Ferland c. Ferlant (Succession de Marion) |
2020 QCTAL 6790 |
TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU LOGEMENT |
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Bureau dE Joliette |
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No dossier : |
534717 29 20200828 G |
No demande : |
3054955 |
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Date : |
06 novembre 2020 |
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Devant la juge administrative : |
Linda Boucher |
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Marc-Antoine Ferland |
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Locataire - Partie demanderesse |
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c. |
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Johanne Ferland En sa qualité de liquidatrice de la succession de Feue Madeleine Marion
Martin Ferland En sa qualité de liquidateur de la succession de Feue Madeleine Marion |
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Partie défenderesse |
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D É C I S I O N
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[1] Le locataire demande au tribunal de statuer sur la validité d’un bail, qu’il ordonne aux défendeurs de lui permettre l’accès au logement, d’ordonner l’exécution provisoire de la décision nonobstant l’appel ainsi que leur condamnation aux frais judiciaires.
[2] Il est apparu rapidement à l’audience que le défendeur Ghislain Ferland mentionné à la demande n’est pas une partie aux présentes. Bien que sa qualité d’héritier de la succession de feue Madeleine Marion soit admise, il appert que la propriété en question est toujours sous la saisine des liquidateurs.
[3] Son nom a donc été retiré du procès-verbal en qualité de défendeur mais a été entendu comme témoin pour la demande.
Mise en situation
[4] Le demandeur habitait chez sa grand-mère jusqu’au décès de celle-ci. Par la suite, les liquidateurs, qui sont le père et la tante du demandeur, ont fait remplacer les serrures de la maison de sorte que le demandeur n’en a plus l’accès.
[5] Les liquidateurs de la succession de feue Madeleine Marion contestent l’existence d’un bail en faveur du demandeur et, de ce fait, contestent la compétence du tribunal à entendre le litige qui oppose les parties.
La demande
[6] Le locataire affirme qu’il occupait la demeure de sa grand-mère en tant que locataire.
[7] Après avoir été expulsé de la maison familiale et un séjour chez des amis, sa grand-mère l’a recueilli chez elle.
[8] Il occupait l’une de chambres de la vaste demeure et partageait les espaces communs avec celle-là.
[9] Il tient pour preuve de l’existence d’un bail entre lui et sa grand-mère, un formulaire que celle-ci a signé afin de fournir une preuve de résidence à emploi Québec et ainsi permettre au demandeur de toucher des prestations.
[10] Il y est indiqué que Marc-Antoine Ferland loue chez elle une chambre pour un loyer de 100 $ par mois.
[11] Le demandeur admet ne jamais avoir payé cette somme qu’il acquittait, dit-il, en rendant des services à sa grand-mère.
[12] Il semble qu’il ne contribuait pas aux autres dépenses de la maisonnée sinon pour des abonnements relatifs au fonctionnement de ses appareils électroniques.
[13] Il ne décrit pas les services qu’il affirme avoir rendu à sa grand-mère sinon qu’il a travaillé au commerce de celle-ci jusqu’à sa vente en 2013. Travail pour lequel il était rémunéré en tant qu’employé.
[15] Le demandeur allègue aussi qu’il possède un droit d’habitation dans la maison en question car c’est ce que sa grand-mère voulait pour lui, du moins jusqu’à la vente de la propriété.
[16] M. Ghislain Ferland corrobore que sur son lit d’hôpital avant de perdre sa lucidité, sa mère déclarait à tout venant qu’elle souhaitait que son petit-fils continue de résider dans sa maison.
[17] Il est admis que le testament de la défunte ne contient pas de droit d’habitation en faveur du demandeur.
L’argumentation de la défense
[18] La défense ne présente aucune preuve pour contester l’existence d’un bail entre feu Madeleine Marion et le demandeur.
[19] L’avocat des défendeurs demande cependant le rejet de la demande en raison de l’inexistence de ce bail et de l’absence de compétence rationae materiae de ce tribunal en l’espèce.
[20] Subsidiairement, si le tribunal devait juger qu’il existe un bail liant les parties, que celles-ci soient convoquées afin d’être entendues sur le fond de l’affaire.
[21] Il opine que le demandeur habitait chez sa grand-mère tout bonnement sans qu’aucun lien contractuel n’existe.
[22] Il s’agissait d’une grand-mère qui avait recueilli son petit-fils qui s’était retrouvé sans toit. Elle lui fournissait le gîte et le couvert sans autres obligations ou contribution de la part du demandeur.
[23] Il plaide que le demandeur n’a pas démontré l’existence des éléments nécessaires à la formation d’un bail d’habitation.
[24] Ainsi peut-on résumer la preuve.
[25] La compétence du tribunal administratif du logement est établie à l’article 28 de la Loi sur le Tribunal administratif du logement (autrefois connus comme étant la Loi sur la Régie du logement), sa loi constitutive, celui-ci stipule ce qui suit :
29. Un régisseur entend et décide seul des demandes qui relèvent de la compétence de la Régie.
Toutefois, le président ou le vice-président qu'il désigne à cette fin peut porter le nombre de régisseurs jusqu'à cinq; il désigne alors, parmi les juges , les avocats ou les notaires, le régisseur qui préside l'audition.
[26] Le tribunal possède donc une compétence exclusive et limitée en matière de bail de logement et pour des litiges n’excédant le seuil de compétence fixé pour la Cour du Québec, lequel est présentement de moins de 85, 000$.
[27] Le bail de logement, lui, est défini à l’article 1892 C.c.Q. Il se lit comme suit :
« 1892. Sont assimilés à un bail de logement, le bail d'une chambre, celui d'une maison mobile placée sur un châssis, qu'elle ait ou non une fondation permanente, et celui d'un terrain destiné à recevoir une maison mobile.
Les dispositions de la présente section régissent également les baux relatifs aux services, accessoires et dépendances du logement, de la chambre, de la maison mobile ou du terrain, ainsi qu'aux services offerts par le locateur qui se rattachent à la personne même du locataire.
Cependant, ces dispositions ne s'appliquent pas aux baux suivants:
1° Le bail d'un logement loué à des fins de villégiature;
2° Le bail d'un logement dont plus du tiers de la superficie totale est utilisée à un autre usage que l'habitation;
3° Le bail d'une chambre située dans un établissement hôtelier;
4° Le bail d'une chambre située dans la résidence principale du locateur, lorsque deux chambres au maximum y sont louées ou offertes en location et que la chambre ne possède ni sortie distincte donnant sur l'extérieur ni installations sanitaires indépendantes de celles utilisées par le locateur;
5° Le bail d'une chambre située dans un établissement de santé et de services sociaux, sauf en application de l'article 1974. »
(Nos soulignements)
[28] CONSIDÉRANT que le demandeur était le seul occupant de la maison de feue sa grand-mère, outre celle-ci;
[29] CONSIDÉRANT que la chambre qu’occupait le demandeur ne possédait ni sortie distincte ni installation sanitaire indépendante;
[30] Le tribunal ne peut conclure à l’existence d’un bail de logement soumis au contrôle de ce tribunal. Si tant est que quelque lien contractuel existât entre le demandeur et sa grand-mère.
[31] Ce tribunal n’a, au surplus, pas compétence en matière de droit d’habitation.
[32] Partant, le tribunal doit décliner compétence.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[33] ACCUEILLE l’objection soulevée par l’avocat des défendeurs ;
[34] DÉCLINE compétence dans le présent dossier.
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Linda Boucher |
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Présence(s) : |
les défendeurs Me Antonin Roy, avocat des défendeurs |
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Date de l’audience : |
1er octobre 2020 |
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AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.