Décision

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Décision

Hurtubise c. Bruneau

2017 QCRDL 40981

 

 

RÉGIE DU LOGEMENT

Bureau dE Montréal

 

No dossier :

253592 31 20160105 G

No demande :

1903082

 

 

Date :

15 décembre 2017

Régisseure :

Linda Boucher, juge administrative

 

Élodie Hurtubise

 

Élyane Hurtubise

 

Valérie Hémond-Turcotte

 

Locataires - Partie demanderesse

c.

Carole Bruneau

 

France Lavigne

Gill Renaud

 

Locateurs- Partie défenderesse

 

D É C I S I O N

 

 

[1]      Le 5 janvier 2016, les locataires déposent une demande de dommages moraux (1 200 $) et réclament l’émission d’une ordonnance enjoignant les locateurs de fournir une preuve de décontamination des lieux.

[2]      Le 5 janvier 2016, elles amendent leur requête introductive d’instance pour demander une ordonnance enjoignant les locateurs d’exécuter certains travaux ainsi qu’une diminution de loyer de 200 $ par mois du 1er juillet au 29 octobre 2015.

[3]      Afin d’éviter tout malentendu, soulignons que les locataires ne réclament pas l’intérêt au taux légal ni l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 C.c.Q., sur les sommes à leur être accordées.  Elles ne réclament pas non plus leurs frais judiciaires.

Les admissions

[4]      Les parties étaient liées par un bail du 1er juillet 2015 au 30 juin 2016 au loyer mensuel de 940 $.


[5]      Les lieux loués sont constitués de cinq pièces et demie.

[6]      Du 1er juillet 2015 au 27 octobre, la chambre de la locataire Elyane Hurtubise a été le théâtre d’une infiltration d’eau au plafond.

[7]      Les locateurs ont pris l’affaire au sérieux et ont entrepris des démarches et des travaux pour éliminer la source d’infiltration et réparer le plafond de la chambre.

[8]      Malheureusement, est-il admis, cette fin d’été a été particulièrement pluvieuse ce qui a retardé les travaux et multiplié les occurrences d’infiltrations.

Les demandes des locataires

[9]      La locataire Elyane Hurtubise fait valoir que durant la période visée, elle a fréquemment été privée de sa chambre et en a été quitte pour trouver refuge dans une autre chambre ou chez son copain qui lui-même ne possède pas de chambre à lui dans le logement qu’il partage, rendant la situation inconfortable pour elle.

[10]   Aussi, les jours de pluie, elle devait éponger et vider les seaux puis laver les serviettes qui servaient à cette tâche.

La défense

[11]   En défense, les locateurs ont essentiellement fait valoir la diligence dont ils ont fait preuve afin de réparer le plafond de la chambre et redonner la jouissance paisible des lieux à la locataire.

[12]   Ainsi peut-on résumer la preuve.

Le droit

[13]   Les locataires fondent leur demande sur les articles 1854, 1865, 1910 et 1911 du Code civil du Québec. Ils se lisent comme suit :

« 1854. Le locateur est tenu de délivrer au locataire le bien loué en bon état de réparation de toute espèce et de lui en procurer la jouissance paisible pendant toute la durée du bail.

Il est aussi tenu de garantir au locataire que le bien peut servir à l'usage pour lequel il est loué, et de l'entretenir à cette fin pendant toute la durée du bail. »

« 1865. Le locataire doit subir les réparations urgentes et nécessaires pour assurer la conservation ou la jouissance du bien loué.

Le locateur qui procède à ces réparations peut exiger l'évacuation ou la dépossession temporaire du locataire, mais il doit, s'il ne s'agit pas de réparations urgentes, obtenir l'autorisation préalable du tribunal, lequel fixe alors les conditions requises pour la protection des droits du locataire.

Le locataire conserve néanmoins, suivant les circonstances, le droit d'obtenir une diminution de loyer, celui de demander la résiliation du bail ou, en cas d'évacuation ou de dépossession temporaire, celui d'exiger une indemnité. »

« 1910. Le locateur est tenu de délivrer un logement en bon état d'habitabilité; il est aussi tenu de le maintenir ainsi pendant toute la durée du bail.

La stipulation par laquelle le locataire reconnaît que le logement est en bon état d'habitabilité est sans effet. »

« 1911. Le locateur est tenu de délivrer le logement en bon état de propreté; le locataire est, pour sa part, tenu de maintenir le logement dans le même état.

Lorsque le locateur effectue des travaux au logement, il doit remettre celui-ci en bon état de propreté. »

[14]   Ces obligations prévues aux articles 1854 al. 1 et 1864 du Code civil du Québec sont des obligations de résultat et celle prévue à l'article 1854 al. 2 du Code civil du Québec est une obligation de garantie.

[15]   Après analyse et délibération, le tribunal constate en effet que les locateurs malgré toute la bonne volonté qu’ils ont manifestée et leur diligence à réparer les lieux loués, n'ont pas livré les lieux loués ni maintenu ceux-ci en bon état de réparation durant les trois premiers mois du bail.

[16]   Une détérioration du toit a causé une infiltration d’eau récurrente dans la chambre à coucher de Mme Elyane Hurtubise qui a souvent été privée de sa chambre durant cette période.


[17]   Elle a subi des inconvénients les jours de pluie durant lesquels il fallait composer avec l’eau qui tombe et elle devait alors trouver refuge ailleurs.

[18]   Les locataires ont subi une perte significative de valeur locative et elles sont donc justifiées de se prévaloir de l’article 1863 C.c.Q. afin de réclamer une diminution de loyer ainsi que des dommages moraux.

Diminution de loyer

[19]   Au sujet de la diminution de loyer, le Tribunal souscrit à l'opinion de Me Gilles Joly dans l'affaire Gagné c. Larocque([1]) alors qu'il définit ainsi ce recours :

« Le recours en diminution de loyer a pour but de rétablir l'équilibre dans la prestation de chacune des parties au bail; lorsque le montant du loyer ne représente plus la valeur de la prestation des obligations rencontrées par le locateur parce que certains des services ne sont plus dispensés ou que le locataire n'a plus la pleine et entière jouissance des lieux loués, le loyer doit être réduit en proportion de la diminution subie.

Il s'agit en somme de rétablir le loyer au niveau de la valeur des obligations rencontrées par le locateur par rapport à ce qui est prévu au bail; la diminution ainsi accordée correspond à la perte de la valeur des services ou des obligations que le locateur ne dispense plus. Il ne s'agit donc pas d'une compensation pour des dommages ou des inconvénients que la situation peut causer. »

[20]   Compte tenu de la nature de la perte de valeur locative en l’instance et de la valeur relative de la pièce affectée par l’infiltration d’eau, le tribunal accorde aux locataires la somme globale de 400 $, somme qui rétablit adéquatement selon nous l’équilibre entre les prestations des parties.

[21]   Au chapitre des dommages moraux, le tribunal accorde aux locataires 300 $.

[22]   Les locataires ayant depuis quitté les lieux loués, leur demande d’ordonnance est à présent désuète.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[23]   ACCUEILLE en partie la demande;

[24]   CONDAMNE les locateurs à payer aux locataires 700 $;

[25]   REJETTE la demande quant au surplus.

 

 

 

 

 

 

 

 

Linda Boucher

 

Présence(s) :

les locataires

les locateurs

Date de l’audience :  

2 novembre 2017

 

 

 


 

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