Décision

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St-Pierre c. Parc linéaire Le P'tit Train du Nord

2013 QCCA 164

 

COUR D'APPEL

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

GREFFE DE MONTRÉAL

 

No:

500-09-021779-111

 

(700-17-003479-069)

 

 

PROCÈS-VERBAL D'AUDIENCE

 

 

DATE:

31 janvier 2013

 

CORAM:  LES HONORABLES

NICOLE DUVAL HESLER, J.C.Q.

ALLAN R. HILTON, J.C.A.

JACQUES A. LÉGER, J.C.A.

 

APPELANTE

AVOCAT(S)

CAROLE ST-PIERRE

Me Pierre Gilles Laframboise

Laframboise Gutkin s.e.n.c.

 

 

INTIMÉE

AVOCAT(S)

LE PARC LINÉAIRE LE P'TIT TRAIN DU NORD

Me Mathieu Quenneville

Prévost Fortin D'Aoust

 

 

 

En appel d'un jugement rendu le 19 mai 2011 par l'honorable Daniel W. Payette de la Cour supérieure, district de Terrebonne.

 

 

NATURE DE L'APPEL:

Responsabilité

 

Greffière: Marcelle Desmarais

Salle: Antonio-Lamer

 


 

 

AUDITION

 

 

Suite de l'audition du 30 janvier 2013.

Arrêt déposé ce jour.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Marcelle Desmarais

Greffière d'audience

 


PAR LA COUR

 

 

ARRÊT

 

 

[1]          Le conjoint de l’appelante circulait en vélo sur le parc linéaire Le p’tit train du Nord lorsqu’il est tombé dans une tranchée large et profonde de plusieurs pieds. Il a subi une fracture de la colonne et est mort des suites de ses blessures. Rien ne signalait la présence de la tranchée de façon particulière sauf un rondin au sol d’une circonférence de 7 à 8 pouces, placé 5 pieds avant la tranchée, d’un côté comme de l’autre. Ces rondins ne faisaient pas toute la longueur de la tranchée, laquelle excédait la largeur de la piste.

[2]          Selon l’intimée, la piste cyclable n’était pas ouverte au moment de l’accident. Le site Web de l’intimée indique toutefois que la circulation y est permise du 1er mai au 31 octobre 2005. L’accident est survenu le 7 mai, une fort belle journée de printemps.

[3]          Ce qui doit déterminer les soins qui doivent être pris par l’occupant ou le propriétaire d’un terrain envers les gens qui peuvent être amenés à y circuler, ce n’est pas tant le droit de ces derniers d’y passer que la prévisibilité qu’ils le fassent[1].

[4]          Le juge de première instance laisse entendre que l’intimée n’a pas agi avec la diligence requise :

[82]      Malheureusement, des passants ont déchiré les rubans, éliminant ainsi cette signalisation du danger.

[83]      Or, Jacquier[2] sait que ça s’est produit à une ou deux reprises quand il inspecte les lieux le 6 mai, à la veille d’un week-end que l’on prévoit être beau.

[84]      Il convient qu’il s’attend à ce que des cyclistes empruntent la piste au cours du week-end.

[85]      Malgré tout, Jacquier ne prend pas de nouvelles mesures et décide de replacer d’autres rubans. Malheureusement, quelqu’un les enlèvera, encore une fois, avant que Petit n’amorce sa funeste randonnée le lendemain.     

[86]      Dans les circonstances, il aurait été plus prudent que Jacquier prenne d’autres mesures comme l’installation de chevalets aux abords de la tranchée, comme il l’a fait dès après l’accident. Il aurait aussi pu y installer des cônes ou des affiches.

[...]

[93]      Cependant, son importance même commande de prendre des mesures pour souligner le danger potentiel qu’elle présente à tout utilisateur qui, distrait, s’en approcherait imprudemment.

[…]

[94] Or, comme Jacquier sait que les usagers enlèvent les rubans qu’il pose, il doit envisager une alternative moins destructible.

[5]          Malgré ces remarques, le juge de première instance exonère toutefois l’intimée, écartant l’idée que sa négligence ait eu quelque impact que ce soit au niveau de la causalité. En effet, il conclut que vu l’ampleur du trou, il était visible et ne constituait pas un piège.

[6]          Or, l’intimée elle aussi connaissait l’existence et l’importance de cette crevasse, et savait que les rubans jaunes qu’elle posait pour la signaler étaient arrachés.

[7]          La détermination de la causalité est une question de fait et une cour d’appel ne doit intervenir, en pareil cas, qu’en présence d’une erreur manifeste et déterminante.

[8]          Cependant, il tombe sous le sens qu’une signalisation adéquate aurait tout probablement influencé le cours des événements.  Si des chevalets avaient été installés sur toute la longueur de la tranchée, plusieurs pieds avant cette dernière, le malheureux cycliste aurait sans doute percuté ces derniers, mais ne serait probablement pas tombé dans la crevasse. Un accident serait survenu, mais il ne serait pas survenu comme les choses se sont passées.

[9]          Dans ces circonstances, il est manifeste que le juge a erré en ne concluant pas à une faute contributive de la part de l’intimée, qu’il nous paraît raisonnable de fixer à un tiers, l’appelante devant assumer les deux tiers de la responsabilité pour l’accident subi par son défunt conjoint puisque ce dernier, soit roulait trop vite, soit ne portait pas une attention suffisante, soit possiblement les deux.

[10]       Le juge de première instance ne s’étant nullement prononcé sur la question des dommages, il y a lieu de lui retourner le dossier pour qu’il le fasse.

 

POUR CES MOTIFS, LA COUR :

 

[11]       ACCUEILLE l’appel avec dépens;

[12]       INFIRME le jugement de première instance;

[13]       ÉTABLIT la responsabilité respective des parties à un tiers pour l’intimée et deux tiers pour l’appelante;

 

 

[14]       RENVOIE le dossier devant le juge de première instance pour décider du quantum.

 

 

 

NICOLE DUVAL HESLER, J.C.Q.

 

 

 

ALLAN R. HILTON, J.C.A.

 

 

 

JACQUES A. LÉGER, J.C.A.

 

 



[1]     Pelletier c. Fermont (Ville), [2004] R.R.A. 357 .

[2]     Un préposé de l’intimée

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