gatti-Rizzo inc. fait normalement affaires avec le notaire Palombi (D-19). Les bureaux de ce notaire sont à proximité de la résidence familiale. Il a même déjà préparé des lettres d'autorisation pour que M. Gatti voyage seul avec l'enfant. Selon Mme Rodrigues, M. Gatti ne voulait pas que les gens connaissent ses affaires trop en détail. Elle aurait trouvé le nom du notaire Moidel dans les pages jaunes; son bureau serait situé à proximité de l'université Concordia où elle étudie à cette époque (Mme Rodrigues, 16-09-2011, p. 99-110; 03-03-2010, p. 162-170).

[88]    D-5.

[89]    P-10.

[90]    D-6.

[91]    D-9.

[92]    P-8 et D-7.

[93]    Dans l'acte d'achat du condominium sur la rue De Castelnau, D-16, M. Gatti indique également ne pas avoir de contrat de mariage. Mme Rodrigues n'était pas présente lors de la signature de cet acte.

[94]    Mme Rodrigues, au contraire, croit que M. Gatti aurait avisé le notaire de l'existence d'un testament antérieur qui aurait été détruit. Encore une fois, sur cette question, le Tribunal préfère le témoignage du notaire à celui de Mme Rodrigues. Cette déclaration de Mme Rodrigues est, de toute évidence, en sa faveur, puisqu'elle s'oppose à la reconstitution du Testament de 2007 (voir la section 8 du jugement). De plus, son témoignage concernant les visites chez Me Moidel et la signature des testaments est plutôt confus et, à certains égards, erroné. Enfin, elle se contredit parce qu'elle témoigne ne pas avoir connu l'existence du Testament de 2007 avant le décès de M. Gatti.

[95]    P-11.

[96]    2009 QCCA 1286 , par. 36.

[97]    Il est faux de prétendre, comme le font les Demandeurs, que M. Gatti, en ne nommant pas Sofia héritière dans le Testament de 2009, l'a privé de tout soutien financier. Au contraire, son avenir est assuré par le jugement du New Jersey et par les fiducies créées en sa faveur.

[98]    Toutes les parties sont d'avis que Sofia est une successible au sens de l'article 623 C.c.Q. en raison des règles de la représentation prévues aux articles 660 -665, 740, 749 et 750 C.c.Q. Le Tribunal n'est saisi d'aucune question à cet égard.

[99]    Gatti c. Barbosa Rodrigues, 2011 QCCS 4693 .

[100]   Air Inuit (1985) Ltd. c. Canada (Procureur général)J.E. 2001-696 (C.A.) (autorisation de pourvoi à la C.S.C. rejetée); St. Lawrence Manufacturing Canada Inc. c. Warrington Products Inc., [1993] R.D.J. 359 (C.A.); Drolet c. Brien, [1987] R.J.Q. 2045 (C.A.); American Home Assurance c. Construcsim inc., J.E. 2004-1750 (C.S.); Pires c. Mandaric, B.E. 2000BE-1390 (C.S.); Lessard c. Centre de précoce dépistage du cancer de la prostate, B.E. 98BE-788 (C.S.).

[101]   M.-C. ARMSTRONG, E. PINARD et C. GENDRON, « L'annulation de testaments pour motif de captation et caducité de legs pour motif d'indignité », précité, note 73, p. 57.

[102]   Y. L. c. Yv. V., 2010 QCCA 808 (C.A.); M. R. c. Mi. R., 2010 QCCA 1527 ; G. C. c. C. C., 2010 QCCS 6839 ; Cameron c. Cameron, B.E. 2005BE-136 (C.A.); G. M. c. M.-C. O., J.E. 2005-1118 (C.S.).

[103]   Kraus-Remer c. Remer, J.E. 2002-164 (C.A.) (autorisation de pourvoi à la C.S.C. rejetée); Piché c. Piché, 2010 QCCA 187 ; Piché c. Fournier, 2010 QCCA 188 ; Dulude c. Dulude (Succession de), 2009 QCCS 221 ; I. M. c. M. O., 2009 QCCS 3006 ; Nigro c. Nigro, J.E. 2004-1683 (C.S.).

[104]   Piché c. Piché, précité, note 103.

[105]   Y. L. c. Yv. V., précité, note 102.

[106]   I. M. c. M. O., précité, note 103.

[107]   [2003] R.J.Q. 840 (C.A.) (autorisation de pourvoi à la C.S.C. rejetée).

[108]   J. BEAULNE, Droit des successions, précité, note 73, p. 8 et 9.

[109]   Voir le par. [7].

[110]   P-9.

[111]   F. Gatti, 21-09-2011, p. 57-62.

[112]   Le Brésil a adhéré à la convention internationale sur l'enlèvement d'enfants : Loi sur les aspects civils de l'enlèvement international et interprovincial d'enfants, L.R.Q., c. A-23.01, Décret 18-2004, (2004) 4 G.O. II, 907.

[113]   Voir notamment l'Annexe, les objections 14, 26 et 54, par. [379] à [384], [411] à [416], [446] à [452].

[114]   P-29.

[115]   Commentaires du ministre de la Justice sur le Code civil du Québec, t. 1, Québec, Publications du Québec, 1993, p. 368.

[116]   2008 QCCS 1669 .

[117]   P-8.

[118]   M. Levine affirme qu'il s'agit du même testament puisqu'il ressemble aux instructions de M. Gatti notées sur une feuille dans son dossier. D'après lui, il n'y aurait eu aucune modification d'importance entre le projet de testament soumis à M. Gatti en juin 2006, révisé en décembre 2006, et celui qu'il a signé en avril 2007. Pourtant, son adjointe, Mme Firetto témoigne qu'elle a commencé à travailler pour M. Levine en 2007 seulement et que c'est elle qui a tapé le document sur l'ordinateur. M. Levine a reçu une assignation à comparaître lui demandant d'apporter tout son dossier concernant M. Gatti. Néanmoins, il n'apporte à l'audience que les documents qu'il a estimés pertinents. Notamment, il dit détenir dans son dossier un original non signé du testament, imprimé sur papier avec marges rouges. Il ne l'a pas apporté. Le Tribunal ne peut donc pas comparer cet original non signé avec la copie non signée déposée au dossier de la Cour.

[119]   [1997] R.J.Q. 1362 (C.S.).

[120]   Gameroff c. Josephson, [1990] R.D.J. 242 (C.A.); Alexandre c. Miron, J.E. 93-1665 (C.S.).

[121]   P-5.

[122]   J.-C. ROYER et S. LAVALLÉE, La preuve civile, précité, note 53, par. 1277 et suiv.

[123]   C. Santos, 06-09-2011, p. 180-183.

[124]   C. Santos, 06-09-2011, p. 185-187, 194; R. Villeneuve, 08-09-2011, p. 118, 129-130; I. Gatti, 13-09-2011, p. 75-76.

[125]   V. Sciangula, 07-09-2011, p. 238.

[126]   T. Rizzo, 08-09-2011, p. 200-201.

[127]   T. Rizzo, 08-09-2011, p. 203-204.

[128]   T. Rizzo, 08-09-2011, p. 205-210.

[129]   Voir la section 6.2.4.

[130]   T. Rizzo, 08-09-2011, p. 207-208.

[131]   T. Rizzo, 08-09-2011, p. 209-210.

[132]   T. Rizzo, 08-09-2011, p. 210.

[133]   Voir Gatti c. Barbosa Rodrigues, 2011 QCCS 4771 .

[134]   T. Rizzo, 08-09-2011, p. 217-218.

[135]   T. Rizzo, 08-09-2011, p. 223.

[136]   T. Rizzo, 08-09-2011, p. 226-227.

[137]   T. Rizzo, 08-09-2011, p. 238-239.

[138]   I. Gatti, 13-09-2011, p. 44.

[139]   I. Gatti, 13-09-2011, p. 69-70.

[140]   I. Gatti, 13-09-2011, p. 81-84.

[141]   I. Gatti, 13-09-2011, p. 85-86.

[142]   K. Di Antonio, 15-09-2011, p. 71-72.

[143]   Voir la section 4.1.1.

[144]   T. Casino, 4-10-2011, p. 12.

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