Décision

Les décisions diffusées proviennent de tribunaux ou d'organismes indépendants de SOQUIJ et pourraient ne pas être accessibles aux personnes handicapées qui utilisent des technologies d'adaptation. Visitez la page Accessibilité pour en savoir plus.
Copier l'url dans le presse-papier
Le lien a été copié dans le presse-papier
Gabarit EDJ

Fédération des producteurs agricoles du Québec c. Côté

2013 QCCS 5700

JB 3778

 
 COUR SUPÉRIEURE

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

SAINT-FRANÇOIS

 

N° :

450-17-004701-125

 

 

 

DATE :

Le 19 novembre 2013

______________________________________________________________________

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE :

L’HONORABLE

MARTIN BUREAU, J.C.S.

______________________________________________________________________

 

 

FÉDÉRATION DES PRODUCTEURS ACÉRICOLES DU QUÉBEC

Demanderesse

c.

STEVE CÔTÉ

Défendeur

Et

RÉGIE DES MARCHÉS AGRICOLES ET ALIMENTAIRES DU QUÉBEC

Mise en cause

 

 

______________________________________________________________________

 

JUGEMENT SUR MOYEN D’IRRECEVABILITÉ À L’ENCONTRE

D’UNE REQUÊTE POUR OUTRAGE AU TRIBUNAL

______________________________________________________________________

 

[1]           La demanderesse et le défendeur sont en litige quant à l’application au défendeur des dispositions de la Loi sur la mise en marché des produits agricoles, alimentaires et de la pêche[1].

[2]           Le 9 novembre 2012, la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec (la Régie) ordonnait au défendeur de permettre l’accès à son érablière et de ne pas entraver l’inspection de celle-ci par la demanderesse.

[3]           Le 28 janvier 2013, l’honorable Gaétan Dumas, à la demande de la Fédération, homologuait la décision de la Régie du 9 novembre 2012, le rendant ainsi exécutoire.

[4]           Le 25 juin 2013, une ordonnance spéciale de comparaître à une accusation d’outrage au Tribunal est émise à l’encontre du défendeur en lien avec des allégations de la Fédération selon lesquelles le défendeur aurait refusé de permettre, malgré l’ordonnance de la Régie et son homologation, une inspection de son érablière.

[5]           Le 28 octobre 2013, les parties sont présentes devant le Tribunal pour procéder à l’enquête et l’audition sur cette demande d’outrage au Tribunal.

[6]           D’entrée de jeu, le défendeur, par l’entremise de son procureur, présente une requête verbale en irrecevabilité aux motifs que le jugement du 28 janvier 2013, homologuant l’ordonnance de la Régie afin que le défendeur permette l’accès à son érablière et n’entrave pas l’inspection, ne lui aurait jamais été signifié, ce qui constituerait un empêchement majeur et absolu à toute condamnation pour outrage au Tribunal.

[7]           Il s’agit donc pour le Tribunal de déterminer s’il est absolument nécessaire, afin que l’on puisse condamner une partie pour outrage au Tribunal à l’encontre d’un jugement ou d’une ordonnance, que ce jugement ou cette ordonnance ait été signifiée à la partie présumée contrevenante.

[8]           Informé le matin même de l’audience de cette requête verbale, le Tribunal a permis à la demanderesse de déposer la correspondance échangée entre le 28 janvier 2013, date du jugement rendu séance tenante pour l’homologation de la décision de la Régie et le 7 février 2013, date où, selon les allégations de la Régie, le défendeur aurait refusé l’accès à son érablière empêchant ainsi l’inspection des lieux.

[9]           De plus, la procureure de la Régie a admis que le jugement d’homologation du 28 janvier 2013 n’a jamais été signifié officiellement au défendeur. Le défendeur a toutefois admis avoir reçu signification de l’ordonnance spéciale de comparaître à une accusation d’outrage au Tribunal.

[10]        La correspondance, P-1, démontre qu’à la suite de l’audition du 28 janvier et de l’ordonnance rendue alors, la demanderesse a informé le procureur du défendeur que la Régie effectuerait l’inspection de son érablière les 7 et 8 février. Malgré les demandes formulées par le procureur du défendeur de garder en suspens l’exécution de cette décision jusqu’à ce que la Cour d’appel se soit prononcée, les procureurs de la Régie ont maintenu leur position.

[11]        Il ressort aussi de cette correspondance que le défendeur connaissait l’existence du jugement d’homologation et qu’il avait donné mandat à son procureur de le porter en appel. Bien plus, le procureur du défendeur affirme dans une lettre qu’il a avisé son client de ne pas s’opposer à l’inspection, même si celle-ci était illégale. Le défendeur a reçu copie de cette correspondance.

 

Analyse et discussion

[12]        Il semble assez bien établi, en doctrine et en jurisprudence, que bien que cela est préférable, la signification d’un jugement ou d’une ordonnance n’est pas absolument nécessaire pour que l’on puisse, par la suite, reprocher à une partie qui ne la respecte pas, d’avoir commis un outrage au Tribunal.[2]

[13]        Il a plutôt été décidé, à quelques reprises, qu’une connaissance de l’existence de la décision est suffisante et qu’une telle connaissance peut être inférée et même circonstancielle.[3] Ce qui est important ce n’est pas absolument une signification de l’ordonnance ou du jugement, mais plutôt que le présumé contrevenant en ait eu une connaissance réelle.[4] De plus, cette connaissance peut exister même s’il n’y a pas eu signification de l’ordonnance.[5]

[14]        Il est donc possible d’inférer une connaissance lorsque les faits prouvés permettent d’appuyer cette inférence.[6]

[15]        Il apparaît clair, aux yeux du Tribunal, dans le présent dossier, que même si le jugement d’homologation n’a pas été signifié au défendeur, celui-ci avait une connaissance réelle de ce jugement et de l’ordonnance initiale de la Régie l’obligeant à se soumettre à l’inspection de son érablière et de ses installations.

[16]        Le moyen d’irrecevabilité invoqué par le défendeur doit donc être rejeté.

 

PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL  :

 

[17]        REJETTE la requête verbale en irrecevabilité du défendeur.

[18]        FIXE au 2 décembre 2013 la poursuite de l’audition relative à l’ordonnance spéciale de comparaître à une accusation d’outrage au Tribunal.

 

 

[19]        LE TOUT frais à suivre le sort de l’instance.

 

 

__________________________________

MARTIN BUREAU, J.C.S.

 

Me Audrey-Julie Dallaire

Procureure de la demanderesse

 

Me Rock Jolicoeur

Procureur de Steve Côté

 

Date d’audience :

28 octobre 2013

 



[1] L.R.Q. c. M-35.1.

[2] Magil c. Moledet et als. REJB 2001-24233 (C.S., P. Journet).

[3] Morasse c. Dubois EYB 2012-213373 (C.S., D. Jacques).

[4] Descoteaux et als c. Barreau du Québec 2006 QCCA 1492.

[5] Samson c. BCIC  2010 QCCA 241.

[6] Bhatnager c. Canada 1990(2) RCS 217.

AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.